Le musée de la Résistance bretonne dans la tempête

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Par Patrick Crasnier Modifié le 24 mai 2016 à 13h23
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40 MILLIONSOn estime à 40 millions le nombre de victimes de la Seconde Guerre mondiale.

Saint Marcel petite commune du Morbihan, et la communauté de commune du val d’oust et de Lanvaux (CCVOL) sont aujourd’hui le centre d’un conflit qui pourrait bien « faire le buzz » comme on dit. Le musée de la résistance Bretonne (Labélisé Musée de France), situé sur la commune de Saint Marcel est un lieu de mémoire important, la bataille du maquis de Lanvaux ayant été une phase clef du débarquement. Le musée de la résistance Bretonne est aujourd’hui encore, mais pour combien de temps, le sanctuaire de la mémoire des parachutistes et des anciens combattants.

Depuis déjà plusieurs années ce musée rencontre des difficultés financières, les anciens Maires de Saint Marcel Armel Rousselot et de Malestroit Bernard Milou, s’étaient battus auprès des autorités pour obtenir des aides. Le ministre de la défense, Jean Yves Le Drian, a été sensible à leurs arguments, le sauvetage du musée poursuivait donc sa route. De nombreuses associations de soutien a ce musée se sont aussi mobilisées, on peut citer entre autre « l’association des familles de parachutistes SAS de la France libre (AFPSAS) » dont le président Frank Papazow est lui même fils de SAS ayant combattu à Saint Marcel, mais aussi L’association des vétérans du premier RPIMA, l’association Liberty Breizh memory group, l’association des amis du musée de la résistance et plusieurs autres associations. Les maires ont changé aux dernières élections municipales et depuis beaucoup de questions se posent.
En effet depuis le 1er Janvier 2015, la CCVOL est devenue l’institution porteuse du Musée (antérieurement les mairies de Saint Marcel et de Malestroit assumaient cette direction) la région Bretagne, le département du Morbihan, le ministère de la défense, le secrétariat aux anciens combattants et la DRAC, apportent aussi leur soutien à cette institution. Tout pourrait donc aller pour le mieux dans le meilleur des mondes, un musée reconnu par tous comme le lieu de mémoire le plus important de la résistance en Bretagne et même en France. En Juin 2014, à l’occasion du 70 eme anniversaire, des festivités pour commémorer sur ce lieu, avec la participation active des associations, ont même attiré plus de 40000 personnes en trois jours.

Voici ce qu’écrit l’association des familles de parachutistes SAS : Saint Marcel fut le principal maquis mobilisateur de l’histoire de la seconde guerre mondiale, tant en terme d’effectif, que de matériels. De plus, il fut l’objet de nombreuses premières, étant le seul maquis où toutes les composantes des actions combinées contre l’ennemi furent engagées : populations civiles, résistance, forces spéciales SAS, commandos interalliés français britanniques américains, services secrets SOE, OSS et BCRA.
Pourquoi alors s’émouvoir sur l’avenir de ce musée ? L’affaire paraît assez grave pour que les associations (AFPSAS en tête) se mobilisent et mobilisent la presse. En effet à la fin de cette semaine (ou en juin selon le calendrier) la communauté de commune doit voter les budgets pour la rénovation de ce musée. Depuis quelques mois un lobbying très actif s’est développé par une société privée, la société DIORREN PROJECT, auprès des élus décisionnaires, pour implanter un parc a thème sur le lieu de ce musée. Inutile de dire que cette action ne plait ni à la DRAC, ni aux associations entretenant la mémoire de ce site.

La société DIORREN PROJECT (consonance anglaise ça fait plus must !) implantée depuis seulement quelques années à Vannes (2011) est spécialisée dans la création d’activités ludiques de parc a thèmes et parcs d’attractions, créatrice en 2013 du parc a thème KER a Vannes. Quand on regarde de plus près on constate que cette société a doublé son capital en juillet 2015, passant de 300 000 euros à plus de 600 000 euros, certainement en préparation de ses évolutions. Rien d’anormal dans la vie d’une entreprise, ce qui est moins normal c’est que l’on constate aussi des actionnaires élus de la communauté de commune CCVOL, et là on peut commencer véritablement à s’interroger sur ce projet et sur les conflits financiers et conflits d’intérêts qui y sont attachés.

Les communications de la société DIORREN PROJECT dans les bulletins d’infos locales (infos du pays de Ploërmel) ont même fait l’objet d’un communiqué rectificatif de la communauté CCVOL, tant les propos étaient sujets à caution et à créer le doute auprès des habitants. En effet ceux qui ont rédigé ces articles (anonymes mais sans doute ceux qui y ont intérêt) laissent entendre qu’un projet de la société DIORREN aurait été « enterré » alors que cette même société n’a jamais répondu à l’appel d’offre a projet pour réaliser une étude de rénovation du Musée. Inutile de dire que la main mise par une société privée sur un tel lieu de mémoire n’a pas été sans créer des remous et des réactions nombreuses.
Frank Papazow, président de l’AFPSAS indique dans son communiqué de presse : Ce parc a thème « grand public et ludique » aura pour conséquence de faire perdre au musée le label « Musée de France » ses collections inestimables, aujourd’hui inaliénables, seront dispersées auprès d’autres établissements. La mémoire, la véracité historique, et la symbolique de la résistance attachés à ces lieux en seront entachés, pour le profit purement financier de quelques hommes d’affaires intéressés, pour au moins l’un d’entre eux en totale contradiction avec ses devoirs d’élu.

C’est donc une mobilisation totale et publique de toutes les associations de conservation de ce musée, qui est en place. On peut aussi espérer que le conservateur du musée, la DRAC et les instances régionales (le conseil régional dont le président est Jean Yves Le Drian) montent aussi au créneau pour défendre la mémoire de ces lieux.
Aujourd’hui que la France est dans une situation plus que préoccupante, que les Français retrouvent un attachement aux valeurs fondamentales de notre nation, le futur vote de cette communauté de commune aura valeur de test pour les habitants de cette région. Soit leur vote est en faveur de la défense de ce lieu mythique de mémoire collective et ils auront rempli au mieux leur devoir d’élu de la nation, soit les « petits arrangements » entre amis auront le dernier mot et ils seront totalement responsables de la perte d’un musée national vecteur de la mémoire de la seconde guerre mondiale. Comme a Verdun le week-end prochain, ils ont le choix.

A n’en pas douter de nombreux anciens combattants, parachutistes et membres des associations seront devant la maison de la communauté CCVOL jeudi 26 Mai avant le vote, rendez vous est pris.

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Patrick Crasnier est diplômé en sciences humaines 3eme cycle en psychopathologie, après de longues années passées en cabinet libéral comme psychanalyste, blessé lors d’un attentat terroriste cesse cette activité en 1995. Continue comme photojournaliste, journaliste radiophonique (activités menées conjointement avec celle de psychanalyste depuis 1983) puis comme journaliste rédacteur au journal Toulousain et à l’écho des entreprises. Actuellement photojournaliste correspondant pour l’agence de presse panoramic et rédacteur dans plusieurs revues.

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