Quand la BCE parle vrai (pour une fois)

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Par Simone Wapler Publié le 4 avril 2019 à 5h32
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La BCE prépare l’opinion à une fuite en avant dans le désastre monétaire. Ses fonctionnaires n’ont aucune idée de la façon dont se crée la croissance et la richesse.

Il y a quelques semaines, Peter Praet, le chef économiste de la Banque centrale européenne, participait à un débat en ligne. Oui, la BCE aussi veut se donner un air un peu plus démocratique, c’est très tendance en ce moment.

Les réponses de Peter Praet permettent de voir comment la BCE envisage l’économie. Accrochez-vous. C’est effrayant.

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Les citations que je vais utiliser figurent sur ce lien. Je vous reproduis la première et je me contenterai de traduire à la volée les autres.

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A la remarque d’un “agent économique” (pour reprendre le jargon de la profession de Peter Praet) qui constate que l’économie réelle n’a pas profité de la création monétaire (QE), voici la réponse de notre expert :

Le QE a été très efficace pour l’économie réelle. La baisse des taux d’intérêt s’est translatée au crédit bancaire attribué aux entreprises et ménages. Ceci s’est traduit par plus de crédit, plus d’investissement et plus d’emploi (10 millions d’emplois supplémentaires depuis 2013).

Pour les penseurs de la BCE, le crédit mène l’économie et moins le crédit est cher, plus il y a de croissance. Pour créer de la croissance, il suffit donc d’administrer le prix du crédit.

Rappelons que le crédit d’aujourd’hui ne repose plus sur de l’argent déjà existant, de l’épargne réelle. Ce n’est plus la résultante des choix des acteurs de la vie économique, qui arbitrent entre épargne et consommation. Aujourd’hui, les banques prêtent de l’argent qui n’existe pas et elles achètent leur droit de création monétaire auprès de la BCE.

Pour la BCE, pour augmenter la richesse, il suffit d’augmenter la masse de crédit qui sera ensuite transformé en investissement ou en consommation, ce qui va créer des emplois.

Remplaçons “crédit” par “monnaie”. Posons-nous la question : la création monétaire a-t-elle déjà rendu une société plus riche ?

Quand les législateurs, après avoir ruiné les hommes par la guerre et l’impôt, persévèrent dans leur idée, ils se disent : ‘si le peuple souffre, c’est qu’il n’a pas assez d’argent. Il en faut faire.’ Et comme il n’est pas aisé de multiplier les métaux précieux, surtout quand on a épuisé les prétendues ressources de la prohibition, ‘nous ferons du numéraire fictif, ajoutent-ils, rien n’est plus aisé, et chaque citoyen en aura plein son portefeuille ! ils seront tous riches.'”

Frédéric Bastiat, Maudit Argent

Du A d’Argentine au Z de Zimbabwe, quel est le pays qui est devenu prospère en créant de la monnaie ?

Même en mettant les taux d’intérêt en territoire négatif – la BCE paie les banques pour qu’elles prêtent – l’économie de l’Eurozone ne fait pas de flammes.

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La politique monétaire de la BCE est tout simplement inepte. Elle ruine l’épargne, la richesse déjà créée, en la dissolvant dans la fausse monnaie.

Cette fausse monnaie sert à masquer l’insolvabilité de nombreux gouvernements, à les encourager dans toujours plus de ruineuses et vaines dépenses publiques.

Ce crédit bidon sert aussi à masquer l’insolvabilité de nombreux maillons de l’industrie financière (des amis de M. Peter Praet) et à préserver de la faillite des entreprises non rentables.

Il est étrange que des gens arrivés à un tel niveau ignorent des vérités que n’importe qui peut toucher du doigt dans sa vie quotidienne :

  • La consommation n’enrichit pas, elle n’est – éventuellement – qu’un signe extérieure parmi d’autres possibles (comme par exemple l’épargne) d’un niveau de vie.

  • La fausse monnaie n’enrichit pas.

  • Seul, le profit enrichit et peut augmenter la richesse réelle.

  • Le profit consiste pour un vendeur à échanger un produit ou un service plus cher que son prix de revient. Evidemment cela suppose que l’acheteur soit consentant et libre d’aller voir la concurrence et estime faire une bonne affaire.

Tout cela n’a strictement rien à voir avec les magouilles et le charabia de la BCE.

Un rapide examen du parcours professionnel de Peter Praet montre que ce docte personnage est passé du FMI à l’enseignement, à la banque commerciale, au cabinet du ministre belge des finances, à la Banque nationale de Belgique, retour à l’enseignement, avant d’être nommé économiste en chef de la BCE en 2006.

Quand a-t-il travaillé à fournir un produit ou un service dans un secteur exposé à la concurrence, produit ou service que les gens auraient été contents d’acheter ? Quand a-t-il créé de la vraie richesse ?

Plus sérieusement, la BCE prépare actuellement l’opinion à plus de tout ce qui n’a pas marché jusque-là.

Nous allons assister à une fuite en avant généralisée dans la gestion de toutes les grandes devises.

Etrange coïncidence, nous apprenons que l’investisseur suisse contrarien légendaire, Marc Faber, a acheté du bitcoin à la fin du mois de février.

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Peter Praet a son idée, sur le bitcoin :

“La technologie sur laquelle il repose paraît prometteuse pour beaucoup d’industries. Mais Bitcoin n’est pas une monnaie.”

Peut-être que Bitcoin n’est pas une monnaie. On aurait d’ailleurs apprécié que cette opinion soit justifiée, les arguments de Peter Praet aurait permis de voir s’il considérait que l’euro délivrant des taux d’intérêt négatif était lui-même une monnaie.

Mais, sans être une monnaie, peut-être que le bitcoin serait un refuge contre les folies de Peter Praet et de la BCE ?

Marc Faber doit avoir son idée sur la question. Il recommande depuis longtemps d’investir dans des actifs qui sont hors du contrôle des banquiers centraux et confie acheter de l’or physique tous les mois pour protéger son portefeuille. Il déconseille en revanche de détenir des liquidités.

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Pour plus d’informations et de conseils, c’est ici et c’est gratuit

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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