Enchaînements favorables

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Par Hervé Goulletquer Modifié le 27 février 2019 à 11h27
Domino
60%On vient de récupérer 60% de la baisse enregistrée.

Les ménages américains regardent à nouveau l'avenir avec confiance, sans pourtant que la Fed n'envisage de se départir de sa patience ; voilà des lignes de scénario plutôt favorables pour les marchés. Surtout si les tensions politiques se réduisent.

L’information la plus réconfortante des dernières 24 heures est sans doute la publication de l’enquête du Conference Board sur la confiance des consommateurs américains pour le mois de février. On avait observé au cours des deux mois passés un décrochage de sa composante perspective, alors même que le jugement porté sur la situation présente se maintenait à un niveau élevé. Eh bien, on vient de récupérer 60% de la baisse enregistrée. Même si un point ne fait pas une tendance, le diagnostic le plus crédible est que les ménages gardent à l’heure actuelle un niveau de confiance élevé quant à l’évolution de leur environnement économique à l’horizon des prochains mois. De quoi rassurer en matière de poursuite à bon rythme de la phase de croissance en cours. Les marchés d’actions se sont repris depuis le début de l’année et l’épisode du shutdown (fermeture partielle) de l’administration fédérale a été mis derrière ; de quoi voir le « bon côté des choses » !

C’est dans ce contexte somme toute favorable que Jerome Powell, le Président du Board de la Fed à Washington, s’est présenté devant la commission bancaire du Sénat pour son audition semestrielle. Comme il est d’usage, il a présenté la vue consensuelle du comité de politique monétaire américain. Alors qu’il lui a été reproché au cours des derniers mois de varier dans ses analyses, cette capacité d’autodiscipline est à mettre à son crédit. Sur le fond, donc, rien de nouveau : la banque centrale n’est pas pressée de changer son réglage et toute décision sera fonction du newsflow économique. En termes de diagnostic, tout en confirmant un environnement domestique favorable, il a pointé à nouveau les nuages en provenance du reste du monde, de la sphère politique et de l’épisode récent de volatilité sur les marchés financiers. Bref, le marché reste avec sa question « sur les bras » : la dissipation de ces nuages crée-t-elle les conditions d’une reprise des hausses de taux directeurs ou faut-il, pour que cela advienne, que l’inflation montre davantage « le bout de son nez » ? Anticipation ou réaction, il faudra choisir. Les investisseurs pour le moment se rangent plutôt en faveur de la réaction. Ont-ils raison ? N’est-ce pas se mettre soi-même dans une posture behind the curve ?

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Passons à la politique et commençons par le feuilleton du Brexit. Il y a trois choses à retenir ce matin. D’abord, Theresa May présentera à nouveau son texte de sortie du RU de l’UE au Parlement le 12 mars prochain. En cas de rejet, elle proposera un vote « engageant » sur une sortie sans accord. En cas de rejet, les députés voteront sur un texte de report assez court de la sortie. On parle de trois mois. Il faut comprendre à priori que les deux premières propositions seraient rejetées et la troisième, acceptée. Ensuite, il faut peut-être questionner cet « à priori », en remarquant que les Hard Brexiters d’entre les Conservateurs sont en train de devenir plus souple quant au backstop irlandais (s’assurer qu’il n’y a aura pas de retour à une frontière physique entre l’Eire et l’Ulster). Ils ne rejettent plus le concept et se contenteraient d’un ajout sur le caractère non-permanent de celui-ci. Enfin, il faut remettre en perspective la proposition du leader travailliste, Jeremy Corbin, d’aller vers un second référendum.Elle n’interviendrait qu’au terme d’un processus en trois temps : un vote aux Communes sur la proposition des Travaillistes en matière de sortie de l’UE (elle sera rejetée), puis un vote sur le No-Deal Brexit (il rencontrera une majorité des MPs) et enfin le vote du projet de la Première ministre, mais assorti de la condition de la faire ratifier par un référendum (il devrait être alors soutenu par le groupe travailliste). Il n’est pas sûr que la proposition réunisse une majorité des parlementaires.

Nouvelle rencontre aujourd’hui et demain entre Kim Jong Un et Trump ; qu’en attendre ? Sur la dimension nucléaire des échanges, pas grand-chose ; chaque camp semble attendre un geste de l’autre pour bouger soi-même. Il faudra sans doute se contenter au cours de la période qui s’ouvre devant, comme c’est déjà le cas depuis quelques trimestres, de l’absence de part et d’autre d’initiatives jugées hostiles par le partenaire. En revanche, un pas supplémentaire vers des relations apaisées sur la péninsule coréenne et autour devrait être franchi. Au bénéfice de qui ? Sans doute du Président Trump à un niveau individuel et probablement de la Chine à un niveau diplomatique et économique.

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Hervé Goulletquer est stratégiste de la Direction de la gestion de La Banque Postale Asset Management depuis 2014. Ses champs d’expertises couvrent l’économie mondiale, les marchés de capitaux et l’arbitrage entre classe d’actifs. Il produit une recherche quotidienne et hebdomadaire, et communique sur ces thèmes auprès des investisseurs français et internationaux. Après des débuts chez Framatome, il a effectué toute sa carrière dans le secteur financier. Il était en dernier poste responsable mondial de la recherche marchés du Crédit Agricole CIB, où il gérait et animait un réseau d’une trentaine d’économistes et de stratégistes situés à Londres, Paris, New York, Hong Kong et Tokyo. Il est titulaire d’une maîtrise d’économétrie, d’un DEA de conjoncture et politique économique et diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris.

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