La crise du Covid ravive la guerre des agents de joueurs

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Par Rédaction Modifié le 16 octobre 2020 à 18h50
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Et si, finalement, la récréation était terminée ? Le temps des salaires extravagants pour les joueurs, des transferts renversants et des droits télés exorbitants. La crise du Covid touche durement les clubs et tous les championnats ; elle pourrait marquer un tournant dans l’évolution du foot professionnel et l’inflation de ses budgets.

Début octobre, Jaume Roures, patron de Mediapro jetait un pavé dans la mare en annonçant vouloir renégocier les droits de diffusion du championnat français. Il estimait alors que l’accord avait été « établi dans des conditions qui n’avaient rien à voir avec la situation actuelle. » Le groupe audiovisuel qu’il a créé en 1994, actif dans toute l’Europe ainsi qu’au Qatar, investi dans le cinéma ou en tant que propriétaire de la chaine Gol Television, qui diffuse la Liga, malgré son envergure, s’acquittera avec retard du versement de l’été 2020, avant de refuser de payer l’échéance de l’automne. Acquis pour près de 800 millions d’euros, les droits de diffusion du foot français ne vaudraient plus autant.

La Ligue de Football Professionnel, devant le fait accompli, refuse le principe d’un report de paiement : elle est elle-même tenue de reverser aux clubs leur part du gâteau. Pas de paiement de la part du diffuseur et voilà l’ensemble du football pro français qui s’inquiète pour son avenir.

Confrontée à une crise sans précédent, la Fédération Française, dos au mur, pourrait être tentée de mettre de l’ordre dans les pratiques les plus discutables, et les plus inflationnistes, notamment sur les règles de transfert. Très souvent au coeur des polémiques, le statut d’agent de joueur concentre les critiques. Selon Bernard Collignon, agent licencié FFF/FIFA et consultant, cité par FootMercato, « C’est devenu la foire ! La FIFA a décidé en avril 2015 de ne plus se charger de l'examen d'agents de joueur comme c'était le cas, et a permis à chaque fédération de faire comme bon lui semble...

En France, fort heureusement, nous avons gardé le système de licence donc l'examen, mais hors de l'Hexagone, les fédérations ont mis en place un système d'intermédiaires.

Les conséquences ont été telles qu'on a vu la profession se dégrader de façon exponentielle, entre les vrais agents détenteurs d'une licence qui travaillent avec une certaine déontologie et des intermédiaires qui, évidemment, profitent du fait de ne pas avoir de licence donc de ne pas être enregistrés et reconnus pour pratiquer de façon illégale l'activité d'agents de joueur. Et les joueurs sont malheureusement floués par ces gens qui ne sauraient les conseiller et profitent de leur naïveté… Les instances devraient être beaucoup plus strictes quant aux conditions requises pour exercer le métier d'agent de joueurs. »

Parmi les affaires qui peuvent illustrer ces dérives des agents peu scrupuleux, le cas de Moussa Sissoko est emblématique. Après une jeunesse turbulente à Beauvais qui lui a valu des soucis avec la police et la justice il s’est lancé au début des années 2000 dans le milieu du football. Il avait été soupçonné d’avoir exercé illégalement la profession d’agent en 2016 lors du transfert d’Ousmane Dembélé à Dortmund. Classée sans suite par le parquet de Rennes, l’enquête n’avait pas permis de déterminer le rôle exact de l’agent supposé, provoquant la colère de la Fédération de foot française. « À notre niveau, nous ne pouvons rien faire contre ces gens qui n'ont pas de licence. On les dénonce auprès de la justice afin d'essayer de clarifier ce milieu. On avait énormément de documents et des preuves que ce monsieur oeuvre sur le territoire français. », avait déclaré Jean Lapeyre, directeur de la commission juridique de la fédération, à l’issue de l’audience.

Mais la donne pourrait changer prochainement avec le souhait de la Fédération de durcir les règles. D’ores et déjà plusieurs dirigeants de clubs refusent de travailler directement avec des intermédiaires comme Moussa Sissoko. Sans compter quelques puissants agents de joueurs qui lui vouent une rancune tenace.

Représentant de cette génération d’agents à la réputation sulfureuse, Moussa Sissoko, qui s’occupe notamment du joueur rennais Eduardo Camavinga, pourrait, parmi d’autres, pâtir de la cure de rigueur que projette la Fédération. Une cure qui serait probablement bénéfique pour l’avenir des joueurs en les éloignant de telles polémiques afin qu’ils se concentrent uniquement sur leur carrière.

Dans le sillage de la FIFA, qui a limité les commissions des agents en 2019 afin de lutter contre « un marché dicté par la spéculation », la FFF, pressée par la crise qu’elle traverse, souhaite resserrer les boulons dans le milieu des agents. Reste à déterminer ce que gagnerons, ou perdrons, les clubs, le championnat et les joueurs dans ce projet de moralisation.

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