Pratiques anticoncurrentielles : les nouvelles règles facilitant les actions indemnitaires des victimes

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Par Thomas Oster Publié le 18 avril 2017 à 5h00
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11 %Les réclamations des consommateurs ont chuté de 11 % en 2015.

La Directive 2014/104/EU relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles dire directive « damages » a été transposée en droit français par une ordonnance du 9 mars 2017.

Ces actions indemnitaires seront désormais régies par des règles spécifiques, regroupées au sein d’un nouveau titre du code de commerce. L’objectif de ces règles est d’encourager les victimes de pratiques anticoncurrentielles à obtenir réparation de leur préjudice en assouplissant notamment les règles de preuve.

Qui peut intenter une action en dommages et intérêts suite à une pratique anticoncurrentielle ?

L’action est ouverte à toute personne ayant subi un préjudice du fait d’une pratique anticoncurrentielle. Il peut s’agir par exemple de clients floués en cas d’entente sur les prix, de fournisseurs déréférencés en cas de boycott ou de concurrents ayant perdu des marchés en cas de pratique d’exclusion.

Que doit-on prouver pour obtenir réparation de son préjudice ?

Les règles de responsabilité civile imposent à tout demandeur de démontrer l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre la faute et le préjudice. Les nouvelles règles facilitent la tâche du demandeur en prévoyant qu’une décision de condamnation de l’Autorité de la concurrence ne pouvant plus faire l’objet d’un recours ordinaire constitue une preuve irréfragable d’une pratique anticoncurrentielle et, partant, d’une faute. Il suffira ainsi au demandeur de quantifier son préjudice et de démontrer que ce préjudice résulte de la pratique condamnée.

Quel est le type de préjudice qui peut être réparé ?

Le droit français prévoit le principe d’une réparation intégrale du préjudice. Les nouvelles dispositions précisent qu’à côté du préjudice financier direct, lié par exemple au surcoût payé du fait de l’achat de produits ayant fait l’objet d’un cartel sur les prix, le préjudice peut également comprendre la perte d’une chance ou le préjudice moral.

S’agissant du surcoût subi par l’acheteur, les nouvelles dispositions prévoient que l’acheteur direct est réputé l’avoir intégralement absorbé, sans l’avoir répercuté à un sous-acheteur éventuel. Cette présomption peut cependant être renversée par le défendeur mais également par un sous-acheteur qui prétendrait avoir subi la répercussion du surcoût et qui intenterait une action directement à l’égard de l’auteur des pratiques.

Comment le demandeur peut-il quantifier son préjudice ?

La quantification du préjudice constitue la principale difficulté pour les victimes de pratiques anticoncurrentielles. En effet, la décision de l’Autorité de la concurrence sur laquelle peut s’appuyer les victimes ne contient pas d’information à ce sujet. Pour apprécier l’ampleur de son préjudice, le demandeur aura le plus souvent besoin d’obtenir des éléments de preuve détenus par les auteurs des pratiques ou par l’Autorité de la concurrence.

Alors que jusqu’à présent les demandeurs devaient identifier précisément les documents que le juge peut ordonner au défendeur de produire, ils pourront désormais demander à ce qu’une catégorie de pièces pertinentes leur soit communiquée. Il s’agit d’une nouveauté et, pour certains, d’un premier pas vers les procédures de discovery à l’américaine. Par ailleurs, les demandeurs pourront demander communication de documents à l’Autorité de la concurrence mais uniquement si ces documents ne peuvent pas être obtenus par d’autres biais et sous certaines réserves tenant notamment à la protection des déclarations faites dans le cadre de procédures de clémence ou de transaction.

Quand l’action doit-elle être intentée ?

L’action doit être intentée dans un délai de 5 ans à compter du moment où le demandeur a connaissance du fait qu’il a subi un dommage résultant d’une pratique anticoncurrentielle et qu’il en connait au moins l’un des auteurs. Le plus souvent ces éléments ne sont connus de la victime qu’au moment de la publication de la décision de l’Autorité de la concurrence condamnant les pratiques.

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Thomas Oster, avocat associé, Bird & Bird

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