La géopolitique du pétrole pour les années à venir

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Par Christopher Dembik Publié le 4 juin 2015 à 5h00
Petrole Geopolitique Baril Or Noir
60 dollarsLe prix du baril de pétrole est légèrement inférieur à 60 dollars.

La réunion de l’OPEP à Vienne est l’occasion de faire le point sur l’évolution du pétrole dans les années à venir.

Trois tendances majeures apparaissent :
- Dans la foulée de l’Arabie Saoudite, plusieurs pays ont décidé d’accroître leur production pour gagner des parts de marché ;
- La baisse de la production américaine est une illusion d’optique ;
- L’essor de la production irakienne va accentuer le surplus d’offre dans les années à venir.

L’issue de la réunion de l’OPEP du 5 juin fait peu de doutes. Le statu quo devrait l’emporter. La réaction immédiate du marché est, en revanche, plus incertaine. On peut seulement avec assurance anticiper une forte volatilité des cours dans les prochaines séances.

Une stratégie du « chacun pour soi » coûteuse

L’OPEP est engagée dans une stratégie du « chacun pour soi ». Le bloc de la péninsule arabique, mais aussi dans la foulée de nombreux autres pays comme la Libye et l’Irak, ont décidé de s’engager dans une reconquête des parts de marché.

C’est une stratégie coûteuse et qui n’apporte pas pleinement satisfaction. L’Arabie Saoudite peut compter sur le matelas de sécurité que représentent ses confortables réserves de change mais, d’autres pays, comme le Venezuela, sont au bord de l’effondrement.

Si Caracas n’était pas parvenu à sécuriser un prêt de 5 milliards de dollars auprès de la Chine en début d’année et à obtenir 14 milliards de dollars d’investissement de la part de la Russie il y a quelques semaines, le pays serait déjà en situation de défaut de paiement. Une éventualité plus que probable en 2016 au regard de ses réserves de change qui sont à un plus bas de douze ans, à 17 milliards de dollars.

La baisse de la production américaine, une illusion d’optique

L’OPEP a néanmoins toutes les chances de poursuivre sa stratégie qui se révèle, au premier abord, payante. L’opposition qui a pu exister au sein de l’organisation en fin d’année 2014 s’est tue. L’Algérie a décidé de suivre à marche forcée l’exemple de l’Arabie Saoudite tandis que le Venezuela ne milite désormais plus que pour une stabilisation des cours qui n’interviendra, dans tous les cas, que très nettement en dessous du seuil d’équilibre nécessaire pour le pays à 120 dollars.

La fermeture massive du nombre de forages de pétrole de schiste aux Etats-Unis a été considérée par le bloc de la péninsule arabique comme la preuve du succès de sa stratégie. C’est pourtant un indicateur qui ne permet pas d’appréhender pleinement la problématique du pétrole de schiste américain. En effet, il ne prend pas en compte l’essor de la productivité sous l’effet du progrès technique et du recours au forage horizontal qui offre des rendements supérieurs à un puits vertical classique.

De fait, en l’état actuel du marché, la production devrait continuer d’augmenter outre-Atlantique. L’OPEP a seulement réussi à faire disparaitre les concurrents les moins compétitifs dont l’activité était limitée à des puits de moins bonne qualité et faiblement productifs.

L’Irak en embuscade

Par conséquent, tout indique que le déséquilibre entre l’offre et la demande sera une donnée de long terme du marché. Deux nouveaux acteurs devraient accentuer le surplus de production dès l’an prochain : l’Iran et l’Irak.

La perspective probable d’un accord sur le nucléaire iranien devrait provoquer l’arrivée sur le marché de 4 millions de barils par jour, contre seulement 2,8 millions aujourd’hui. Ce équivaudrait toutefois seulement aux 2/3 de la production pétrolière iranienne de 1973.

En revanche, le principal risque est lié à l’essor irakien qui devrait, selon les projections de l’OPEP, représenter 90% de la hausse attendue de la production de l’organisation d’ici à 2020. Bien que la capacité de Daesh à perturber l’exploitation et le transport du pétrole dans le Nord du pays soit incontestable, la majeure partie des puits reste, pour le moment, sous le contrôle de l’Etat central dans la région de Bassora d’où partent ¾ des exportations de pétrole de l’Irak.

Cette donne a peu de chances d’évoluer significativement. Daesh n’est pas en mesure de s’étendre vers le Sud du pays et, quand bien même ce serait le cas, il faudrait s’attendre à une intervention militaire internationale afin d’éviter le délitement complet de l’Irak. C’est une hypothèse peu crédible.

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Christopher Dembik est économiste chez SaxoBank.

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