« Black Monday » : krach boursier, pétrole et covid-19

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 10 mars 2020 à 11h13
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8,39%Le CAC40 a clos la journée du 9 mars 2020 en baisse de 8,39%.

S’il y avait une pilule qui permettait d’oublier une journée entière, elle ferait fureur du côté des traders : le lundi 9 mars 2020 a été une journée catastrophique. La Bourse a connu un krach d’une ampleur rarement connue… au point de faire craindre une nouvelle crise boursière. Mais est-ce la faute du Covid-19 ou de la guerre du pétrole ?

Deux éléments combinés et la Bourse s’effondre

Le Black Monday du 9 mars 2020 est une combinaison de facteurs interconnectés : le premier, la crise du coronavirus, est probablement le déclencheur… mais c’est la guerre du pétrole qui s’annonce entre l’Arabie saoudite, les Etats-Unis et la Russie qui en a été le catalyseur. Reprenons.

Et survint le coronavirus…

Depuis janvier 2020, le monde fait face à une épidémie majeure : le coronavirus souche Covid-19. Etant apparu en Chine, il a ralenti et même temporairement stoppé l’activité du pays sur lequel comptent les géants du monde entier pour leur production. Or, qui dit arrêt de l’activité dit baisse de la demande de pétrole… au point que la valeur du baril avait perdu, entre début janvier et fin février 2020, près de 25%.

Désormais, ce sont les pays européens qui sont touchés de plein fouet par le virus, avec l’Italie qui est désormais totalement en quarantaine d’après les annonces du gouvernement Conte du 9 mars 2020 dans la soirée. 60 millions de personnes dont les déplacements sont limités, décision de la dernière chance pour endiguer une pandémie qui a contaminé 9.200 personnes dans le pays, faisant de la péninsule italienne le deuxième foyer derrière la Chine.

Ce seront ensuite la France, l’Allemagne et l’Espagne, qui comptent plus de 1.000 cas chacun, qui pourraient prendre des mesures similaires, tandis que l’épidémie semble se propager rapidement aux Etats-Unis. Comme la Chine, l’Europe pourrait se retrouver à l’arrêt.

… et la Russie se fâche avec l’Opep

Mais alors que l’OMS a déclaré, le 9 mars 2020, que la Chine était « en train de maîtriser l’épidémie » et que l’activité, bien qu’au ralenti, reprenne dans le pays, voilà que ce sont la Russie et l’Opep qui se fâchent. Vendredi 6 mars 2020, les discussions sur la réduction du pétrole ont tout simplement échoué.
Réunis à Vienne, où se situe le siège de l’Opep, les pays producteurs de pétrole membres de l’organisation ont demandé à la Russie de participer à une réduction de la production journalière de pétrole de près de 1,5 million de barils. La Russie leur a répondu par la négative ce qui a fait voler en éclats l’alliance. Fâchée, l’Arabie saoudite a décidé qu’elle allait brader son brut et qu’elle allait augmenter sa production dès que les accords pris précédemment arrivaient à terme, soit en avril 2020.

En Bourse, les marchés ont de suite compris ce qui allait se passer : le pétrole allait inonder les places boursières, l’offre serait fortement au-dessus de la demande et… le prix du brut a chuté. Le prix du baril a été divisé par deux, au 9 mars 2020, par rapport au début du mois de janvier. Une chute de prix qui n’avait pas été connue depuis… la Guerre du Golfe de 1991.

Mais pourquoi les places boursières ont dévissé le 9 mars 2020 ?

La guerre entre la Russie et l’Opep, qui cible indirectement le pétrole de schiste américain, a créé un vent de panique sur le marché déjà fébrile. Il suffisait de la petite étincelle pour que les traders commencent à vendre des actions à tout va.

Les marchés s’inquiètent, en fait, de la situation à moyen terme de l’épidémie de coronavirus sur l’activité mondiale. L’Italie est à l’arrêt, la Chine s’est arrêtée… et ils craignent que la France, l’Allemagne, l’Europe et même les Etats-Unis ne risquent de faire de même. Plus personne ne produit, plus personne n’achète, plus personne ne vend… l’économie à l’arrêt.

Même si cette situation ne devait durer que quelques semaines, ce serait une catastrophe économie de niveau mondial.

Correction ou krach ?

Le « Black Monday » du 9 mars 2020 s’est clos sur celle qui est désormais considérée comme la pire performance boursière depuis 2008… soit au moment de la crise des subprimes. Le CAC40 a chuté de 8,39%, le Nasdaq et le S&P500 de plus de 7%... des pertes colossales qui n’ont épargné personne.

Que les pétroliers, comme BP, par exemple, en chute libre de 19,48% et Total (-16,61%), voient leur capitalisation s’effondrer sur fonds de guerre du pétrole, ça paraît logique. Mais voilà, Alphabet (maison-mère de Google) a perdu 6,17%, Apple 7,91%, Amazon 5,29%... alors que ce sont des entreprises de la high-tech que le pétrole ne devrait, en théorie, pas inquiéter. Même le luxe est touché, LVMH ayant cédé 6,20%, comme le reste du secteur de la consommation avec Carrefour (-6,47%). Les banques aussi sont touchées : Crédit Agricole chute de 16,86%, BNP Paribas de 12,28%...

Mais est-ce que ça va durer ? C’est toute la question… si le CAC40 a, certes, effacé ses gains de 2019 en une session, le marché était à des niveaux très hauts, peut-être trop hauts. Il pourrait s’agir simplement d’une correction qui, associée avec une chute liée à l’épidémie de coronavirus, peut donner l’impression d’être un krach.

Car il y a une différence majeure entre le coronavirus et la crise des subprimes : le premier est théoriquement passager, la seconde était structurelle. D’un côté on a un virus d’un type plutôt saisonnier, de l’autre un montage de prêts bancaires immobiliers douteux et instables. A voir si la panique laissera place à la raison.

Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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