Le sport sur ordonnance doit s’imposer comme une alternative crédible à certains médicaments

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Par Nicolas Sailly Modifié le 8 août 2017 à 17h46
Sport Ordonnance Remplacement Medicaments
40 %40 % des décès dans le monde sont dus à la sédentarité.

Comment endiguer la croissance des ventes de médicaments en France, tout en améliorant la santé des Français ? Comment participer au bien-être des personnes âgées sans pour autant multiplier les ordonnances de médicaments ?

Le sport sur ordonnance, une pratique qui émerge depuis quelques mois, peut répondre à ces problématiques. Mais il est temps que les pouvoirs publics prennent le sujet à bras le corps pour un déploiement généralisé.

Une pratique enfin inscrite dans la loi. Adopté une première fois par les députés français puis rejeté en octobre au Sénat, l'amendement sur la prescription médicale du sport, inscrit dans le cadre de la nouvelle loi sur la santé, a été définitivement adopté le 27 novembre dernier. Mais il ne s’agit, dans un premier temps du moins, que d’un amendement s’adressant aux personnes atteintes d'affections de longue durée (ALD). Pour les autres patients qui souhaiteraient se voir prescrire une ordonnance “sport-santé”, il faudra encore patienter.

Des résultats bénéfiques pour de nombreuses maladies. Pour le patient dans un premier temps, le bénéfice du sport sur ordonnance médicale peut-être double : en pratiquant une activité sportive adaptée à sa condition et à sa pathologie, cela peut améliorer sa forme générale. 40% des décès dans le monde sont dus à la sédentarité ? Il suffirait que chaque personne marche une heure par jour pour réduire ce chiffre. Mais la pratique du sport sur ordonnance peut aussi conduire à limiter de manière réelle la médication, permettant de diminuer les effets secondaires de certains traitements. Ainsi, cette pratique pourrait être indiquée dans le cas de maladies chroniques tels les cancers stabilisés, certains diabètes, les maladies cardiovasculaires ou encore l'obésité. En avril 2015, au moment de défendre ce texte de loi, la députée et ancienne ministre des sports Valérie Fourneyron avait précisé que "les études ont montré que pratiquer une activité physique réduisait de 40% le risque de récidive pour un patient atteint d'un cancer du sein ou du colon".

Mettre en lumière les actions entreprises. En pratique, comment ça se passe ? Le médecin généraliste va rédiger l'ordonnance et oriente le patient vers une équipe d'animateurs sportifs spécialisés qui va établir un "diagnostic de sédentarité" permettant de mettre au point un programme sport-santé. À Strasbourg, une ville particulièrement avancée sur le sujet, une expérimentation de sport-santé sur ordonnance a été lancée en 2012. D’après les résultats observés par le professeur Jehan Lecocq, les patients qui ont pratiqué du vélo, du tai-chi, de l’aqua-gym ou encore de la marche nordique ont perdu, en moyenne, deux kilos en six mois. Surtout, sur huit diabétiques suivis, sept avaient amélioré leur bilan sanguin ! Sur la seule année 2014, ce sont plus de 700 patients qui ont été rencontrés, plus de 170 médecins prescripteurs, 7 associations labellisées et près de 48 000 heures d'activités physiques réalisées par les bénéficiaires.

Investir sur le long terme. L’exemple strasbourgeois est le symbole de l’émergence de cette pratique, mais cela ne correspond encore qu’à un déploiement sporadique. Sans volonté réelle des pouvoirs publics de sponsoriser et d’appuyer le sport sur ordonnance, cette pratique pourrait rester à l’état d’initiative individuelle. Or, pour que cela ait un impact significatif, il faut que cette tendance soit adoptée sur le plan national. Le principal frein à l’adoption généralisée du sport sur ordonnance vient actuellement du fait de l’investissement financier que cela nécessiterait.

Les caisses de l’État sont vides, certes, mais c’est une vision à long terme qu’il faut adopter : miser sur une telle pratique permettrait, avec une économie d’échelle, d’afficher des résultats probants. En effet, le sport sur ordonnance permettrait, en se projetant, de réduire les risques cardio-vasculaires, la sédentarité ou encore le diabète. Autant de problèmes médicaux représentant des traitements lourds à assumer pour les pouvoirs publics : promouvoir globalement le sport sur ordonnance permettrait de réduire les dépenses publiques en matière de santé. Un constat partagé par le docteur Alexandre Feltz : celui-ci estimait en juin 2013, dans le journal de la métropole strasbourgeoise (1), que "le sport sur ordonnance réduit la prescription médicamenteuse, et donc, à terme, la pression sur l’assurance maladie et les finances publiques". Mais pour cela, il faut que les pouvoirs publics interviennent pour faire évoluer les choses.

Élargir le champ d’application du sport sur ordonnance. Certaines complémentaires santé ont déjà annoncé qu’elles adopteraient cette initiative avec une prise en charge des activités liées au sport. En effet, il n'est pas prévu que la Caisse d'assurance maladie prenne directement en charge les activités liées au sport sur ordonnance. Le financement pourrait être multiple, par les collectivités territoriales, les mutuelles ou des associations de patients. Mais il faut aller plus loin et généraliser cette mesure. Les médecins pourraient, par exemple, proposer ce type d’activités à tous les patients pour qui les effets seraient bénéfiques. Pour cela, les médecins pourraient être appuyés dans leur rôle de prescripteur de l'activité physique en étant formés dans ce sens ou s'ils avaient à disposition un référentiel ou un guide de prescription, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Enfin, en poussant les bénéfices du sport pour le bien-être des Français en général, il faudrait élargir le dispositif à toute pratique sportive. Ainsi, il semblerait logique que les clubs songent à développer des séances particulières pour ce type de public, comme l'a fait la Fédération française d'athlétisme par exemple (2). Aux fédérations, dont la volonté d’augmenter le nombre de leurs adhérents est constante, de mettre en place des activités suffisamment attractives pour cette cible particulière.

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Nicolas Sailly, Directeur Digital, Marketing & Communication d’ ASSU 2000

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