Dette américaine

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Par Stéphane Déo Publié le 19 février 2020 à 13h54
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128,4 MILLIARDS $Les étrangers ont vendu pour 128,4 milliards de dette américaine en 2019.

Les achats de dette américaine par les étrangers restent faibles. La Fed, qui a recommencé à augmenter son bilan depuis septembre 2019, va probablement devoir continuer de manière récurrente à intervenir pour soutenir le marché. L’indicateur allemand ZEW a baissé, mais sa fiabilité est très limitée.

Point de marché : toujours pas d’achats étrangers de Treasury

Les TICs, les achats de Treasury par les étrangers ont été publiés hier par le trésor américain pour le mois de décembre. L’occasion de faire le bilan sur l’année qui vient de s’écouler. Au total les étrangers ont vendu pour 128,4 milliards de dette américaine sur l’année.

Ce manque d’appétit est à replacer dans une perspective plus longue. Les achats étrangers étaient très récurrents jusqu’en 2012. On peut même calculer que sur la période 1990-2012, les étrangers ont financé 43% du déficit public américain. Depuis 2013 toutefois la tendance s’est inversée avec des ventes nettes cumulées depuis 2013 qui s’élèvent à 250 milliards de dollars. Le financement du déficit se fait donc de manière purement domestique, avec le QE de la Fed qui joue un rôle prépondérant. En effet sur la même période, de Janvier 2013 à Décembre 2019, la Fed a absorbé pour 700 milliards de dette fédérale. La Fed est donc de plus en plus en situation d’acheteur de dernier ressort pour stabiliser le marché. Les interventions actuelles, justifiées par un stress sur le marché monétaire, cachent très probablement un problème plus fondamental d’absorption des émissions de dette publique.

Il faut néanmoins tempérer ce message négatif à cause de la réforme fiscale Trump. Avant la baisse de l’IS en 2018, les entreprises américaines avaient tendance à stocker une partie de leur trésorerie, issue d’activité à l’étranger, dans des pays où la fiscalité était favorable : Irlande, îles Caïmans, etc… Ces liquidités sont évidemment détenues en dollars pour que ces mêmes entreprises n’aient pas de risque de change dans leur bilan consolidé. Ce sont essentiellement des détentions en titres fédéraux. Les « étrangers » sont donc, pour partie, des multinationales américaines qui gèrent leurs liquidités. Une partie importante des ventes récentes par les étrangers provient de ces pays :

  • baisse de 45 milliards depuis début 2018 des détentions irlandaises (le 5ème pays en termes de détention de dette américaine),
  • baisse de 17 milliards des détentions suisses (8ème détenteur mondial),
  • baisse de 40 milliards depuis 2016 pour les iles Caïmans (le 9ème détenteur mondial).

Il s’agit donc peut-être beaucoup plus, sur les chiffres récents, d’un effet réforme fiscale plutôt qu’un désintéressement accru des étrangers.

Il n’en demeure pas moins que le financement du déficit, plus de 1 000 milliards par ans, devient un sujet, les achats de la Fed, devraient se poursuivre pour réguler le marché. Kaplan, qui est un membre votant de la Fed, a confirmé hier que la Fed devrait continuer d’augmenter son bilan, même si la progression sera réduite dans les mois qui viennent avec des opérations de repo plus faibles.

Oubliez le ZEW

Les effets perturbants du coronavirus commencent à se faire sentir de manière nette sur l’économie. Les analystes sont donc à la recherche d’indicateurs avancés pour mesurer l’impact réel. Malheureusement la production d’hier, l’indice allemand ZEW, est d’une fiabilité très relative. Certes, il a baissé nettement en février (situation actuelle passant de -9,5 à -15,7, attentes en chute libre de 26,7 à 8,7), ce qui est logique. Mais il faut souligner que cet indicateur est en général en retard de plusieurs mois sur l’activité et qu’il ne constitue pas un signal fiable pour le futur.

A noter, à contrario, manufacturier Empire State de la Fed de New York était en forte hausse en février à 12,9, alors que le consensus n'était que de 4.8. Là aussi il s’agit d’un indicateur volatile et il ne faut pas trop extrapoler le message positif.

Attendons donc les PMIs et autres IFO pour avoir une idée plus précise de l’impact négatif.

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Stéphane Déo est stratégiste chez La Banque Postale Asset Management. Il est diplômé d'HEC, a un DEA en économie à l'Ehess (Ecole des hautes études en sciences sociales) et un doctorat en finances à HEC. Il a effectué des études post-doctorales à l'université de Berkeley (Californie). Après l’OCDE et Goldman Sachs, il travaille chez UBS en 2001 comme économiste puis stratégiste jusqu’en 2015. Il poursuit son expérience chez Empirical Research Partners comme stratégiste actions globales.

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