Nucléaire : la vitrification des déchets, une technologie française de pointe

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Par Sylvain Gosselin Publié le 31 octobre 2018 à 5h50
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4%Seuls 4% du combustible usé d?un réacteur nucléaire sont considérés comme hautement radioactifs

En présentant le 22 octobre 2018 un nouveau projet de vitrification des déchets pour la centrale japonaise de Fukushima, Orano et le CEA ont replacé la problématique du démantèlement au cœur de l’actualité de l’énergie nucléaire. La vitrification est un procédé en perpétuelle évolution depuis son développement par la France il y a un demi-siècle. Elle permet aujourd’hui aux entreprises françaises d’être incontournables sur le fructueux marché du démantèlement des centrales.

Que faire des déchets nucléaires qui s’accumulent avec le temps ? Si le débat sur la mise en profondeur des déchets accapare une bonne partie de l’attention, les professionnels continuent de développer des nouvelles techniques qui rendent le nucléaire sûr pour l’environnement et l’homme malgré la présence inhérente de déchets radioactifs. La vitrification des déchets est une technique bien connue des experts qui se développe grâce à des coûts moins élevés et des résultats toujours plus satisfaisants. Cette technique n’est pas nouvelle puisqu’elle a été testée sur le site de Marcoule dès 1968, mais elle ne cesse depuis de s’améliorer pour faire entrer le démantèlement nucléaire dans un nouveau paradigme.

Déchets vitrifiés : une solution d’abord française

Tous les quatre à cinq ans, le combustible usé d’un réacteur nucléaire est traité. Seuls environ 4% de ce combustible usé sont considérés comme hautement radioactifs et doivent être maîtrisés par un procédé appelé vitrification des déchets. A l’origine ce sont donc les déchets qui concentrent le plus de radioactivité qui sont concernés par cette technologie. Contrairement à un déchet qui serait simplement contenu dans un récipient hermétiquement clos (comme un liquide dans une bouteille), la vitrification permet d’emprisonner les déchets dans une matrice en verre. Cela est rendu possible par procédé chimique qui vitrifie la matière à l’échelle de l’atome et donne son nom à la vitrification des déchets.

Le matériau obtenu est sûr et d’une durée de vie supérieure à celle de la radioactivité emprisonnée. La vitrification est donc devenue incontournable dans la prise en charge des déchets les plus radioactifs et la France est restée en pointe dans ce domaine depuis son élaboration il y a cinquante ans. Le CEA, EDF ou encore Orano ont développé une expertise qui séduit les pays étrangers. Dès 1990, les Britanniques ont acquis auprès de la France le procédé de vitrification. La Belgique envoie directement ses déchets en France depuis le début de cette même décennie. La France reste un leader en la matière même si la Russie, la Chine ou l’Inde font des efforts pour être indépendants et proposer leurs solutions à des pays tiers.

Le marché du démantèlement comme moteur de l’innovation

La France semble toutefois garder un avantage comme l’illustre le projet commun au CEA et Orano à la centrale nucléaire de Fukushima. Des études commencent afin d’évaluer la possibilité de vitrifier les boues et absorbants minéraux impactés par les fuites radioactives. Veolia n’est pas en reste puisqu’elle travaille sur le développement de la vitrification pour les déchets à la radioactivité moyenne, faible, voire très faible. Il s’agit là d’une petite révolution puisque ce procédé a été initialement développé pour les déchets les plus dangereux. L’entreprise a développé la technologie « GeoMelt » qui est viable économiquement grâce à sa capacité à traiter simultanément des déchets sous forme de béton, de métal et d’autres matériaux.

EDF va bénéficier de cette technologie sur son site de Chooz (Ardennes) où les déchets traités ne représentent que 0,1 % de la radioactivité, mais concernent 98% des volumes à traiter. En quelque sorte, la vitrification se démocratise à l’ensemble des déchets et cela tombe bien, car le démantèlement des centrales (notamment françaises) est devenu une filière à part entière. En effet, le démantèlement des sites nucléaires est un marché estimé à plus de 200 milliards de dollars d’ici à 2050. A lui seul, le marché français représente 650 millions de d’euros par an. Cela s’explique par le fait que la France a développé un parc nucléaire il y a déjà plusieurs décennies et qu’il est arrivé à maturité.

De par son choix historique en faveur du nucléaire, la France a donc développé une expertise unique en matière de démantèlement et peut désormais se tailler une place de choix au Japon, en Allemagne et même en Chine. Veolia et Suez remportent régulièrement des marchés en France et à l’international. Un secteur porteur qui est loin d’être figé comme le montre le succès rapide de l’entreprise Oreka. Fondée en 2013, elle a su intéresser ses potentiels clients grâce à un logiciel très perfectionné qui permet de générer plusieurs scenarii de démantèlement de sites nucléaires. Une démarche si séduisante que la start-up a été rachetée par EDF. Les entreprises françaises possèdent une grande expertise et un savoir-faire envié.

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Titulaire d'un BTS et d'une licence professionnelle en génie climatique, Sylvain Gosselin a travaillé chez Management RH jusqu’en 2015. Un temps responsable d'un bureau d'étude en Aquitaine où l'essentiel de son travail consistait en la rédaction de dossiers techniques et d'appel d'offres, Sylvain Gosselin a opéré un virage à 180° en se lançant dans une carrière de conseil et audit opérationnel dans le secteur du nucléaire.

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