Espérance de vie en baisse, la faute à qui ?

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Par Patrick Crasnier Publié le 22 janvier 2016 à 5h00
Insee Esperance Vie France Francais
0,3L'Insee a révélé une baisse de l'espérance de vie de 0,3 années pour les hommes.

Depuis l’après guerre, la France enregistre pour la première fois une baisse de l’espérance de vie. L’INSEE dans son rapport sur l’année 2015 note une perte d’espérance de vie de 0,3 année pour les hommes et 0,4 année pour les femmes.

Bien que ce rapport note une légère baisse de la natalité, c’est l’augmentation importante du niveau de mortalité qui est en premier mis en avant. Tous les arguments nécessaire a « rassurer le bon peuple » ont été développés depuis hier par les politiques et les médias sans jamais pointer que notre politique de santé pourrait aussi être analysée.

Marisol Touraine depuis l’élection de François Hollande n’a de cesse de démolir ce qui était existant dans notre système de soins. Les médecins et les professions médicales n’ont eu de cesse depuis trois ans d’alerter les Français sur les conséquences catastrophiques de cette « pseudo » politique de santé. Depuis Alain Juppé en 1995 les économies de santé sont au centre de la préoccupation des ministres de la santé, cherchant par tous les moyens à faire des économies, c’est une réussite les résultats sont bien là.

Baisser ce coût de la santé est inéluctablement lié à une baisse de la qualité des soins, à une baisse des moyens mis en œuvre. C’est aussi un écœurement manifeste des médecins et professions de santé qui n’en peuvent plus d’être la variable d’ajustement de ces économies. Depuis quatre ans ces mesures n’ont fait qu’accroitre les difficultés pour en arriver au vote de la loi santé insupportable. Déjà Bruno Leroux, pressenti pour être le futur ministre de la santé, avait mis en place les réseaux de soins « low coast. » On peut être certain qu’avec les mutuelles, ses amies, il va continuer à enfoncer ce clou.

Depuis quatre ans ce sont donc des dizaines de petites mesures qui sont devenues les causes d’une dégradation des systèmes de santé dans notre pays. Prenons par exemple le premier argument mis en avant depuis hier « la mortalité due a une épidémie de grippe importante début 2015 » Il faut savoir que depuis début 2014 le réseau GROG, réseau de surveillance des grippes, efficace depuis 30 ans a été fermé. Ce réseau constitué de médecins de terrain était très efficace en particulier pour permettre d’anticiper le vaccin correspondant au virus en perpétuelle mutation. Les économies ont été la cause de la fermeture de ce GROG, le personnel en a été licencié, aucune surveillance n’a été effectuée à l’automne 2014 et l’hiver 2015. Seul le réseau sentinelle, existant déjà en parallèle des GROG est resté, continuant son travail efficace mais insuffisant à lui seul. Cette économie est elle véritablement utile sachant que l’épidémie du début 2015, non prévu et non surveillée, a engendré une forte mortalité chez les plus de 65 ans.

Le second argument avancé pour « expliquer » cette baisse de l’espérance de vie serait la canicule de cet été. Effectivement il a fait chaud en 2015 mais pas anormalement. De plus des alertes de toutes les couleurs sont mises en place (depuis 2003) pour prévenir les Français que l’été il fait chaud, comme on explique que l’hiver il fait froid. Malgré tous ces déploiements de moyens souvent inutiles on nous dit que la mortalité due à la chaleur a été très importante. Où était notre ministre de la santé pendant que les Français mourraient de chaleur ?

Troisième et dernier argument qui sent véritablement l’excuse, la mortalité aurait été très forte en octobre 2015 du fait « de la vague de froid » Comment les croire, alors que notre pays a battu des records de douceur et même de chaleur en automne, pas un jour de gel même en début 2016. Nous affirmer qu’une mortalité due à une vague de froid en octobre alors que les Français étaient sur les plages durant les vacances de Toussaint et se baignaient pour certains ressemble de plus en plus a un mensonge.

Par contre la vérité des faits est têtue, le nombre de médecins dévissant leur plaque par écœurement est en forte hausse. La caisse de retraite des médecins a enregistré en fin 2015 une demande accrue de prises de retraite par des médecins, qui avaient jusque là retardé leur départ par souci de « rester au service de leurs patients ». Le taux de « burn out » chez les soignants Français est un des plus élevés d’Europe, médecins mais aussi infirmières et autres professions médicales. Qui s’en préoccupe ? Qui cherche à mettre en place des moyens pour éviter ces catastrophes ? Personne, au contraire on enfonce le clou des tracasseries, des affronts, du manque de reconnaissance.

Ne nous étonnons pas dans ces conditions que notre système de soins se dégrade et ce n’est que le début. Marisol Touraine a vu depuis quatre ans le nombre de déserts médicaux augmenter inéluctablement, le nombre de jeunes refuser de s’installer en cabinet libéral augmenter en continu. Elle a vu aussi le nombre de médecins portant le poids de la responsabilité de la santé de Français retirer leur plaque même dans des lieux où il n’y a plus personne.

Ce ne sont pas les graves mesures de santé publiques annoncées par la loi santé et ce qui gravite autour qui peut donner espoir, les mutuelles privées feront la loi des économies à la place des politiques, et ce sera encore pire. Les réseaux de soins seront mis en place avec des parcours de soins obligatoires et compliqués. Les attentes seront de plus en plus longues dans les réseaux de la médecine d’état organisés pour cela. Le nombre de médecins en constante diminution, ne permettra plus de faire face efficacement a des épidémies importantes dans l’avenir.

Nous pouvons donc craindre que l’analyse de l’INSEE contrairement à ce qui nous est expliqué ne soit que la première d’une longue série.

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Patrick Crasnier est diplômé en sciences humaines 3eme cycle en psychopathologie, après de longues années passées en cabinet libéral comme psychanalyste, blessé lors d’un attentat terroriste cesse cette activité en 1995. Continue comme photojournaliste, journaliste radiophonique (activités menées conjointement avec celle de psychanalyste depuis 1983) puis comme journaliste rédacteur au journal Toulousain et à l’écho des entreprises. Actuellement photojournaliste correspondant pour l’agence de presse panoramic et rédacteur dans plusieurs revues.

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