Données personnelles : un or digital à placer entre les mains d’un tiers de confiance

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Par Bernard Gissler Publié le 14 décembre 2017 à 5h00
Donnees Personnelles Protection Internet Numerique
600 eurosLa valeur de la vie digitale d'un Européen est estimée à 600 euros par an.

Le GDPR (General Data Protection Regulation), est-il un frein à l’exploitation des données personnelles ?

Il pourrait au contraire la dynamiser si les entreprises voient dans ce nouveau règlement européen, qui va entrer en application le 25 mai 2018, la possibilité de créer de la valeur à partir de cet « or digital » que sont les données personnelles. Au final, c’est une opportunité pour les entreprises qui sauront s'imposer sur ce marché.

Qui peut dire aujourd’hui où se trouvent ses données personnelles ? Qui les utilise ? Et à quelles fins ? Qui ne reçoit pas constamment dans sa boite mail des sollicitations commerciales indésirables, quand elles ne sont pas frauduleuses ? Face au volume croissant des données, il est déterminant pour les entreprises de revoir leurs processus internes de traitement des données, comme l’exige le nouveau règlement européen (GDPR en anglais pour General Data Protection Regulation) qui viendra renforcer, dès le 25 mai 2018, les droits individuels des Européens et les obligations des entreprises en la matière.

Des comportements et des moments de vie qui se monétisent

Jusque-là, des intermédiaires (les data brokers de données) revendaient les informations numériques des particuliers à des plateformes de grands groupes. Une manne, puisque déjà en 2014 la valeur de la vie digitale d’un Européen était estimée, à 600 euros par an (selon une infographie sur le Big Data Business parue dans L’Usine Nouvelle). Les informations les plus valorisées ne sont pas les noms et adresses mais les comportements et moments de vie obtenus via les objets connectés et autres empreintes digitales (montres connectées, trackers d’activité, cartes de cantine, playlist et cookies de navigation sur internet...). Ce sont elles qui donnent de la pertinence dans un push marketing et augmentent le taux de transformation dans le ciblage publicitaire, et par là même leur valeur pécuniaire. Ces informations plus volatiles permettent d’avoir une offre cohérente à un moment donné de la vie d’un particulier. Une donnée qui se monétise plus car le taux de transformation est plus élevé.

Une nouvelle économie des données personnelles est en jeu

Pour valoriser cet « or digital », la démarche repose sur l’instauration d’une chaine de confiance regroupant les collaborateurs, les sous-traitants, les prestataires, les partenaires mais aussi et surtout les particuliers. Pour gagner la confiance de ces derniers, il faut leur donner les moyens de maitriser leurs données, et en particulier de pouvoir retirer leur consentement au moment où ils le souhaitent et de bénéficier de la portabilité de leurs données en toute transparence.

Pour cela, les utilisateurs ont besoin d’être rassurés sur l’inviolabilité du stockage de leurs données, grâce notamment à un coffre-fort avec un niveau de protection bien supérieur à l’offre actuelle (drive, Dropbox...). Le particulier doit être certain que l’entreprise utilise ses informations pour la seule finalité qu’il a acceptée. Cette nouvelle confiance entre entreprise et client va transformer l’économie actuelle autour des data brokers. Un nouveau business model autour des données personnelles est en jeu. Rien ne se fera plus à l’insu des personnes concernées mais sous leur contrôle. À elles de choisir leur tiers de confiance. À l’entreprise de se positionner rapidement comme un acteur du changement.

Pousser des offres autour de la portabilité des données

Avec le nouveau droit à la portabilité des données qui s’appliquera avec le GDPR, les personnes pourront faire transférer leurs données d’un professionnel à un autre. La mise en œuvre généralisée de ce droit peut révolutionner les chaînes de valeurs digitales, étant donné que la personne physique décide de ce qu’elle fait de ses données. Dans la mesure où ce droit s’exerce facilement, qui sait si nous ne verrons pas fleurir de nouvelles offres et de nouveaux services autour de la portabilité des données ?

S'imposer rapidement dans ce marché de niche

À moyen terme, un particulier pourra gérer son portefeuille de données comme un portefeuille boursier à l'aide d’une nouvelle génération d'outils de type cockpit ou un poste de contrôle. Comme il le ferait pour une monnaie virtuelle, il donnera et retirera les accès et les usages de ses données en fonction de ses bénéfices (financiers, d'usage...). Autour de ce portefeuille, on pourrait imaginer un tableau de bord à disposition avec des conseils personnalisés, un coffre-fort des données. Le tout entre les mains d’un tiers de confiance.

Le client se tournera vers l’entreprise qui aura les moyens de lui apporter des preuves de conformité et de transparence. Il est donc urgent de se positionner sur ce marché pour ne pas rater l’opportunité d’attirer de nouveaux prospects et fidéliser ses clients avec des services et des produits GDPR compliant. La mise en conformité du GDPR peut certainement apparaitre comme une exigence réglementaire de plus. Pourtant, elle pourrait également faire la différence pour les entreprises qui sauront saisir l’opportunité qu’elle représente : en renforçant la proximité et la confiance de leurs clients, en supportant la commercialisation de nouveaux services attractifs autour des données personnelles, voire en construisant un nouveau business model.

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Bernard Gissler est Senior Manager Banque chez Sopra Steria Consulting.

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