L’indispensable cadeau à faire aux riches : baisser les droits de succession

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Par Charles Sannat Modifié le 21 décembre 2018 à 10h08
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12%En France, on transmet à la génération suivante seulement 12% des entreprises familiales. En Allemagne, 65% !

Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

Oui, je sais, dans le contexte actuel, où l’on veut en plus remettre l’ISF, l’Impôt de solidarité sur la fortune, alors que nous sommes dans le pays le plus taxé du monde, ouvrir le dossier de l’héritage c’est explosif.

Annoncer qu’il faut faire un cadeau aux riches, c’est pour le moins provocant.

Si j’ai choisi ce titre, ce n’est pas par hasard, mais bien pour faire réagir aux « tripes » les lecteurs parmi vous, sensibles à certains « mantras » et certaines expressions clefs, pour également mieux les dénoncer et les pointer du doigt, je parle des mantras, et les disséquer.

L’enfer est toujours pavé de bonnes intentions, et l’égalité qui termine en égalitarisme s’achève généralement par une égalité de tous dans la misère.

La trop lourde taxation des entrepreneurs

Quand un entrepreneur a été suffisamment fou pour ouvrir son entreprise et verser 80 % de son chiffre sous forme de taxes diverses et variées, il doit aussi s’acquitter de son impôt sur le revenu qui peut monter à plus de 40 % de ce qu’il reste.

Puis, quand il a réussi à mettre de côté des sous, il va payer 30 % de « flat taxe » sur ses revenus de placements.

Puis, quand malgré tout cela, il finit par dépasser 1,4 million d’euros, il faut payer l’IFI, l’Impôt sur la fortune immobilière.

Puis… comme ce n’est pas assez, parce qu’un riche c’est fait pour être tondu jusqu’à ce qu’il soit aussi pauvre que tous les autres manants et gueux de ce pays, alors il sera taxé lors de sa mort jusqu’à 60 % de toute sa fortune, malgré tous ces obstacles, accumulée à force d’opiniâtreté si c’est en ligne indirecte. 45 % en ligne directe.

Je ne vous demande pas de pleurer sur les salops de riches.

Je ne vous demande même pas de croire au ruissellement. Pas plus que je ne veux vous convaincre qu’il n’y a rien à voir entre un « petit » riche, qui est un petit bourgeois ayant 1 ou 2 millions d’euros de patrimoine, et un milliardaire.

Je voudrais juste vous dire qu’un pays sans riches c’est un pays pauvre. Un pays de pauvres.

Je veux juste vous dire qu’un pays où l’on empêche une forme d’accumulation de capital est un pays qui se meurt par définition, parce qu’il n’est même pas capable de garder ses entreprises, et évidemment de développer ses PME et ses TPE qui créent, elles, 90 % des postes et des boulots.

Il est là le ruissellement.

Dans la création d’emplois induite par ces « salops » de riches et d’entrepreneurs.

Ce n’est pas le milliardaire qui ruisselle. Ce sont les milliers de « petits » riches qui sont massacrés dans notre pays. Les haïr n’améliorera le sort de personne et il faut sortir des logiques d’opposition des uns aux autres pour retrouver le sens d’une communauté nationale.

Le taux de transmissions familiales reste très faible dans l'Hexagone

En France, on transmet à la génération suivante que 12 % des entreprises familiales. En Allemagne, 65 % !

Alors, je vous pose la question.

Où est-ce que l’on trouve le plus de PME en Europe ? Oui, c’est ça, en Allemagne… Et vous savez quoi ? Il y a des raisons aux différences entre l’Allemagne et la France.

Oui, il faut sortir de l’euro, car le carcan imposé par la monnaie unique n’est pas compatible avec l’économie française, mais, mais, énorme MAIS, ce n’est pas notre seul problème. Nous en avons plein d’autres. Si je suis favorable à la fin de l’euro, ce ne sera en aucun cas une baguette magique qui effacera tout.

« Le taux de transmissions familiales reste très faible dans l’Hexagone malgré le pacte Dutreil, l’environnement fiscal est beaucoup moins favorable à la reprise familiale en France que dans la plupart des autres pays européens. La complexité des règles de succession joue aussi un rôle important.

Selon une étude récente réalisée par l’Edhec Family Business Center*, seulement 12 % des entreprises familiales françaises seraient aujourd’hui à la génération suivante, contre plus de 50 % dans la plupart des pays d’Europe. La transmission familiale atteint même 65 % en Allemagne et 76 % en Italie... »

Le gouvernement veut revoir les successions…

Eh bien le gouvernement a raison.

Il a raison parce que nous sommes en train de nous tirer une balle dans le pied depuis 40 ans, et quand un pays ne développe pas ses PME pendant 40 ans, eh bien au bout de 4 décennies, vous avez une différence considérable du nombre de PME entre la France et l’Allemagne. Ce n’est pas le seul facteur, mais c’en est un qui est loin d’être négligeable.

Alors oui, faciliter les successions est indispensable.

Mais c’est politiquement très délicat pour le gouvernement actuel, et notamment la France Insoumise sera en embuscade sur ce type de mesure.

Orienter la réforme vers la transmission d’entreprises

Alors si l’on peut faciliter les donations, c’est évidemment positif, car cela fait tourner l’argent. N’oublions pas que pour qu’une économie soit en croissance, il faut que la monnaie circule. On appelle même cela la « vitesse de circulation de la monnaie ». Plus vos sous tournent de mains en mains, plus vous avez de transactions économiques et donc de croissance (avec la même quantité de billets).

La bonne mesure, qui serait sans doute la plus acceptable socialement, serait d’expliquer qu’il faut permettre aux entreprises d’être cédées en famille pour assurer la stabilité de notre tissu industriel et de notre maillage d’emploi.

Il faut expliquer que l’on ne peut pas vouloir lutter contre le chômage et voir fermer des milliers d’entreprises ou démanteler des PME parce qu’en France, seulement 12 % des entreprises vont aux enfants alors que ce taux est de 65 % en Allemagne et même de 88 % en Suède.

Il est également évident que les entreprises familiales ont un comportement très différent des multinationales. Dans mon petit coin de Normandie, une entreprise fait vivre des familles. Des vrais gens. Il y a une grande fierté généralement aussi bien du patron que des salariés. À Paris, dans les grands groupes, ils nomment des responsables en charge de « la responsabilité sociale de l’entreprise », des spécialistes des risques « psychosociaux » et même, comble de la connerie insondable de nos bobos hors-sol, des « CHO »… Chief Hapyness Officer… le cadre en charge du bonheur. On vous pourrit la vie, le management, par la peur et des objectifs antagonistes et impossibles à atteindre, génère des tensions telles que les gens sont malheureux. On ne va pas régler les objectifs. Non. On va mettre un responsable du bonheur qui, après consultation, obtiendra l’installation d’un baby-foot dans la salle de pause. Remarquable.

Sauver les PME et les TPE de notre pays c'est aussi s'épargner ces âneries

Chaque jour, les petits patrons de France se lèvent en se payant souvent peu (ou pas du tout) pour payer leurs gars.

Chaque jour, ils font de la « responsabilité sociale » sans le savoir.

Chaque jour, parce qu’ils créent et donnent du boulot, ils donnent du bonheur parce qu’ils permettent à des hommes et des femmes d’avoir leur dignité par le travail.

Alors oui, cette France-là, loin des milliardaires de la finance internationale et du totalitarisme marchand mondialisé le plus abject, mérite de pouvoir transmettre le fruit de son travail dans de bonnes conditions, parce que si certains ne veulent admettre que ce travail a été surtaxé, qu’ils admettent au moins qu’il est souhaitable que les boulots des sans-dents que nous sommes soient préservés !

Il faut réformer les successions, et dans ce cadre, commencer uniquement par la sauvegarde de l’emploi à travers des allègements massifs et même, disons-le, des exonérations totales lorsqu’il s’agit de céder du productif qui profite à l’ensemble de notre collectivité.

Taxer un million d’euros d’actions de grands groupes détenues sur un compte titre ou un million d’euro de valeur de cession de sa PME qui emploie 30 personnes, ce n’est évidemment pas du tout la même chose.

C’est ce qu’il faut expliquer inlassablement pour parler aux intelligences et sans posture moraliste démagogique.

Les pauvres ne seront pas moins pauvres une fois que nous aurons ruiné tous nos riches.

Il faut également que le gouvernement se garde de toute mesure excessive. Mieux vaut y aller progressivement et par itération. Traitons déjà le problème de la cession des entreprises pour permettre la permanence des emplois et ainsi diminuer la destruction de postes. Ce serait déjà un très bon début.

Faciliter la transmission d’entreprises, c’est fondamentalement très gilets jaunes !!

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !

Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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