Le numérique, une opportunité pour les familles aux fins de mois difficiles

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Par Stéphane Metay Modifié le 4 avril 2019 à 12h23
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Le numérique est en train de transformer peu à peu toutes les strates de la société. Le monde des bailleurs sociaux ne fait pas exception, que ce soit du côté des locataires ou de celui des bailleurs. Et pour cause : de nombreuses solutions et opportunités qui n’existaient pas auparavant sont désormais à portée de main. Des solutions qui permettent notamment de mieux prendre en compte les plus démunis.

Les différentes raisons du non-recours aux aides sociales

Le non-recours aux droits sociaux est un fléau de masse. Philippe Warin et l’Odenore parviennent au chiffre de 13 milliards d’euros par an de non-recours aux droits, d’après le livre L’envers de la « fraude sociale ». Cela représente, en moyenne, près de 500 euros par an par ménage français, une somme considérable et un gisement important pour aider un ménage à boucler son budget et à payer ses factures en temps et en heure. 4 problèmes ont été pointés du doigt dans une évaluation du non-recours aux minimas sociaux réalisée en 2016 pour le compte de l’Assemblée Nationale, en analysant les différents comportements du non-recours des Français.

Les Français ignorent, souvent par méconnaissance, leur droit aux aides sociales ou ont l’impression que la somme peut être trop faible au vu des démarches complexes à mettre en place. Il est également possible que ces aides ne leur aient pas été proposées par un professionnel. Enfin, il se peut qu’une aide demandée ne soit pas versée en raison d’un problème administratif, comme par exemple l’oubli d’un document ou des informations incomplètes.

Réclamer ses droits aux aides sociales grâce au numérique

Le numérique a néanmoins permis une simplification des démarches administratives. Les aides au logement illustrent parfaitement cela puisque les démarches sont désormais (presque) exclusivement à faire en ligne. Résultat ? Les allocataires ne perdent plus un temps précieux à faire la queue à la Caisse d’Allocation Familiale et peuvent faire toutes leurs démarches sans même sortir de chez eux. Fini l’angoisse du document oublié qui vous obligeait à revenir au guichet plusieurs fois dans la même journée !

Mais la CAF ne se contente pas de dématérialiser ses prestations. Elle se sert aussi de l’outil numérique pour trouver ceux qui n’ont pas recours aux droits sociaux. Comment ? Depuis 2017, la Caf utilise le data mining, un logiciel d’analyse de données dont elle se sert également pour repérer les cas de fraude. Ce logiciel permet d’identifier celles et ceux qui sont susceptibles d’être éligibles à certaines prestations. Une première expérimentation de ce dispositif a été réalisée en Gironde.

Conclusion ? Il a été prouvé que 12 % des ménages du département ne réclamaient pas la totalité de leurs droits. Grâce au data mining, ces ménages ont pu percevoir, en moyenne, 210 € en plus tous les mois. Une somme qui change la donne dans un petit budget. Reste à voir si cette méthode fera ses preuves sur l’ensemble du territoire.

La CAF n’est toutefois pas la seule à utiliser le numérique pour lutter contre le non-recours aux droits. L’ouverture des données de l’administration a notamment permis d’offrir de meilleurs services publics numériques aux citoyens. Le site de l’état mesaides.gouv, ou encore l’application Fastoche permettent également de connaitre ses aides sociales en quelques clics, grâce à un chatbot en répondant à quelques questions. N’importe qui peut désormais s’emparer des données fournies par les administrations pour créer des services accessibles à tous dans le but de désengorger les services d’assistantes sociales, ce qui signifie souvent plus d’efficacité pour les usagers.

Une alternative aux frais bancaires excessifs

En dehors de la question du non-recours aux droits, le numérique offre tout un panel de solutions à ceux qui se retrouvent étouffés par les frais bancaires. Selon une enquête de 60 Millions de Consommateurs, les frais bancaires seraient 8 à 9 fois plus élevés pour les personnes en situation de fragilité financière que pour les autres. Un client précaire paierait 344 euros par an en moyenne dans une banque classique selon l’Observatoire de l’inclusion bancaire. Il s’agit donc d’un véritable cercle vicieux duquel il est difficile de sortir indemne pour les plus précaires.

Les banques en ligne constituent pourtant une première alternative. La raison ? Contrairement aux banques traditionnelles, elles ne facturent que très peu de frais d’incidents de paiement avec des taux d’agios bien moindres que les banques traditionnelles. Une bouffée d’air donc pour les plus précaires qui n’en peuvent plus de payer jusqu’à 80 euros par mois en cas de dépassement de leur découvert autorisé.

Surnommée Ma French Bank, cette banque en ligne devrait officiellement

voir le jour au printemps 2019 après une phase de test qui débutera en 2018. Ce que l’on sait pour l’instant, c’est que tout le monde (ou presque) pourra a priori y ouvrir un compte. Par ailleurs, il y a le Compte-Nickel, le fameux « compte sans banque » qui propose à ses clients d’avoir accès à un compte 100 % connecté. Les clients sont ainsi tenus au courant de l’état de leur compte par emails et SMS. Ils bénéficient également d’un espace client qu’ils peuvent consulter à tout moment. L’avantage de ce compte, c’est que même les personnes en situation d’« interdit bancaire » y ont accès. L’autre intérêt, c’est qu’il est garanti 0 agios et 0 frais d‘incidents.

Un outil précieux pour les travailleurs sociaux

Si le numérique est donc salutaire pour les personnes en situation de fragilité financière, il l’est également pour celles qui travaillent avec eux. Le logiciel Ideal CAF, une procédure de dématérialisation des demandes d’aide au logement entre les bailleurs sociaux et la CAF, permet ainsi aux organismes de « prévenir au lieu de guérir ». Quand le locataire signe son contrat, le bailleur social transmet à la CAF par voie électronique toutes les données permettant d’obtenir l’aide au logement. Pour les locataires, cela permet d’avoir une prise en charge complète et rapide. Pour les bailleurs, cela permet d’éviter une perte de liquidité liée à la non-rétroactivité de l’APL, et donc d’éviter les impayés. Pour la CAF, cette solution permet de limiter les fraudes.

Les assistantes sociales, auxquelles les HLM ont très souvent recours en interne, utilisent également de plus en plus d’outils numériques. Cela leur permet notamment de faciliter les démarches administratives qu’elles entreprennent pour leurs usagers, et donc il améliore leur quotidien. Elles peuvent désormais accéder très facilement aux dossiers des personnes qu’elles suivent et disposent de données et de statistiques stockées dans des logiciels qui leur servent à s’adapter aux différents profils et situations qu’elles peuvent rencontrer tout au long de leur carrière.

Le numérique est donc un gage d’opportunités et facilite l’accès aux droits pour les familles en fin de mois difficiles. Il permettra ainsi de diminuer le non-recours des aides sociales et les démarches administratives et de développer de nouvelles offres bancaires plus adaptées, qui seront salutaires aussi bien pour les usagers que les travailleurs sociaux.

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Stéphane Metay est le directeur commercial de Payboost, première fin tech d’utilité publique depuis son lancement en 2016. Il a travaillé auparavant comme directeur régional pour Decathlon en Chine pendant 3 ans avant d’être recruté en tant que responsable développement industriel chez Veolia en Chine pendant près de 9 ans. 

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