Les marchés évaluent les banquiers centraux, pas les bénéfices

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Par Nick Hubble Publié le 14 septembre 2017 à 5h06
Marches Financiers Bourse Actions Baisse
98,9%La dette publique de la France était de 98,9 % du PIB fin mars 2017.

Les marchés étant suspendus aux bilans des banques centrales, les nouvelles financières importent finalement bien peu. Pour longtemps encore ? A quand le krach ?

L’économie, les bénéfices des entreprises, les données démographiques, l’insolvabilité des fonds de retraites… rien, en dehors de l’impression monétaire et du potentiel d’impression monétaire, n’a d’importance.

Les spécialistes des marchés financiers, dont je fais partie, se perdent en débats. Nous surveillons les publications de données, commentons les valorisations et étudions la géopolitique.

Mais les marchés financiers ne sont plus des marchés. Ils sont des indicateurs montrant si l’intervention des gouvernements fonctionne ou pas.

Les marchés sont censés « actualiser » le futur de l’actif financier qu’ils évaluent, quel qu’il soit. C’est là une manière docte de dire qu’ils prédisent une performance et qu’ils fixent un prix sur cette base.

Une hausse des bénéfices des entreprises dans le futur signifie une hausse du cours des actions. Une hausse attendue de l’inflation signifie une baisse du cours des obligations. Une baisse des défauts des prêts hypothécaires signifie une meilleure performance des titres hypothécaires, ce qui en augmente leur valeur.

Mais aujourd’hui, les marchés évaluent les interventions des gouvernements, pas les agissements du marché. Si on parvient à comprendre cela, investir devient une activité totalement différente.

Les mauvaises nouvelles économiques sont de bonnes nouvelles financières

Par exemple, cela explique le fait que « les mauvaises nouvelles sont de bonnes nouvelles. » Une fois que la crise de 2008 s’est apaisée, les mauvaises nouvelles ont fait grimper le marché boursier parce que cela voulait dire plus d’interventions de la part des gouvernements et des banques centrales. Le marché boursier prenait en compte ces interventions plutôt que les mauvaises nouvelles.

Par conséquent, si vous voulez prédire la performance du marché aujourd’hui, peu importent les bénéfices, le taux de chômage, les ratios cours sur bénéfice ou la croissance du PIB. Ce qui compte, c’est l’efficacité de l’intervention du gouvernement dans l’économie. La vanité des banquiers centraux serait-elle entravée dans la pratique ? Cela va-t-il encore entraver les marchés actions longtemps ?

Combien de temps les banquiers centraux peuvent-ils encore tenir le marché ?

Je crois fermement que toutes les politiques des gouvernements sont vouées à l’échec. Étonnamment, elles échouent de façons très diverses. Mais ce n’est toujours qu’une question de temps avant qu’on ne trouve les effets pervers.

Ces derniers sont souvent prévisibles et vous pouvez investir pour tirer profit de la débâcle qui résultera. Peut-être devrait-il y avoir une lettre d’investissement dédiée à la façon de tirer profit des effets pervers des politiques gouvernementales ?

Pour aujourd’hui, je propose une version déformée de la célèbre phrase de John Maynard Keynes qui dit que « les marchés peuvent rester irrationnels plus longtemps que vous ne pouvez rester solvable. »

Nous n’avons plus de marchés aujourd’hui. Nous avons des banquiers centraux et des gouvernements en charge des prix. La question a donc changé : les banquiers centraux et les gouvernements peuvent-ils maintenir les marchés irrationnels plus longtemps que vous ne pouvez rester solvable ?

Autrement dit, combien de temps les banquiers centraux peuvent-ils empêcher le krach ?

Les investisseurs patients ayant du cash de côté peuvent-ils attendre assez longtemps pour qu’arrive enfin l’opportunité d’achat qu’ils espèrent ?

Ceux qui parient sur l’échec des tentatives du gouvernement à relancer le marché peuvent-ils tenir leur pari assez longtemps pour le voir se concrétiser ?

Combien de temps avant le prochain krach ?

Trop longtemps, à mon avis.

Ou, en d’autres termes, il ne faut pas lutter contre la Fed. L’idée est que les banquiers centraux sont trop puissants pour parier contre eux. Ils ne perdront pas le contrôle.

Le seul problème est que la Fed et ses pairs à travers le monde sont aujourd’hui si dominants sur les marchés financiers qu’ils les affectent tous. On ne peut aller nulle part ailleurs – ils sont partout.

L’autre alternative est de parier que les gouvernements peuvent maintenir les marchés à flot et d’investir votre argent sous leur protection. Mais cela va à l’encontre de votre foi en les marchés et de votre scepticisme sur l’intervention des gouvernements.

Alors, êtes-vous plutôt pour rejoindre l’orgie sous drogue des gains financiers ou tenez-vous à garder vos principes éthiques pour éviter la gueule de bois que vous voyez venir ?

Peut-être aurais-je dû utiliser l’analogie moins sujette à controverse des chaises musicales. Comme le PDG de Citigroup, qui avait déclaré en 2007, pour justifier les critères de prêts pour le moins douteux de son entreprise : « tant que la musique joue, vous devez rester debout et danser. » On sait comment tout cela s’est terminé.

Quoi qu’il en soit, la question essentielle à laquelle doivent répondre les investisseurs aujourd’hui est : allez-vous vous joindre à un rally voué à l’échec parce que vous ne savez pas combien de temps il durera ?

Soit dit en passant, je ne pense pas que le Royaume-Uni se distingue parce que la Banque d’Angleterre est plus calme que les autres banques centrales.

Ce n’est pas parce que la Banque d’Angleterre semble calme en surface que cela signifie que les banquiers centraux ne soutiennent pas les marchés britanniques eux aussi. La Banque Nationale Suisse, par exemple, possède beaucoup de titres cotés à Londres.

Alors que l’Occident et le Japon sont sous l’emprise des banques centrales, les Chinois ont une forme d’intervention plus directe. Le gouvernement achète simplement des actions. Environ pour 130 Mds jusqu’à présent.

Quand la facture de l’échec nous sera-t-elle présentée ?

Les politiques des gouvernements finissent toujours par échouer. La question est de savoir à quoi ressemblera cet échec.

D’un point de vue historique, lorsque la politique de la banque centrale a été trop interventionniste, la crise a toujours été une crise inflationniste. L’échec résultait en une hausse des prix. Incapables de stopper l’impression monétaire une fois qu’ils l’avaient lancée, les banquiers centraux finissaient par en faire trop.

Mais la nature de la crise actuelle est la déflation. Cela compense ce que j’appelle le mécanisme comptable de l’inflation des banquiers centraux.

Pour l’instant.

Pour plus d’informations et de conseils de ce genre, c’est ici et c’est gratuit

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Diplômé de la prestigieuse université Bond en Finance, Economie et Droit, Nick Hubble est aujourd'hui chroniqueur pour différentes publications financières en ligne telles que "The Daily Reckoning Australia" et "The Money Life Letter".

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