Le discours d’un Président : à quoi le marché doit-il être attentif ?

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Par Hervé Goulletquer Publié le 5 février 2019 à 11h32
Donald Trump Grandeur Etats Unis
2,5%La croissance américaine moyenne annuelle a été supérieure à 2,5% au cours des deux premières années de son mandat

Les points forts reconnus du Président Trump sont la négociation des accords commerciaux et les décisions de politique économique ; ils sont sans doute intégrés aux anticipations des entreprises ; à lui de les cultiver.

Pourquoi faut-il s’intéresser sur le marché au discours sur l’état de l’Union que le Président Trump doit prononcer cet après-midi devant le Congrès américain (15h00, heure de Paris) ? A deux titres selon moi.

D’abord, les entreprises américaines, en train de publier leurs résultats financiers du quatrième trimestre 2018, envoient plutôt un message d’amélioration dans le courant de l’année nouvelle. Et ceci, au moins pour ce qui est de la croissance des profits, à partir d’un point bas atteint durant le premier trimestre.

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Quelle histoire macroéconomique peut-il y avoir derrière cette synthèse des forward guidance (guidage prévisionnel) des entreprises du S&P 500 ? On a envie de répondre que la toile de fond correspond à une croissance mondiale qui progressivement accélère en cours d’année (Chine, autres pays émergents et Europe), au moins en partie du fait d’une réduction des tensions commerciales sino-américaines. Comment ne pas voir que l’enclenchement de ce cheminement porteur est dans une mesure importante à l’initiative du Président Trump ?

Ensuite, il y a le profil étonnant de la cote de popularité du locataire actuel de la Maison Blanche. Elle est à la fois assez stable et à un assez bas niveau. Au moins si on la compare à celle de ses prédécesseurs récents.

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Si on entre un peu plus dans le détail de l’opinion des Américains sur leur Président, les points forts qu’on lui prête ne sont pas très nombreux. Ceux-ci lui font majoritairement confiance (qui plus est avec une marge plutôt faible) sur deux sujets : négocier dans des termes favorables pour les Etats-Unis des accords commerciaux et prendre les bonnes décisions en matière de politique économique. Sur tous les autres sujets couverts (des relations avec le Congrès à l’immigration et d’une animation efficace du pouvoir exécutif à la gestion des crises internationales), Donald Trump n’a pas la moyenne !

Quelle leçon le Président américain doit-il tirer ? Avant de tenter de s’améliorer sur ses points faibles, commencer par capitaliser sur ses points forts. C’est ainsi qu’il maintiendra l’unité des Républicains et qu’il pourra caresser l’espoir d’élargir une base électorale, certes fidèle, mais trop étroite pour gagner aisément l’élection de 2020. Et le marché, comme tous les observateurs, de retrouver les thèmes de la croissance et des relations commerciales sino-américaines.

Bien sûr, il y a quelque chose d’assez convenu dans le contenu d’un discours sur l’état de l’Union. Même Donald Trump n’y échappe pas. Il devrait insister sur la bonne santé de l’économie : une croissance moyenne annuelle supérieure à 2,5% au cours des deux premières années de son mandat, 1,3 million d’emplois créés, un taux de chômage sous la barre des 4% et pourtant une inflation sous contrôle. Au nombre des « projets pour demain », une « place de choix » serait réservée aux relations commerciales et aux moyens d’améliorer la vie des Américains, avec un plan d’infrastructure et un autre de réduction du coût de la santé. On perçoit bien la trame du message économique envoyé : l’environnement de croissance est favorable, va le rester et le plus grand nombre va en profiter.

Pourra-t-il être seulement consensuel ? Sans doute pas, tant il a du mal à dépasser la contradiction entre cultiver (galvaniser ?) sa base électorale et s’attirer de nouveaux soutiens. Et il y a alors un prix électoral à payer !

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Hervé Goulletquer est stratégiste de la Direction de la gestion de La Banque Postale Asset Management depuis 2014. Ses champs d’expertises couvrent l’économie mondiale, les marchés de capitaux et l’arbitrage entre classe d’actifs. Il produit une recherche quotidienne et hebdomadaire, et communique sur ces thèmes auprès des investisseurs français et internationaux. Après des débuts chez Framatome, il a effectué toute sa carrière dans le secteur financier. Il était en dernier poste responsable mondial de la recherche marchés du Crédit Agricole CIB, où il gérait et animait un réseau d’une trentaine d’économistes et de stratégistes situés à Londres, Paris, New York, Hong Kong et Tokyo. Il est titulaire d’une maîtrise d’économétrie, d’un DEA de conjoncture et politique économique et diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris.

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