Coronavirus : combien coûtent les masques FFP2 et chirurgicaux ?

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Par Ludivine Canard Modifié le 15 avril 2020 à 12h36
Masque Coronavirus Fabrication
44 CENTIMES D'EUROSLe prix de fabrication pour un masque FFP2 est actuellement de 44 centimes

Qu’ils soient chirurgicaux ou FFP2, avec la crise du Covid-19, les masques font l’objet de toutes les convoitises. Et bien qu’ils ne coûtent que quelques centimes à fabriquer, ils sont désormais vendus dix à vingt fois leur prix de revient. Ces bouts de cellulose et de polypropylène sont fabriqués en quelques secondes dans des usines chinoises (80% de la production mondiale) mais aussi, heureusement, en France. Avant la crise, quatre entreprises sur le territoire national produisaient près de 3 millions de masques par semaine ; aujourd’hui, ce nombre est de 6 millions. La production devrait même atteindre 10 millions avant la fin du mois d’avril 2020. Dans l’attente d’un vaccin, ces protections sont, pour beaucoup, le seul moyen de lutter contre la pandémie de coronavirus, peu importe le prix.

Combien coûte la fabrication d’un masque FFP2 et chirurgical ?

Les masques chirurgicaux et FFP2 se composent de plusieurs couches de fibres non tissées en polypropylène, des matériaux très accessibles. Toutefois, avec l’explosion de la demande liée à la pandémie de coronavirus, les prix des matières premières, indispensables à leur fabrication, se sont envolés. Selon Guan Xunze, le directeur des ventes d'une entreprise de masques à Shenyang, capitale de la province du Liaoning au nord-est de la Chine, le prix de la toile a été multiplié par 48 depuis le début de la crise, passant de 10.000 à 480.000 yuans la tonne (soit de 1.300 à 62.000 euros).

Habituellement, la fabrication d’un masque ne coûte quasiment rien, entre 3 et 4 centimes. Mais avec la hausse des commandes et du prix des matières premières, le prix de revient d’un masque chirurgical a également augmenté et s’établit aujourd’hui à environ 20 centimes. Le prix de fabrication pour un masque FFP2, une protection supérieure, a lui aussi augmenté. Il est d’environ 44 centimes à la mi-avril 2020. En ce qui concerne la main d’œuvre, son coût dans le prix final de fabrication d’un masque est marginal, près de 0,7 centime. D’autant plus qu’en Chine, la fabrication est automatisée et qu’une machine peut fabriquer jusqu’à 12.000 masques par heure. Ainsi, la plus grande usine de masques au monde qui se situe à Rizhao, dans l’est de la Chine, emploie 800 salariés et produit trois millions d’unités par jour !

Pour faire face à la crise, la France a commandé deux milliards de masques à la Chine et a organisé un « pont aérien » pour acheminer en toute sécurité des cargaisons de masques. Le prix du transport ne représente qu’un faible pourcentage du prix final d’un masque : 5%. Mais l’augmentation du prix de la logistique ayant lui aussi augmenté, il influence à son tour le prix final d’un masque. En effet, avec la crise sanitaire et la situation d’urgence, les masques sont envoyés par avion et non plus par porte-conteneur, ce qui permet de répondre plus rapidement à la demande (on estime le temps de livraison entre 1 et 3 jours). Si on prend les tarifs du fret aérien, qui varient généralement entre 1,50 et 4,50 dollars par kilogramme pour un transport entre la Chine et la France, le coût du transport pour un masque chirurgical de 4 grammes est donc aux alentours de 1,1 centime, et le double pour un masque FFP2 de 7 grammes.

Pour subvenir aux besoins des soignants (près de 42 millions de masques par semaine), l’État a donc décidé de relancer la production française de masques. Il a réquisitionné quatre entreprises, et ces dernières ont toutes multiplié leurs cadences pour livrer 200 millions de masques d’ici le mois d'août 2020. Le président de la République vise « l’indépendance pleine et entière » de la France à la fin de l’année 2020. Une aubaine pour ces entreprises. Parmi celles-ci, il y a le groupe Segetex-EIF qui se présente comme « le plus gros fournisseur de masques sanitaires dans l'Hexagone », cette activité devrait représenter 10 à 20% du chiffre d'affaires en 2020. Ses 50 masques FFP2 sont vendus 59 euros, soit 1,18 euros le masque. En sortie d’usine, les masques de protection français sont donc 2,5 fois plus chers que ceux de fabrication chinoise.

Combien rapporte le business des masques FFP2 ?

Depuis l’apparition du coronavirus en France, les prix des masques de protection se sont envolés. Auparavant, un masque chirurgical valait 5 centimes d’euro l’unité, il en vaut désormais entre 50 et 87 centimes. Avec la pénurie, les prix des masques ont donc été multipliés par 10 voire 15. Le constat est le même pour ceux FFP2 à haute protection. Ils se vendaient aux alentours de 2,50 euros l’unité et se négocient désormais entre 4,50 et 5 euros la pièce, parfois même plus. En achetant un masque FFP2 à 51 centimes (matériau + main d’œuvre) même dix fois plus cher qu’avant, en ajoutant le prix du transport (2 centimes) et en le revendant 5 euros, un revendeur peut espérer une marge brute de 4 euros par masque. Sur les sites de vente tels que Leboncoin ou Amazon, on peut même retrouver une boite de 25 masques pour 250 euros (soit 10 euros le masque). C’est probablement pour cette raison que le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a annoncé que la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) allait enquêter sur l'augmentation des prix des masques de protection ainsi que des gels hydroalcooliques depuis l'apparition de l'épidémie de coronavirus.

Face à cette hausse des prix, certains Français se sont lancés dans la fabrication de masques alternatifs (non homologués). Fabriqués le plus souvent avec les tissus à disposition (coton, toile, serviettes en papier,…) et des élastiques trouvables dans le commerce, ils ne sont pas homologués et ne répondent pas à la réglementation en vigueur. Si ces masques ne coûtent presque rien à fabriquer (moins de deux euros), leur efficacité n’est pas comparable aux masques chirurgicaux et FFP2.

Ce marché sanitaire est cependant loin d'être négligeable pour les Chinois. Avant la crise, le pays produisait vingt millions de masques par jour. Avec la hausse des commandes, leur production est montée à 120 millions de masques par jour au début du mois de mars 2020. La Chine aurait déjà exporté pas moins de 3,86 milliards de masques, vers une cinquantaine de pays, selon ses services douaniers. Ce marché est cependant très cyclique et très fragile, puisqu’il dépend en partie des épidémies mondiales. En France, avec la grippe H1N1 en 2009, de nombreuses usines avaient investi dans des lignes de production. Une fois la crise passée, les commandes se sont faites moins nombreuses et certaines usines ont été fermées et rachetées par des investisseurs étrangers. La loi de l’offre et de la demande n’aura jamais aussi bien été illustrée.

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Ludivine Canard est étudiante en école de journalisme à Paris. Elle a été stagiaire pour le Figaro économie et planet.fr.  Suivez-la sur Twitter : @CanardLudivine  

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