Le retour du consommateur

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Par Julien Manceaux Modifié le 3 juillet 2020 à 13h07
Consommation Unsplash
98%La consommation par les ménages de biens durables est revenue à 98% de son niveau d'avant le confinement.

Les ménages français semblent avoir fait des folies en matière de dépenses durant la deuxième quinzaine de mai, certaines catégories de dépenses rattrapant leur moyenne d'avant la crise. Ce rebond rapide pourrait atténuer la contraction du PIB au deuxième trimestre de l'année et pourrait - si elle se poursuit - laisser présager un rattrapage rapide au troisième trimestre.

Le confinement laisse place au shopping

En mai 2020, les dépenses de consommation des ménages français ont rebondi après avoir atteint un plus bas niveau historique en avril. Par rapport à un niveau d'avant la crise défini comme la moyenne de septembre 2019 à février 2020, les dépenses d'avril avaient baissé de 33%. Cela allait de -77% pour les dépenses de matériel de transport à +4% pour les dépenses alimentaires. La consommation d'énergie avait baissé de 34%.

Avec la fin du confinement et la réouverture de la plupart des magasins dans la seconde moitié du mois de mai, les dépenses des ménages sont revenues à 91% de leur niveau d'avant la crise, et n'ont baissé que de 7,2% par rapport à février. Comme ce rattrapage s'est concentré sur les deux dernières semaines de mai, cela signifie qu'à la fin du mois, les dépenses des ménages en biens sont revenues à leur niveau d'avant-crise (graphique en pièce jointe).

Le rattrapage n'est pas uniforme

Bien entendu, certaines catégories de dépenses ont rebondi plus que d'autres. En particulier, les biens durables des ménages, qui étaient 60% en dessous de leur niveau d'avant la crise en avril lorsque la plupart des magasins étaient fermés, se sont rattrapés, à 98% de leur niveau d'avant-crise. Les dépenses pour les produits manufacturés sont revenues de 66% à 85% de leur niveau d'avant-crise. Dans le même temps, comme la plupart des services de restauration étaient encore fermés en mai, les dépenses alimentaires ont continué de progresser et étaient 4% plus élevées qu'avant la crise. À l'inverse, les dépenses en matériel de transport sont restées 27% inférieures aux niveaux d'avant-crise. Les nouvelles subventions pour l'achat de nouvelles voitures électriques devraient contribuer à un rattrapage dans les mois à venir.

Trop beau pour être vrai ?

Le fait que la moyenne de mai 2020 semble si proche des niveaux d'avant la crise signifie en substance que les dépenses avaient rattrapé ces niveaux dès la fin du mois. En effet, le confinement ne s'est terminé que le 18 mai, et la levée des mesures n' a été que progressive. Cela semble remarquablement rapide.

D'un côté, le fait est là, et il a déjà été souligné dans les récentes enquêtes sur la confiance des consommateurs qui indiquent quen juin le rattrapage des dépenses pourrait déjà atténuer la profondeur de la récession anticipée au deuxième trimestre de l'année et est certainement un bon signe pour le troisième trimestre.

D'un autre côté, il reste à savoir si ces niveaux de confiance et de dépenses pourront être maintenus une fois les vacances terminées et avec elles l'euphorie d'une liberté de mouvement retrouvée alors que le risque du chômage va rester bien présent. Il donc est probable que nous assisterons à un retour à des comportements d'épargne et de consommation plus prudents après l'été. En tout cas, les chiffres d'aujourd'hui confirment le fait que le rebond de l'activité au troisième trimestre sera principalement porté par la consommation des ménages. Nous prévoyons que la croissance atteindra 45% du QoQ annualisé au troisième trimestre, ce qui devrait permettre à la récession de 2020 de rester au sud de 10%. En attendant, il n'est pas exclu que le second trimestre soit moins mauvais qu'attendu, si les ménages continuent de faire le course en dépit du virus.

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Julien Manceaux est Senior Advisory Economist chez ING. Il travaille depuis plus de dix ans dans l’équipe Eurozone de la recherche économique d’ING à Bruxelles et suit plus particulièrement les développements macroéconomiques en France. Pour ING, il est également spécialiste des questions de commerce international et de stratégies d’exportations, d’immobilier et d’épargne. Après deux mastères en économie appliquée, Julien vient de terminer le global EMBA de la prestigieuse IESE business school de Barcelone afin d’être au plus près des préoccupations stratégiques des clients d’ING, notamment en matière d’innovation.

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