Quels risques pour les entreprises face à l’essor de l’impression 3D ?

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Par Ronda Majure Modifié le 27 février 2017 à 14h56
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26,5 MILLIARDS $Le secteur de l'imprimante 3D pourrait peser 26,5 milliards de dollars en 2021.

Il n’est pas si éloigné le temps où il sera pour une marque de publier le plan numérique d’un produit sur une plate-forme web ; par exemple le plan d’une pièce détachée automobile que le client n’aura qu’à choisir. Puis il sélectionnera un fabricant et se fera expédier directement la pièce. Ce n’est là qu’un exemple des formidables possibilités qu’offrira à l’avenir le monde de l’impression en trois dimensions (3D).

Mais ces opportunités peuvent rapidement se transformer en menaces si les marques ne prennent pas conscience des effets que l’impression 3D peut avoir sur leurs droits de propriété intellectuelle. Les entreprises doivent dès à présent déterminer les répercussions de l’impression 3D et les risques réels qu’elle représente à travers le vol de propriété intellectuelle et autres abus.

L’impression 3D ouvre de nouveaux horizons

Egalement appelée fabrication additive ou prototypage rapide, l’impression 3D englobe sept procédés industriels différents et paraît appelée à transformer entièrement les processus traditionnels de fabrication dans de nombreux secteurs clés. Des produits qui sont fabriqués depuis longtemps par des méthodes telles que l’injection dans des moules ou l’estampage de métal peuvent désormais être obtenus par le dépôt de couches successives de matière suivant un plan numérique 3D créé dans un logiciel. Nous ne sommes qu’au tout début d’une ère où il sera possible de produire des formes complexes et détaillées au moyen de systèmes relativement bon marché et simples d’utilisation, y compris par des particuliers à domicile.

L’impression 3D pourrait avoir un impact considérable sur les entreprises. De fait, selon l’étude Wohlers Report 2016, le secteur mondial de l’impression 3D a généré 5,2 milliards de dollars en 2015 (+70%) et pourrait atteindre 26,5 milliards de dollars en 2021. Sa croissance initiale devrait être alimentée par la disponibilité de modèles grand public bon marché d’imprimantes et de scanners 3D, éliminant la nécessité de logiciels spécialisés ou de compétences en design pour la création de fichiers prêts à imprimer.

Pour autant, la nature même de cette technologie révolutionnaire, qui permet de créer et de copier des objets tridimensionnels, soulève des questions sur les éventuelles infractions à des marques déposées, droits de reproduction, brevets, conceptions et droits à l’image. Les risques sont bien réels pour les entreprises. Tandis que des analystes ont publié des prévisions optimistes sur les retombées financières de cette tendance en plein essor, le cabinet Gartner estime pour sa part à 100 milliards de dollars en 2018 les pertes annuelles causées en matière de propriété intellectuelle par l’impression 3D.

Quelles sont les menaces liées à l’essor de 3D ?

Les principaux risques sont liés à l’émergence de lieux tendance comme des « maker espaces » ou encore « Fab Lab », qui consistent à mettre à la disposition des consommateurs des ateliers où ils peuvent dessiner leurs objets puis les faire imprimer sur place ; encore des sites Internet où ils ont la possibilité d’envoyer leurs fichiers 3D pour impression. Il existe par ailleurs divers sites de partage de fichiers, souvent sous le couvert de l’anonymat, permettant aux utilisateurs de s’échanger des contenus numériques, notamment des fichiers pour imprimante 3D.

Les entreprises les plus menacées sont celles dont les produits présentent une marque ou un habillage bien connu. Par exemple, un utilisateur peut « imprimer » un accessoire pour mobile portant le logo de l’appareil auquel il est destiné, une pratique de plus en plus courante dans les ateliers et sur les sites d’impression 3D. Les fabricants doivent se préparer à la perspective de voir apparaître des objets arborant leur marque mais n’égalant pas le niveau de qualité du produit authentique, au risque d’entacher la réputation de la marque et d’entamer la confiance des consommateurs dans la qualité de ses produits.

Ces exemples ne sont peut-être que la partie visible de l’iceberg sur les risques potentiels de l’impression 3D. Parmi les autres droits de propriété intellectuelle mis en péril, intentionnellement ou non, figurent des produits soumis à un copyright ou une licence et relativement faciles à copier, les objets dont le principe de fonctionnement ou le design est protégé par brevet et pourrait être dupliqué sans autorisation ; voire le droit à l’image des célébrités en cas de représentation tridimensionnelle de leur personne.

Quelle protection mettre en place ?

Face à un tel éventail de menaces se profilant sur le paysage de l’impression 3D, la question demeure : comment les entreprises peuvent-elles s’en protéger ? La première étape fondamentale est la compréhension des véritables capacités offerte par cette technologie. L’impression 3D est apparue à la fin des années 80 mais ce n’est qu’avec les récents progrès rapides de la technologie qu’elle est devenue plus accessible et abordable pour une utilisation au quotidien par des particuliers. Le prix des machines s’échelonne de 5000 à 5 millions de dollars. Les modèles haut de gamme offrent un niveau de sophistication et de fonctionnalités sans précédent dont les entreprises doivent prendre pleinement conscience pour en mesurer l’impact.

Pour commencer, les entreprises peuvent dédier une équipe à la veille et l’exploration des principaux aspects de l’impression 3D afin de savoir comment celle-ci peut être utile ou, au contraire, nuire potentiellement à l’entreprise, et comment elle peut s’ancrer plus profondément dans le secteur. Dans un deuxième temps, nous conseillons de rechercher sur les espaces en ligne, de cas d’infractions telles que des utilisations illicites de marques voire des contrefaçons. Cependant, il peut se révéler difficile de faire respecter les droits des marques, en particulier si les faussaires se servent d’imprimantes 3D miniatures.

Une autre solution peut être de cibler les autres parties impliquées, par exemple les responsables de l’envoi sur des sites d’échange de fichiers 3D permettant de créer des produits contrefaits. Enfin, les marques peuvent même être tentées de s’attaquer directement aux fabricants d’imprimantes 3D mais il leur faudrait alors produire les preuves d’un encouragement ou d’une incitation à la contrefaçon.

Que tirer des nouveaux modèles économiques ?

Une approche plus proactive consisterait pour les entreprises à voir dans l’impression 3D une opportunité d’adopter de nouveaux modèles de distribution et de nouvelles stratégies d’engagement. Par exemple, une marque pourrait très bien proposer des fichiers de conception authentiques et agréés, afin que les consommateurs les impriment eux-mêmes sur leur propre imprimante 3D, et mettre des plans numériques à disposition sur une plate-forme web. Certaines des plus grandes marques mondiales ont d’ores et déjà lancé leur stratégie d’impression 3D. En cas de réussite, elles serviront d’exemples à d’autres marques qui franchiront le pas avec leurs propres modèles innovants de marketing et de distribution.

Face aux formidables opportunités que la révolution de l’impression 3D peut offrir aux marketeurs comme aux utilisateurs, il existe pourtant un profond impact sur les marques, dont les produits protégés par des droits de propriété intellectuelle ou autres peuvent être reproduits et distribués sans autorisation. Les marques doivent en avoir conscience et se préparer à ce bouleversement technologique en élaborant une stratégie qui les protège contre les risques de l’impression 3D, tout en mettant à profit les opportunités qu’elle présente. L’économie semble se rapprocher encore un peu plus d’un monde en self-service où les consommateurs pourraient en toute simplicité « imprimer » leurs propres produits et où seules survivront et prospéreront les marques pleinement préparées à l’impact de impression 3D et capables de s’y adapter.

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Vice Président de Compumark, une marque de Clarivate Analytics.

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