Les orientations pour un modèle économique et social qui favorise la croissance

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Par Pierre Maurin Publié le 14 mars 2019 à 5h10
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3,3%La croissance mondiale devrait atteindre selon l?OCDE uniquement 3,3% en 2019

Les chiffres de la croissance économique pour les années à venir viennent de tomber. Le ralentissement se confirme avec une croissance mondiale qui atteindra selon l’OCDE uniquement 3,3% en 2019 en raison notamment des tensions commerciales et des incertitudes politiques dans le monde.

Toutes les économies du G20 sont touchées et plus particulièrement la zone euro où elle se limiterait à 1%, contre 1,8% encore prévu il y a quelques mois. L’Allemagne (-0,9 point à 0,7%) et l’Italie (-1,1 point à -0,2%) sont très touchées dans l’Union européenne. La France est un peu plus épargnée du fait de sa dépendance moins forte aux exportations. Toutefois, l’Allemagne est en situation de plein emploi avec environ 3% de chômage alors que la France est à 8,8% en février 2019.

En France, les premières mesures en faveur du pouvoir d’achat annoncées par le Président en décembre et mises en œuvre dès janvier semblent produire quelques effets positifs sur les dépenses des ménages qui ont crû de 1,2 % en janvier, selon les données publiées par l’Insee. Ces mesures ne seront pas suffisantes pour créer un choc de confiance, d’autres réformes sont nécessaires pour favoriser une nouvelle croissance tirée par l’investissement, la recherche, le développement et l’initiative des plus entrepreneurs d’entre nous.

Alors à l’heure du grand débat national, voici quelques propositions pour assurer à la France une croissance économique plus forte que la moyenne des autres pays européens.

Un contrat de travail unique à droit progressif

Nous préconisons la mise en place d’un contrat de travail unique à droit progressif qui remplacerait à terme les autres formes de contrat (CDD, CDI) et qui constituerait une réponse à un double besoin : besoin de flexibilité des entreprises et besoin de protection des salariés =>un système gagnant pour les employeurs et les salariés. C’est un contrat à durée indéterminé qui donne aux travailleurs plus de protections au fur et à mesure qu’ils restent dans l’entreprise (accumulation de droits progressifs dans le temps). Les deux premières années est versée une prime de précarité de 10%, comme les CDD actuels en cas de départ du salarié. Pour l’entreprise le montant des charges (chômage) est dégressif en fonction de la durée de l’emploi, ce qui signifie la fin du caractère fixe des cotisations et son remplacement par un système de modulation des cotisations patronales.

Il n’y aura pas de bonus-malus pour les entreprises ; le système est vertueux car il permet de conserver plus longtemps les salariés, le cumul entre salaire et allocation sera moins fréquent et les droits rechargeables prolongeant l'indemnisation également moins utilisés. Au final, cette mesure va permettre des créations d’emplois et une baisse de l’indemnisation chômage. Toujours sur cette assurance chômage, nous pourrions réduire le montant de l’indemnisation pour les cadres supérieurs qui touchent plus de 6000 euros par mois et la fixer à 4000 euros par mois. Ce serait une mesure de justice sociale car elle concernerait les plus gros salaires. La France se rapprocherait ainsi de ses voisins européens tout en restant la plus généreuse en la matière.

Une fiscalité dans la moyenne européenne et au service de l’emploi

En matière de fiscalité, il est nécessaire qu’elle soit centrée sur l’objectif prioritaire national, la restauration de l’emploi (tout en maintenant bien entendu les grands fondements de la redistribution fiscale). Cette nouvelle politique fiscale doit continuer de converger vers la moyenne européenne. Cette convergence est nécessaire pour éviter les disparités trop fortes avec nos voisins et nous permettre de redevenir compétitifs. Calons-nous donc sur cette moyenne européenne, comme nous l’avons fait sur l’impôt sur les sociétés. Alignons les revenus fonciers sur les revenus du capital (en appliquant une flat tax de 30%) et transformons l’IFI en un impôt sur la fortune sur les biens de jouissance (hors résidence principale et hors détention d’action cotées ou non cotées), ce qui sera beaucoup équitable, car cet IF ne pénalisera plus des classes moyennes supérieures, mais davantage les grandes fortunes, ce qui permettra de répondre aux revendications des ménages modestes.

Evitons donc les propositions hasardeuses de création d’un impôt universel (il existe déjà avec la CSG). Plutôt que supprimer des niches fiscales qui se sont accumulées au fil des années pour répondre aux revendications des uns et des autres par rapport à des hausses d’impôt, évaluons tout d’abord leur pertinence en matière de création d’emploi.

Quant à la taxe sur la GAFA, c’est une mesure populaire mais qui produira des résultats très faibles (de l’ordre de 500 Millions d’euros) et qui renforcera les sociétés américaines au profit des européennes moins puissantes. Seule une réflexion dans le cadre du G20 ou de l’OCDE assurera une fiscalité pérenne au niveau mondial.

La prime d’activité doit faire l’objet de la part du gouvernement d’une meilleure pédagogie sociale qu’il faut transformer dans les faits et qui a permis la création d’un impôt négatif à la française en dessous d’un montant de revenus inférieur à 1 787 euros par mois.

La fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG/CRDS en un impôt unique sur le revenu perçu dès le premier euro serait une piste intéressante mais la question centrale est de savoir lequel des deux absorbe l’autre, avec des conséquences différentes. L’évaluation globale des deux scénarios est très difficile à établir, avec des impacts à la fois sur les recettes attendues mais aussi sur la notion de justice fiscale, sujet très sensible en France.

La dépense publique

La dépense publique ne ralentit pas en France, notre pays y consacre 56,5% de sa richesse nationale. Cette dépense publique est supérieure de 10 points à celle de la moyenne européenne. Les solutions passant par des coupes budgétaires ne seront pas acceptées par la population française, inutile donc d’avoir une approche trop réductrice sur le sujet, même si ces politiques ont été menées avec succès dans d’autres pays européens, comme le Portugal, l’Espagne, voire même la Grèce et à un degré moindre par l’Italie sous le gouvernement de Mario Monti.

Il est donc urgent d’améliorer l’efficacité de la dépense publique et à terme de l’abaisser ; pour cela, il est nécessaire d’organiser des Etats Généraux de la dépense publique en associant les collectivités locales avec leurs associations respectives, (AMF/ARF/ADF) et l’Etat. Ce groupe de travail devra passer au peigne fin toutes les dépenses publiques et notamment la question des doublons entre les administrations locales et les administrations centrales. Des transferts de compétences vers les collectivités locales sont indispensables avec un Etat qui se concentre sur ses missions régaliennes si l’on veut réduire la dépense publique. Réfléchissons à la fusion des Caisses d’Allocations Familiales et des Caisses Primaires d’Assurance Maladie au niveau régional. Explorons aussi des expériences innovantes, avec la régionalisation de Pôle emploi en région et la fin du monopole de certains opérateurs du service public de l’emploi sur l’accompagnement. On peut également faire du recours au contrat de droit privé « une voie normale d’accès à certaines fonctions du service public », notamment pour celles qui ne sont pas régaliennes. Il en est de même pour l’apprentissage qui doit être géré au niveau régional, en fonction des besoins d’emploi des entreprises. Pour cela, les Medef locaux seraient invités à échanger avec les CFA/lycées qui pourraient être également fusionnés, et les Régions en auraient la responsabilité. Aucun sujet n’est tabou, y compris les compétences des préfets ainsi que l’utilité des sous-préfets. Sans aller jusqu’à avoir les compétences des Landers, ces propositions ouvriraient un nouveau chapitre de la décentralisation en France !

La tâche est ambitieuse, mais il s’agit de préparer une société française qui fonctionne de manière transversale avec des acteurs de proximité plus autonomes et plus responsabilisés, avec pour objectifs de maintien d’un bon niveau de service pour les citoyens et de baisse de la dépense publique.

Avec ces quelques mesures que nous préconisons, il est possible de retrouver le chemin d’une croissance inclusive et de mettre la France en mouvement en conduisant une mutation majeure qui libère la créativité, l’innovation et la prise d’initiative du côté des citoyens et des institutions de proximité, avec un Etat qui joue un rôle de coach en accompagnant cette mutation !

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Pierre Maurin est entrepreneur, Vice-Président des Centristes Paris et Membre du Comité Exécutif de Les-IDées.fr. Délégué Economie et Emploi Les Centristes Elu du 9ème arrondissement de Paris.

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