De la banque de réseau à la débancarisation : comparatif de trois solutions

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Par Nicolas Perrin Publié le 25 janvier 2017 à 5h00
Veracarte Carte Debancarisation Or Argent
40 eurosLa VERAcarte coûte 40 euros pour trois ans.

On n'a rien sans rien. Se débancariser est possible mais nécessite quelques sacrifices. Compte Nickel, Veracarte ou PayPal ? Avantage au premier mais plus de services chez le deuxième.

Pour être complète, une solution de débancarisation doit vous permettre de bénéficier des services bancaires de bases (compte courant, RIB, carte de paiement et possibilité de virements et de prélèvements bancaires) tout en échappant aux contraintes et aux risques relatifs au système bancaire. J’ai déjà évoqué le Compte-Nickel, une solution low cost de bancarisation sans banque qui s’adresse aux particuliers, aux voyageurs et aux auto-entrepreneurs. Elle est arrivée sur le marché grand public français début 2014. Je vais ici vous décrire deux autres possibilités. Un an plus tôt, la société AuCOFFRE.com introduisait un nouveau service de débancarisation avec la VeraCarte.

La VeraCarte, une carte de paiement non-bancaire qui peut être adossée aux métaux précieux

Pour être exact, le Service VeraCarte et la Carte VeraCarte MasterCard Premium sont proposés par la société VeraCash, filiale d’AuCOFFRE.com. VeraCash n’est pas un établissement de crédit (comme une banque) ni un établissement de paiement (comme FPE, la société à l’origine du Compte-Nickel), mais une société de dépôt-vente (comme AuCOFFRE.com). C’est la société Prepaid Financial Services (PFS), dont la société VeraCash est agent direct, qui permet à VeraCash de proposer à ses clients l’utilisation d’une MasterCard.

AuCOFFRE.com est une société novatrice. La gamme de produits qu’elle propose est la plus large du marché français. L’un des reproches souvent adressés à l’or est qu’il a perdu son statut de monnaie d’échange. AuCOFFRE.com a mis un sacré coup de pied dans la fourmilière du marché français en introduisant la VeraCarte qui lève ce verrou. Ce service reprend et développe le concept des cartes de paiement adossés à de l’or que l’Euro Pacific Bank de Peter Schiff propose aux épargnants américains depuis début 2012 (cette carte peut désormais également être adossée à de l’argent). AuCOFFRE.com présente la VeraCarte avant tout comme une solution permettant de continuer à vivre normalement en cas de crise bancaire. Si ce genre de préoccupation vous semble paranoïaque, je vous renvoie par exemple à la crise financière chypriote de 2012-2013.

Comment fonctionne le service VeraCarte ?

La VeraCarte est une MasterCard sans condition de revenus ni de dépôt qui permet de régler en débit immédiat ses dépenses et de retirer du cash sans limite de plafond, hormis la limite du solde du compte. Celui-ci est exprimé non pas en euros mais en grammes d’or, en grammes d’argent ou en millicarats de diamant d’investissement. Les actifs auxquels votre compte est adossé sont intégralement alloués et conservés en Suisse, en dehors du système bancaire. Les coffres sont régulièrement audités afin de certifier de l’existence du métal. Ainsi, si tout le monde voulait simultanément retirer ses dépôts, la société serait en mesure de répondre en revendant intégralement les actifs détenus pour le compte de ses clients. Idem en cas de faillite, les actifs n’étant pas inscrits à l’actif du bilan de la société, ils ne pourraient pas être saisis.

Qu’est-ce qu’il n’est pas possible de faire avec la VeraCarte ?

Il s’agit d’un service réservé aux personnes physiques. Exit donc l’utilisation au travers d’une société. Ce service est nominatif, donc il n’est accessible que par un seul titulaire, ce qui interdit les comptes joints. Le RIB qui vous est remis avec la VeraCarte n’a vocation à servir qu’à l’alimentation de votre compte VeraCarte. Vous ne pouvez donc pas vous en servir pour régler vos factures récurrentes, du type électricité ou téléphone, alors que c’est possible avec un Compte-Nickel.

Vous ne pouvez pas non plus faire de virement à une tierce personne, sauf si elle est elle-même détentrice d’une VeraCarte. Créé en 2015 et nommé VeraCash, ce service d’envoi de matières précieuses au sein d’un réseau communautaire n’est pas facturé. Le site de la FinTech d’AuCOFFRE.com précise que « VeraCash est devenue une unité de compte en 2016″. Les actifs ne peuvent pas faire l’objet d’une récupération physique ni d’une livraison à domicile, mais ce n’est pas vraiment ce que l’on demande à un service de carte de paiement.

Un service novateur… au coût assez élevé

Ce service est donc particulièrement novateur. Mais il a un coût, et ce dernier est plutôt élevé. Voyons d’abord, ce qui est « gratuit » : le stockage de tous les actifs physiques n’est pas facturé, quel qu’en soit le montant. Les paiements et les retraits effectués (en Zone euro et en dehors de celle-ci) avec la MasterCard non plus. Enfin, et c’est appréciable, aucun frais de change n’est facturé (comme sur le Compte-Nickel).

Viennent ensuite les services payants. Le coût de l’abonnement est modique : 40 euros pour trois ans. C’est au niveau des frais que les choses se gâtent : 3% pour l’achat d’or, 7% pour l’achat d’argent et 10% pour l’achat de diamant. En sachant que la conversion lors des approvisionnements et des paiements a lieu au cours spot de Londres +3% pour l’or et +20% pour l’argent, et au cours Rapaport pour le diamant. En cas de virement depuis le compte VeraCarte vers un autre de vos comptes bancaires français, il vous sera facturé 1% du montant, et 1% + 30 euros dans le cas d’un compte bancaire étranger.

Et la fiscalité ?

Côté fiscalité des plus-values, les actifs or, argent et dimant adossés à la VeraCarte voient s’appliquer les règles suivantes :
?– Pour une transaction inférieure à 5 000 euros : exonération de taxe sur la plus-value ;?
– Pour une transaction supérieure à 5 000 euros : plus-value taxée à 34,5% (19% + 15,5% de prélèvements sociaux) avec les abattements de durée en vigueur.

PayPal : le rôle de Deutsche Bank reste obscur

Avec PayPal, « L’argent d’aujourd’hui arrive en deux clics, pas en deux jours », promet sur son site la société fondée en 1998 et rachetée par eBay en 2002, avant d’être revendue en 2015. Avec les grands noms associés à sa création (Peter Thiel, Elon Musk…), PayPal a-t-elle poussé la révolution jusqu’à devenir une solution de débancarisation ? En Europe, la société est enregistrée au Luxembourg en tant qu’établissement de crédit. L’avantage majeur de PayPal est que le service permet de procéder à un paiement en ligne sans qu’il soit nécessaire d’approvisionner votre compte auprès de la société : il suffit d’avoir transmis des coordonnées bancaires à PayPal.

Néanmoins, il est tout à fait possible d’avoir un compte créditeur (non rémunéré). Le transfert de fonds d’un compte PayPal à un autre n’est d’ailleurs pas facturé. PayPal se limitant à la monnaie électronique, la société n’est pas une banque en tant que telle, et elle passe en Europe par les services de la Deutsche Bank auprès de laquelle il convient de virer des fonds pour approvisionner son compte. Deux questions se posent alors : est-ce que les fonds ne font que transiter par la Deutsche Bank ou bien y sont-ils conservés ? Si la banque systémique n’est qu’un intermédiaire dont l’éventuelle faillite serait un phénomène « sans répercussion » (avec tous les guillemets du monde) sur les dépôts des clients auprès de PayPal, que se passerait-il en cas de faillite de PayPal elle-même ?

Ces questions ont leur importance puisque la société n’a pas au Luxembourg le statut de service de dépôt ou d’investissement. La conséquence, précisée dans ses conditions d’utilisation, en est que ses clients ne bénéficient pas de la garantie des dépôts assurée par l’Association pour la Garantie des Dépôts Luxembourg (AGDL). Lorsque j’ai appelé le service client, il m’a assuré que la banque allemande n’est « qu’un intermédiaire » entre PayPal et son client, mais il n’a pas été en mesure de me dire selon quelles modalités sont stockés les fonds des clients. Sont-ils conservés sur un compte séquestre auprès d’une autre banque, comme pour le compte-Nickel ? Le cas échant, auprès de quelle banque ? N’ayant pas eu de réponse au courriel que j’ai adressé au service client, je ne suis malheureusement pas en mesure de vous l’indiquer.

Que retenir de tout cela ?

Vu le manque de transparence que la société entretient vis-à-vis de l’épargnant européen, elle ne donne pas l’impression d’une solution satisfaisante. Par ailleurs, le magazine suisse Bilan s’est interrogé sur le caractère politique de l’interruption par PayPal en novembre 2014 des transferts de fonds à destination de supporters de l’initiative populaire « Sauver l’or de la Suisse ». Chacun en tirera les conclusions qu’il voudra.

Le Compte-Nickel constitue bien une solution low cost alternative à la bancarisation. La VeraCarte n’est pas un service low cost et ne permet pas d’être complètement débancarisé. Son coût est cependant justifié par un grand nombre de services que la société est la seule à proposer sur le marché français. Comme toujours en matière de services, à chacun de voir s’il en a l’utilité.

Pour plus d’informations et de conseils de ce genre, c’est ici et c’est gratuit

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Diplômé de l’IEP de Strasbourg, du Collège d’Europe et titulaire d’un Master 2 en Gestion de Patrimoine, Nicolas Perrin a débuté sa carrière en tant que conseiller en gestion de patrimoine. Auteur de l’ouvrage de référence « Investir sur le Marché de l’Or : Comprendre pour Agir », il est désormais rédacteur indépendant. Il s’intéresse au libéralisme, à l’économie et aux marchés financiers, en particulier aux métaux précieux et aux crypto-actifs, sans oublier la gestion de patrimoine. Son Twitter : @Nikookaburra.

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