Plus de 30 années de contrats aidés pour quels résultats ?

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Par Daniel Moinier Publié le 29 août 2017 à 6h21
Internet Objet Ecole Avenir Classes
57 %En France, les dépenses publiques représentent 57 % du PIB.

La polémique enfle sur les contrats aidés depuis que le premier Ministre Édouard Philippe a annoncé dernièrement que le dispositif était « onéreux » et « peu efficace » pour retrouver un emploi.

Contrats aidés : main d'oeuvre moins chère, camouflage des statistiques, pas de formation à la clé ?

De son côté Jean-Eudes du Buisson, secrétaire de la CPME va un peu dans le même sens en annonçant : « Est-ce incohérent de demander aux collectivités de moins recourir aux contrats aidés alors que la situation des finances publiques est celle qu’on connaît aujourd’hui ? Il y a des efforts à faire ». Et de rajouter : « Cette baisse imposée aux collectivités n’est pas incohérente, il y a eu aussi des baisses demandées aux entreprises, par exemple la suppression des aides à l’embauche dans les PME. Le seul grief qui pourrait être fait, c’est le manque d’anticipation et je comprends les difficultés dans l’Éducation nationale ».

Certaines écoles ont dû retarder la rentrée scolaire comme à la Réunion, où 75 % des postes en contrats aidés ont été supprimés.

A l’origine de cette modification, c’est la Cour des comptes qui dans son dernier rapport avait soulevé le coût exorbitant et l’utilité de ces contrats aidés. S’agit-il d’un amortisseur social, d’obtenir une main-d’œuvre moins chère pour les collectivités locales, de faire baisser artificiellement le taux de chômage ou d’aider une personne éloignée de l’emploi à retrouver un poste ? Cette dernière mesure était la seule prépondérante et il est permis de constater que les contrats aidés non pas du tout atteint leur objectif.

Au fil du temps, il y a certainement eu un chevauchement de tous ces critères, mais le taux de chômage révélé tous les mois est certainement le plus important du point de vue de l’image d’efficacité des mesures mises en place par le Gouvernement.

Jean-Eudes du Mesnil a d’ailleurs rajouté : « En principe, dans les contrats aidés il y a une formation obligatoire à la fin du contrat pour les aider à retrouver un emploi mais seuls 23 % suivent réellement une formation. On voit bien que l’objectif a été dévoyé et on a un vrai décalage entre ce qui se passe dans les collectivités locales et dans le secteur marchand ».

Il a aussi évoqué la formation comme une des clés de l’emploi des jeunes, à condition qu’ils soient déjà dans l’entreprise. Quel meilleur moyen de les y faire rentrer que par l’apprentissage et l’alternance ! C’est aussi mettre un « pied à l’étrier » avec la possibilité soit d’être embauché sur place ou de trouver ensuite plus facilement un « boulot » à l’extérieur.

Ce type d’intégration n’a rien à voir avec l’objectif de créer 500.000 postes en formation par le dernier Président, François Hollande ! Comment, pour qui, avec quel encadrement et financement ? Avec déjà 450.000 emplois aidés et 500.000 personnes en formation la baisse du chômage serait de 950.000, soit par rapport aux 3.518.100 personnes de catégorie A, 27% de moins artificiellement !!! Joli camouflage !

Les contrats aidés, une arme que le gouvernement manie depuis trois décennies

Revenons à l’origine, c’est en 1984 que sont apparus les premiers véritables Contrats Aidés sous le Gouvernement de Laurent Fabius : Les TUC : Travaux d’Utilité Collective (Retrouvez la liste de tous les contrats aidés jusqu’à nos jours dans mon précédent article « Pourquoi le chômage des jeunes ne baisse pas ».) Cela fait donc 33 ans que tous les gouvernements essaient de trouver des parades au chômage, notamment des jeunes, sans succès. Au contraire, plus le chômage a augmenté, plus les créations de contrats se sont succédé et plus le nombre de bénéficiaires a explosé !

Pourquoi un tel manque de discernement, d’analyse, de prises de décisions efficaces, réalistes ? En premier, certainement le manque d’une vraie analyse des causes du chômage et ensuite au fur et à mesure de l’augmentation de celui-ci, la peur de prendre des décissions qui auraient fortement irritées les syndicats employés et la population.

Plus le temps est passé, plus la difficulté de réformer est devenue importante, moins il a été prise de mesure efficace. Les contrats aidés, les baisses de charges, etc, n’étaient que les seules mesures trouvées qui semblaient convenir à tous ou presque, sans créer de blocage ou de « révolution ».

Et nous somme arrivés ainsi après 33 années à une situation explosive. Le moindre changement jugé non positif et c’est la grogne des collectivités, de l’éducation nationale, des associations qui pensent qu’ils ne pourront plus gérer financièrement et efficacement leur charge. Certains même crient que l’on va « ajouter du chômage au chômage » !

Nous avons en France, un État, des collectivités locales, une Éducation nationale très prolixes en nombre de salariés avec des résultats pas toujours probants dans certaines activités.

Avec près de 57 % de dépenses publiques, la France se trouve à dix points de plus que la moyenne européenne ! A fin mars 2017, la dette était de 2209,6 milliards (Soit, 35 546 d'euros par habitant et 71 091 d'euros par ménage) après avoir enregistré une hausse de 62,3 milliards sur le seul premier trimestre. Si la hausse sur le 2 ème trimestre était identique,la dette se monterait à environ 2272 milliards d’euros et le PIB à 2320 milliards d’euros, soit près de 98 % de ce dernier.

Constat :

Comment expliquer la pérennité de ces contrats, malgré les critiques récurrentes qui leur sont adressées ? Ces contrats répondent-ils aux principaux objectifs qui leur avaient été ?xés ? Cibler les personnes en difficulté, soutenir l’emploi et améliorer, à plus long terme, l’insertion professionnelle des béné?ciaires ?

Ces contrats aidés ont toujours été un pis-aller du chômage. Surtout dans le secteur public, beaucoup de jeunes avec pourtant des Bac + 2 et même +5 y ont souscrits, n’ayant rien trouvé d’autre ou par facilité de non recherche poussée, éloignement, etc..

À la fin du contrat du secteur public, un, deux, ou trois ans, le jeune a souvent encore plus de difficulté à retrouver un emploi en entreprise. Son diplôme s’en trouve dévalorisé. Que dire à un employeur qui vous demande « qu’avait vous fait de positif, de valorisant pendant ces 2 ans qui pourrait m’inciter à vous recruter pour ce poste » ? Poste en général très différent de celui tenu en contrat aidé. « Pourquoi avoir choisi un emploi aidé alors que vous pouviez penser que c’était une « voie de garage » pour votre avenir », etc… ?

Coût :

Selon l’État, le coût de l’ensemble des emplois aidés se serait monté à près de 4 milliards d’euros en 2016, hors gestion. Si l’on rajoute les 500.000 emplois formation, coût de base estimé à 1 milliard d’euros, mais de 2 milliards pour le coût global du plan de formation, l’addition EMPLOIS AIDES/FORMATION se monterait à près de 5 milliards d’euros par année !

Il serait certainement beaucoup plus judicieux de diriger une bonne partie de cette somme importante à aider les entreprises à créer des emplois.

www.livres-daniel- moinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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