La folie furieuse des banquiers centraux

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Par Michael Covel Publié le 21 septembre 2016 à 5h00
Banques Centrales Politique Economie
-9 %Si la Fed avait appliqué sa formule lors de la dernière crise, les taux auraient chuté à -9 %.

Les banquiers centraux n’apprennent rien de leurs échecs répétés au Japon et en l’Europe. La Fed rêve de mettre les taux sous pilote automatique grâce à une formule magique. Préparez-vous au pire : si on l’appliquait au cours d’une crise similaire à celle de 2008, cette formule conduit à instaurer des taux négatifs de 9% !

La Fed est-elle à court de munitions ? C’est la peur légitime lorsqu’éclatera la prochaine grande crise. Au fond, la réponse est un oui retentissant. Il n’y a pas de balle magique dans le revolver à six-coups de la Fed pour remédier à son incompétence lorsqu’aura lieu le prochain krach. Le problème est que Yellen et compagnie ne croient pas en cette analyse. Ni d’ailleurs les mandarins incompétents à la tête des autres grandes banques centrales. Ils sont tous trop “malins.” Car ils sont déjà en train de planifier la prochaine grande expérience monétaire en vue du prochain sauvetage. Ce qui pourrait bien faire voler en éclats l’économie mondiale.

Une diabolique persévérance

Pour comprendre à quel point les banques centrales sont devenues délirantes et irresponsables, voyez ce qu’a lancé la Banque du Japon (BoJ)… Après deux décennies de croissance molle, la BoJ a commencé son orgie de manipulation monétaire en introduisant la politique de taux d’intérêts nuls (ZIRP) en 1999 — prétendument pour lutter contre la déflation et encourager la croissance économique. Cela n’a pas marché. Donc, tout en gardant la ZIRP en place, elle a continué à jouer les docteurs Mabuse avec l’économie japonaise…

Comment ? La BOJ “inventa” les programmes de Quantitative Easing (QE) (ou “assouplissement quantitatif”) en 2001, via des achats d’obligations d’Etat, des titres adossés à des actifs et des effets de commerce. Ce pitoyable effort prit fin en mars 2006, alors que la déflation et une croissance stagnante restaient un cauchemar pour les investisseurs et les épargnants moyens japonais.

Les gens normaux tirent les leçons de leurs échecs, mais les banquiers centraux sont d’une autre espèce, arrogante, incestueuse. Ils ont persévéré coûte que coûte dans leur idée, certains de leur rectitude, face à leur propre incompétence. Et c’est ainsi qu’un nouveau programme d’assouplissement quantitatif de la BoJ fut mis en oeuvre en octobre 2010, qui se transforma en un QE encore plus agressif en avril 2013. Elle n’y est pas allée de main morte. Naturellement, encore plus d’échecs entraînèrent encore plus d’expérimentations. Et la BoJ y alla à fond… En avril 2014, elle lança le plus grand programme de QE de l’histoire, avec l’objectif d’acheter pour près de 730 milliards de dollars d’obligations d’Etat chaque année.

Evolution de la croissance japonaise depuis 1990

Cette tentative connut elle aussi un échec retentissant. Tout comme l’adoption des taux d’intérêt négatifs en janvier 2016 — peut-être son mouvement le plus pervers de tous. Résultat ? L’inflation dans l’économie japonaise n’existe toujours pas. En fait, elle a chuté d’environ 2,5% fin 2014 à –0,19% sur l’année passée. Le PIB japonais au deuxième trimestre 2016 n’a augmenté que de 0,7%. Pendant tout ce temps, la BoJ a acheté pour 70 milliards de dollars d’obligations chaque mois, monétisant essentiellement tout le déficit budgétaire du Japon. Elle possède à présent 33% de la dette publique du pays, qui s’élève à 9 300 milliards de dollars. Aujourd’hui, puisqu’elle n’a plus d’obligations d’Etat à acheter, la BoJ en est venue à acquérir des ETF (Exchange Traded Funds, des fonds actions négociés en continu en Bourse) et autres titres dans une tentative vaine de créer un électrochoc sur l’économie japonaise.

Selon Bloomberg : “Alors que la BoJ fait déjà partie des cinq plus gros actionnaires de 81 sociétés du Nikkei 225 Stock Average, la banque centrale japonaise est bien partie pour devenir l’actionnaire numéro 1 de 55 de ces entreprises d’ici la fin de l’année prochaine, d’après les estimations de Bloomberg sur base du portefeuille d’ETF de la BoJ.”

Où s’arrêtera cette folie ? Une fois que la BoJ aura acheté toutes les actions et toutes les obligations au Japon ? Cela semble totalement dément. Mais c’est bel et bien la trajectoire prise. Si vous pensez que la Fed ne sera jamais entraînée dans ce type de folie monétaire, vous feriez bien d’ouvrir les yeux et de cesser de croire au Père Noël.

L’effrayante formule magique de Janet Yellen

Depuis le début de la crise financière de 2008-2009, la Fed a marché dans les pas de la BoJ ; elle a mis en oeuvre ses propres politiques de taux d’intérêt nuls et d’assouplissement quantitatif. De nombreux membres de la Fed, y compris la Présidente Janet Yellen, ont reconnu que les taux d’intérêt négatifs sont sur la table, prêts à être utilisés. Mais ce n’est là que le début du “jeu avec votre argent”… Il existe une formule mathématique peu connue, cachée dans une note de bas de page du récent discours de Yellen à Jackson Hole.

R(t) = R* + p(t) + 0.5[p(t)-p*]-2.0[U(t)-U*

Beaucoup pensent que la Fed utilisera cette “formule magique” pour déterminer de manière automatique les futurs taux d’intérêt. Voilà pourquoi cela devrait vous faire peur… Si la Fed avait appliqué cette formule lors de la dernière crise, elle aurait dû faire chuter les taux à -9%. Oui, vous avez bien lu, -9% ! Il ne faut pas oublier que les taux négatifs de seulement -0,4% en Europe mettent à mal les grandes banques et obligent les Suisses et les Allemands à se ruer sur les coffres-forts pour y mettre leur cash en sécurité. Imaginez alors ce que des taux à –9% feraient. C’est le niveau de psychopathie que nous devrions affronter.

Nous avons des banquiers centraux sans contrainte et non élus qui réécrivent l’économie, la finance et la liberté humaine— sans aucune surveillance. Cette folie d’achats d’actifs peut continuer éternellement. Ils peuvent baisser les taux encore plus qu’on ne pourrait jamais l’imaginer. Personne ne les arrêtera. Le véritable problème n’est pas que les banquiers centraux soient à court de munitions. Le problème est que leur patient est attaché à la table d’opération, sans anesthésie, subit des techniques chirurgicales moyenâgeuses — et que ses chances de s’en sortir vivant sont très faibles. Ne sous-estimez jamais à quel point les choses deviendront folles. Pourquoi est-ce que je suis inquiet à propos de telles projections ? Il suffit de suivre la tendance, n’est-ce pas ? D’ignorer les fondamentaux et d’acheter les gagnants ? Mais je m’inquiète sur la réalisation effective de ce bon plan. Beaucoup de gens honnêtes et travailleurs seront carbonisés… et ne s’en relèveront jamais.

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Michael Covel, réalisateur, entrepreneur et auteur de la série de best seller dans le domaine de la finance et du trading "trend following"

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