L’économie française a besoin de réformes structurelles…

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Par Henri Sterdyniak Publié le 31 janvier 2014 à 6h00

Le président Hollande, sous la pression de la Commission Européenne, des marches financiers, des agences de notation, du Medef et de la presse économique (possédée par le patronat), a renforcé l’orientation néo-libérale de sa politique économique : les dépenses publiques (et en particulier les dépenses sociales) devront diminuer de 65 milliards en 4 ans ; les entreprises bénéficieront de 30 milliards de baisse des cotisations sociales familles (qui s’ajoutent aux 25 milliards d’exonération de cotisations sociales, aux 6 milliards de Crédit Impôt recherche, au 6 milliards de réduction de la fiscalité locale des entreprises). Mais, cela ne suffit pas au patronat : il veut 116 milliards de réduction d’impôts, la mise en cause du droit du travail et ceci sans contrepartie.

Le risque est grand que la baisse des dépenses publiques déprime la demande, donc le PIB, que les entreprises n’embauchent pas plus, n’investissent pas plus faute de débouchés de sorte que les 30 milliards de baisse des cotisations se retrouvent en hausse de dividende ou en désendettement, sans impact sur l’emploi. Le risque est grand que tous les pays de la zone euro ne rivalisent en politique de compétitivité, bridant leurs salaires, réduisant leur protection sociale, augmentant les taux de marge des entreprises qui investiront ailleurs, dans les pays émergents, à forte croissance.

Faut-il poursuivre les réformes néo-libérales qui ont abouti à la crise ? Donner plus de poids à la finance ? Diminuer encore la part du travail dans la valeur ajoutée ? Augmenter l’insécurité de l’emploi ? Les travailleurs des pays européens doivent-ils se combattre les uns les autres en acceptant des baisses de salaires ? Faut-il continuer aveuglément une croissance qui mène à la catastrophe écologique ?

Face à ces perspectives mortifères, l’Europe et la France doivent s’engager dans des politiques de ruptures, comportant de vraies réformes structurelles :

- Ni les marchés financiers, ni les agences de notation, dont l’aveuglement et l’avidité, sont responsables de la crise financière de 2008 ne doivent pouvoir influencer les politiques économiques européennes. La BCE doit garantir les dettes publiques ; l’épargne des européens doit être utilisée, via les caisses d’épargne, via des Banques publiques de Développement durables à financer à taux bas les dettes publiques, les collectivités locales, le renouveau productif et la transition écologique.

- La politique économique européenne ne doit plus se donner comme objectif la réduction des dépenses publiques et sociales sous prétexte de résorber la dette publique. Son objectif doit être le plein-emploi par une croissance dont le contenu doit être redéfini. Les politiques d’austérité doivent être stoppées. La coordination des politiques économiques en Europe suppose que les pays du Nord revalorisent leurs salaires (conformément à leur niveau de productivité) et leur protection sociale, qu’ils luttent contre le développement de la pauvreté dans leur pays. Les pays de la zone Euro qui souhaitent avoir des excédents extérieurs doivent les investir physiquement dans les pays du Sud.

- Une protection sociale généreuse (retraite, famille), des services publiques gratuits ou disponible à faible coût (santé, crèches, éducation, culture) sont des éléments essentiels du Modèle Social Européen. Ils doivent être développés.

- Les pays européens doivent mettre en fin à leur coûteuse concurrence fiscale, pour lutter de concert contre l’évasion fiscale des plus riches et des grandes entreprises.

- Le développement de la production et de la consommation ne peut résulter uniquement des stratégies des grandes entreprises. L’Etat, les régions, les banques publiques doivent impulser la transition écologique qui suppose d’autres manières de produire et de consommer. La France doit organiser et financer son renouveau productif, en mettant en avant le Made in France, des produits de qualité, innovants, économes, à longue durée de vie. Ceci demande une plus grande implication des travailleurs dans les décisions des entreprises et passe par une forte réduction des écarts de statuts et de rémunérations dans les entreprises. D’un côté, il faut développer l’emploi de qualité ; de l’autre, la société peut choisir de consacrer les gains de productivité à réduire la durée de travail, à développer des activités non-marchandes ou un âge satisfaisant de départ à la retraite.

Oui, l’Europe, la France ont besoin de s’engager dans uns stratégie cohérente de réformes structurelles.

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Ancien élève de l’ENSAE et économiste à Sciences-Po, Henri Sterdyniak est co-animateur des économistes atterrés. Ceuxi-viennent de publier : « Changer d’Europe », Les Liens qui Libèrent, Paris.

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