Electrosensibilité : une maladie nouvelle génération

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Par Sophie Pelletier Publié le 17 janvier 2017 à 5h00
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10 %L'électrosensibilité toucherait entre 8 et 10 % de la population selon les pays.

Notre société semble être entrée de plein pied dans l'âge du numérique mobile. Ceci engendre une exposition à de multiples fréquences électromagnétiques sans précédent dans l'histoire humaine. Cependant, la réglementation actuelle ne se préoccupe aucunement des impacts à long terme. Pourtant, de nombreuses personnes constatent déjà des effets sur leur santé. Alors, stop ou encore ?

Des ondes omniprésentes... des normes non protectrices

Sans doute lisez-vous cet article sur votre smartphone, tablette ou votre ordinateur connecté en wifi. Force est de constater que les technologies de communications sans fil se répandent à une vitesse exponentielle et deviennent le nouvel eldorado de l'économie, promesse d'une société hyperconnectée. La jeune génération est ainsi la première à avoir été exposée dès sa conception à ces ondes électromagnétiques. Or, les valeurs limites d’exposition actuellement reprises par la réglementation ne protègent que des effets d’expositions aiguës, c’est-à-dire intenses, sur une courte durée mais sont inopérantes pour les expositions chroniques, c’est-à-dire de moindre intensité mais sur une longue durée auxquelles nos organismes sont soumis quotidiennement. En outre, elles ne sont pas protectrices pour les enfants selon l'avis de l’ANSES (l'agence sanitaire française) publié le 8 juillet 2016.

Des effets subtils mais bien réels

Dans ce dossier particulièrement controversé, le consensus existe toutefois sur deux points : d'une part, les enfants sont reconnus particulièrement vulnérables et d'autre part, il est aujourd’hui admis que l’exposition aux radiofréquences a un effet sur l’activité électrique du cerveau, mis en évidence par électroencéphalogramme.

Dès 2009, l’Anses avait pointé des effets sur les fonctions des cellules, recommandant alors une réduction des expositions. En 2013, l’Agence avait également indiqué des risques possibles sur le sommeil, les fonctions cognitives, la fertilité masculine et repris les conclusions de 2011 de l’Organisation Mondiale de la Santé sur une cancérogénicité possible. Avec les études les plus récentes parues à ce sujet, l’augmentation significative du risque de développer une tumeur du cerveau au-delà de 10 ans d’utilisation du portable, pour les utilisateurs dits intensifs (plus de 30 minutes par jour) ou ceux qui ont commencé avant l’âge de 20 ans ne devrait plus être ignorée.

L'électrosensibilité : la partie émergée de l'iceberg

L’Agence travaille actuellement sur une expertise dédiée à la question de l’hypersensibilité électromagnétique pour faire le point sur ce phénomène qui toucherait de 8 à 10 % de la population selon les pays. Bien que décrit dès 1932 par un médecin allemand ayant constaté des troubles chez les personnels ayant travaillé longtemps sans protection à proximité des antennes-radio, puis par les scientifiques russes dans les années 1950-1970 étudiant le syndrome des micro-ondes chez les opérateurs radars, cette pathologie a été opportunément reléguée au rang des troubles médicalement inexpliqués et de maladie psychosomatique, voire psychiatrique, à mesure que se développaient les technologies sans fil. Les récentes études montrant des effets sur l’activité électrique du cerveau permettent d’éclairer d’un jour nouveau cette question.

Vers la fin du déni ?

Aujourd’hui et malgré les signaux et messages d’alerte sanitaires de plus en plus pressants se met en place sans gardes-fous réels une société du tout-numérique et du tout-sans fil. La fuite en avant menant à des expositions toujours plus importantes, précoces et complexes, conduit à l'exclusion les personnes devenues électrosensibles vivant une situation de handicap, mais remet également en cause la liberté constitutionnelle de chacun de vivre dans un environnement sain. Pourtant, il existe de larges marges de manœuvre pour réduire les expositions, d'ordre technique, politique et organisationnel. Il est grand temps de porter au débat public ces questions dont on n’entrevoit seulement que les premiers enjeux, notamment en terme d'éthique : quelle place du numérique, et tout particulièrement du numérique sans fil, dans notre société face à un risque sanitaire en voie de reconnaissance ?

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Sophie Pelletier est ingénieur environnement devenue électrosensible en 2010, porte-parole d'Electrosensibles de France / PRIARTEM, une association qui, depuis 2000, agit pour la reconnaissance et la prévention des risques pour la santé et l’environnement liés aux technologies électromagnétiques (antennes-relais, téléphones portables, wifi, objets connectés...).

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