Les quatre mythes qui justifient la grève de la fonction publique

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Par Eric Verhaeghe Publié le 10 octobre 2017 à 10h41
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38 MILLIARDS ?Les retraites des fonctionnaires coûtent 38 milliards d'euros par an en impôts.

La fonction publique est en grève aujourd’hui pour dénoncer les « attaques » dont elle serait l’objet de la part du gouvernement. Aucun des motifs invoqués ne tient la route. On regrette que personne au gouvernement ne l’explique clairement.

On ne compte plus les prétextes que les fonctionnaires ont mis en avant pour justifier leur grève d’aujourd’hui: solidarité avec les salariés du privé victimes des ordonnances, mise en place d’un jour de carence dans les indemnités journalières de la fonction publique, gel du point d’indice, et autres. Point par point, aucun de ces motifs ne tient.

Le mythe du jour de carence

Par exemple, les fonctionnaires soutiennent que le jour de carence n’existe pas ou plus dans le secteur privé. Voilà un raccourci malhonnête. Le jour de carence existe dans le code du travail, mais il est effectivement le plus souvent comblé aux frais de l’employeur par des contrats de prévoyance souscrits auprès d’un assureur privé.

Rien n’empêche les employeurs publics de souscrire à des contrats de ce type. Mais il est vrai que cette opération suppose un arbitrage budgétaire, comme dans nos entreprises. Il faut trouver l’argent quelque part pour financer cette protection. Les fonctionnaires préfèrent une formule sans jour de carence, c’est-à-dire avec une carence directement financée par le contribuable.

Au passage, aucun fonctionnaire ne se demande comment font les entreprises, réputées d’horribles lieux d’exploitation, pour supporter des charges que la fonction publique ne parvient pas à financer. Aujourd’hui, c’est le contribuable qui paie de fait et, au nom de la solidarité, les fonctionnaires entendent bien continuer à prélever cet impôt déguisé.

Le mythe du point d’indice gelé

Autre mythe colporté par les fonctionnaires: les rémunérations seraient bloquées à cause du gel du point d’indice. Oh! le vilain mensonge!

Les fonctionnaires oublient ici de dire que leur rémunération augmente en moyenne tous les trois ans et de façon totalement automatique du fait des grilles indiciaires. C’est le miracle de la fonction publique. Sans rien faire, le salaire augmente régulièrement.

Cette machine infernale produit le fameux « glissement vieillesse-technicité » qui dérape d’ailleurs de 300 millions cette année. Encore n’évoque-t-on pas ici les fréquentes augmentations de prime qui coûtent très cher aux contribuables et qui se déroulent dans une opacité totale.

Le mythe de la CSG mal compensée

Autre mythe extrêmement agaçant: la question de la CSG dont l’augmentation ne serait pas compensée. Là encore, les fonctionnaires ne manquent pas une occasion de comptabiliser toute opération qui leur serait défavorable, mais ils oublient soigneusement de rappeler les avantages extravagants dont ils bénéficient.

Dans le domaine de la protection sociale, tout fonctionnaire n’a pas assez des dix doigts de ses mains pour compter les cas de promotion en fin de carrière pour donner un coup de pouce à la retraite d’un collègue. Comme la pension est calculée sur les six derniers mois de carrière (alors que, dans le privé, elle est calculée sur les vingt-cinq meilleures années), la tradition veut qu’on récompense les partants par une promotion de dernière minute que le contribuable finance.

Car les retraites des fonctionnaires ont besoin de 38 milliards annuels d’impôts pour trouver leur équilibre. Dans ces 38 milliards, il serait intéressant de savoir quelle part est directement due aux promotions de complaisance. On se rendrait donc que, chaque année, les fonctionnaires empochent bien plus que la compensation de la CSG et on ne les voit jamais descendre dans la rue pour protester contre ce privilège.

Le mythe des suppressions d’emplois

Les fonctionnaires s’inquiètent aussi des suppressions d’emplois dont ils seraient victimes. Mais… ils oublient de parler des légions d’emplois aidés dont ils bénéficient depuis des années, et dont ils ont un besoin crucial pour agir au jour le jour. Il serait intéressant d’interroger l’un de ces emplois aidés sur ses conditions de travail: le dernier qui m’en a parlé m’a expliqué qu’il faisait toutes les tâches que les fonctionnaires titulaires n’avaient pas envie d’assumer. C’est beau la solidarité…

Les fonctionnaires oublient aussi de préciser qu’en loi de finances 2018 seront créés 16.000 emplois nouveaux pour régulariser la situation de ces petites mains, souvent traitées comme des subalternes. On est très loin des suppressions d’emplois connues sous Sarkozy.

Les fonctionnaires au service de la nation, ou la nation au service des fonctionnaires?

Reste une question majeure: les fonctionnaires sont-ils au service de la Nation, ou est-ce l’inverse? Il revient au gouvernement de rappeler clairement et fermement la réponse à cette question.

Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "

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