Coupures d’eau : Veolia porte plainte pour diffamation

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Par Michel Delapierre Modifié le 4 avril 2017 à 18h20
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Depuis la loi Brottes du 16 avril 2013, les coupures d’eau et les pratiques de lentillage (diminution drastique du débit d’eau) pour impayés sont interdites dans les résidences principales.

Associations et multinationales se rendent coup pour coup

Cette interdiction n’est pas du goût de tout le monde et en particulier des distributeurs d’eau comme Veolia et Saur pour qui les coupures ou le lentillage sont les seuls moyens efficaces de lutter contre les impayés. Résultats, même si les multinationales se défendent de ne les utiliser qu’en dernier recours après toutes les procédures de relance possibles, ces pratiques ont la vie dure. C’est ce que dénoncent les associations France Libertés et Coordination Eau Ile de France qui ont attaqué les distributeurs devant les tribunaux à 14 reprises pour les obliger à se conformer aux textes. Tous les procès ont jusqu’ici été gagnés.

La bataille sur le terrain légal est acharnée et les deux camps sont allés jusqu’au Conseil Constitutionnel pour faire valoir leur droit. Toutefois, le conflit a pris une nouvelle ampleur début mars lorsque Veolia a attaqué les deux responsables des associations précédemment citées ainsi que la station de radio RTL en diffamation. En jeu, des articles et interviews donnés en fin d’année dernière durant lesquels les responsables associatifs auraient utilisé des termes portant atteinte à l’honneur et à la considération de la multinationale.

Pour les associations, ces plaintes ne sont qu’un leurre pour détourner l’attention du vrai sujet, les coupures d’eau. Elles dénoncent donc une stratégie judiciaire visant à les museler et à les « épuiser » financièrement à travers des procédures abusives. Cette stratégie, appelée par ses détracteurs « poursuites-baillons », a déjà été utilisée par d’autres multinationales contre des associations et des médias jugés trop critiques.

Les poursuite-baillons

Si dans les faits, la procédure recèle une indéniable efficacité dans la mesure où elle intimide et pousse les associations à dépenser de l’argent en frais d’avocats, sur le plan de l’image de marque, l’effet pourrait être contreproductif. En effet, France Libertés et Coordination Eau Ile de France n’ont pas l’intention de baisser les bras, bien au contraire et elles le font savoir.

Or, dans le bras de fer qui s’engage et qui ressemble bien évidemment au combat de David contre Goliath, les multinationales ont déjà perdu la bataille de l’image. Elles passent et continueront de passer pour des entités âpres aux gains qui n’hésitent pas à s’en prendre aux plus démunis pour améliorer leurs profits.

Par ailleurs, la procédure de Veolia contre ces deux associations pourrait également inciter la France à légiférer sur ces fameuses « poursuites-baillons ». Egalement appelées SLAPP, de leur acronyme anglais Strategic Lawsuit Against Public Participation, elles sont déjà condamnables au Québec depuis 2009. La loi québécoise stipule ainsi que le demandeur, l’entité estimant être diffamée, doit « démontrer que son geste n'est pas exercé de manière excessive ou déraisonnable et se justifie en droit ». Cette procédure sera déclarée abusive si elle a « pour effet de limiter la liberté d'expression d'autrui dans le contexte de débats publics ».

Une loi qui, si elle n’est pas infaillible, a au moins le mérite d'obliger les groupes privés à faire œuvre de pédagogie pour expliquer leurs positions.

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