Je m’appelle Nicolas B, je suis prisonnier politique en France et j’ai peur

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Par Calculette Modifié le 25 juin 2013 à 10h17

Lettre inspirée de la compilation de faits réels évoqués dans plusieurs grands médias de toutes tendances. Toute ressemblance avec la réalité devra être imputée à cette dernière.

Je m'appelle Nicolas Bernard-Buss, je suis prisonnier politique en France et ... j'ai peur.
J'ai quitté mes parents et ma ville d'Angers pour suivre un double cursus universitaire à Paris. J'étudiais les sciences politiques et l'histoire à la Catho en plus d'être en troisième année d'école d'ingénieur. J'ai 23 ans et le «malheur» de porter le même prénom que le président Sarkozy sur qui s'acharne la haine du locataire de l'Élysée.

Espérance...
Comme des millions de Français encore libres de penser, je manifestais mon opposition à la loi Taubira en portant fièrement la Famille dans mon cœur et sur mon sweat, regrettant que les élus et responsables politiques se soient même provisoirement «faits une raison» face au mépris du gouvernement.

Joie de vivre...
Dimanche 16 juin, j'étais à Neuilly-sur-Seine avec des amis, au milieu de 1500 personnes selon la police, pour accueillir François Hollande, invité à s'exprimer dans l'émission «Capital». Comme toujours dans cette ambiance bon enfant et déterminée contre le mariage Gay, la Manif Pour Tous battait son plein parquée à 500 m de l'entrée du studio de télévision par des bataillons de forces de l'ordre... Plus tard, mes amis et moi sommes allés poursuivre joyeusement en nous promenant sur les Champs Élysées.

Perplexité...
Vers 22h, j'ai vu fondre sur nous une charge de CRS accompagnés d' individus armés de Taser et hurlant «Interpellation !» Ne voyant aucun braqueur, violeur, voleur, dealer et autre terroriste alentour, j'ai pensé à ces fanatiques d'Antifa voulant casser du «droitard». Nous avons pris la fuite.

Affolement...
Aidés par un des serveurs, nous nous sommes réfugiés dans la première pizzeria venue. J'apprendrai plus tard que le patron, absent au moment des faits, justifie ainsi une plainte contre moi «à cause de son arrestation, il y a eu des dégâts, et le restaurant a dû fermer un quart d'heure».

Trou noir...
Rattrapé par deux de ces brutes qui écrasaient tout sur leur passage dans le restaurant, j'ai réalisé que nos agresseurs étaient des policiers en civil ! Comme j'essayais de me défendre, ils m'ont tabassé jusqu'à perdre quasiment connaissance.

Isolement...
On m'a dit qu'une vingtaine de personnes ont été interpellées en même temps que moi et relâchées après un contrôle d'identité de plusieurs heures. Ce qui m'étonne, c'est d'avoir été séparé des autres qui eux, ont été emmenés dans le panier à salade jusqu'au commissariat de la rue de l'Evangile. Réflexion faite, après mon tabassage, je n'étais probablement plus assez présentable devant de mes compagnons d'infortune.

Nicolas ligoté
Incrédulité...
Assommé, menotté et pieds liés, ils m'ont jeté dans la fourgonnette de la BAC puis embarqué pour une comparution immédiate non pas dans l'une des deux chambres correctionnelles qui s'en occupent habituellement mais à la 16e, spécialisée dans les dossiers de stupéfiants et proxénétisme et qui, d'après «Le Monde», venait opportunément d'être libérée suite à l'ajournement du procès de l'affaire Zahia. De ces deux prétextes «dégradations volontaires» et «rébellion», seul le deuxième sera retenu par le juge, la responsabilité des dégradations étant difficile à établir dans le cadre d'une interpellation mouvementée !


Improvisation...
Le 27 mai après-midi, en marge d'une manifestation spontanée à proximité du lycée Buffon à Paris, où François Hollande effectuait une visite, des lycéens, une femme enceinte, un aveugle, un prêtre, des dames catéchistes et des retraités âgés de plus de 70 ans ont été interpellés, en tout quatre-vingt-treize personnes, des opposants au mariage homosexuel mais aussi de simples passants. J'avais déjà été contrôlé moi aussi comme des centaines de veilleurs et condamné à 200 euros d'amende avec sursis pour «non-dispersion d'un rassemblement non autorisé». Je vivais donc l'instant présent comme un improbable cauchemar. Trop c'est trop, j'ai refusé le prélèvement de mes empreintes et ADN. C'est cet «antécédent judiciaire» qui motivera la sévérité du juge. Tout cela n'avait aucun sens ! Jean-Frédéric Poisson, député UMP s'indignait : «Quand vous êtes interpellé sans raison, il n'est pas anormal que vous vous rebelliez !»

Consternation...
Mercredi soir, ils m'ont condamné pour «rébellion et refus de prélèvement» à quatre mois de prison, dont deux fermes et 1000 euros d'amende avec mandat de dépôt comme si j'étais une menace, un danger pour la société ! «C'est ubuesque ! Il a été jugé pour des infractions consécutives à une interpellation qui n'a pas de cause.» a déclaré Me Henri de Beauregard, l'un des avocats bénévoles de la Manif pour tous.

Solitude...
J'ai évidemment fait appel de cette sentence ahurissante simplement pour recouvrer ma liberté. Mais contrairement à ce qui se fait dans le cadre de cette procédure, ils m'ont jeté dans un cachot de Fleury Mérogis. «Pour l'exemple» sans doute !

Fleury Mérogis

Cauchemar...
Il y a 8 ans, un jeune homme du nom d'Eric BLAISE incarcéré comme moi à la prison de Fleury-Mérogis était battu à mort et décédait dans sa cellule. Une ordonnance de «non-lieu» envoyée à ses parents signifiant que sa mort restera inexpliquée lui sert aujourd'hui d'épitaphe ! Aujourd'hui je survis dans un environnement sordide à trois dans 9 mètres carrés, toilettes comprises. Je suis cerné par la crème de la délinquance et de la violence.

Angoisse...
Quand il fera trop chaud, les détenus de Fleury-Mérogis boucheront leurs lavabos pour laisser l'eau s'écouler directement sur le sol. Puis, pour avoir un peu d'air, ils briseront les lourdes vitres de l'étroite fenêtre de leur cellule. Ils devront également choisir entre le ventilateur, que l'on peut "cantiner" auprès de l'administration, et tout autre équipement électrique : le circuit ne supporterait pas la surcharge imposée par les deux appareils. Et si le soleil cogne lors des promenades, le seul véritable point d'ombre de la cour ne sera d'aucun secours. Le préau, à l'abri du regard des gardiens, est en effet une zone de non-droit où se mènent les règlements de comptes. Il est donc interdit d'accès. (*)
Parole d'expert :
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Désespérance...
Je me sens tellement étranger à ce statut de prisonnier politique, incroyable dans une démocratie, que je ne maîtrise plus rien. J'ignore comment je pourrai m'en sortir et dans quel état ? Il parait que je reçois d'innombrables témoignages de soutien et de sympathie ? Cela fait tant de bien. Quelqu'un m'a dit qu'il y a aussi des Français pour estimer que ce qui m'arrive est «bien fait», c'est possible ça ?

Courage...
J'aimais la France quand elle était encore le pays des Droits de l'Homme.
Maman, Papa, mes amis, mes amours... ne pleurez pas : oui j'ai peur, mais je m'accroche. Du fond de ma cellule, je m'accroche à l'idée que quoiqu'il arrive vous ne lâchez rien !
Je vous aime.
Nicolas B.

* * * * * * * * *

Surpopulation chronique, vétusté... Un été chaud pourrait être, dans les prisons, celui de tous les dangers. Pendant la période estivale, "la justice est en vacances, les avocats sont partis et, du coup, ne viennent pas voir leurs clients", explique Céline Verzeletti, secrétaire générale du syndicat CGT pénitentiaire

Prions pour qu'il continue de pleuvoir !

©Calculette pour revolte.exprimetoi.com

(*) source

Ici la pétition de soutien à Nicolas .

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Bloggeuse, créatrice et administratrice d’un forum politique  

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