Alzheimer, la dette publique et la croissance en panne

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Par Daniel Moinier Modifié le 22 juillet 2014 à 5h52

Une nouvelle étude française établit un lien direct et très significatif entre l'âge du départ à la retraite et le risque de développer une démence.

Une étude scientifique publiée dans l'European Journal of Epidemiology , élaborée à l'initiative d'ILC France (International Longevity Center France) en collaboration avec C.Dufouil (Inserm U697, Université de Bordeaux), vient de conclure que plus on prend sa retraite à un âge avancé, moins on risque de développer une maladie d'Alzheimer ou tout autre type de démence. "Il est donc admis aujourd'hui que la stimulation intellectuelle pourrait prévenir la démence ou différer sa survenue." Et encore plus si cette activité est attachée à une activité professionnelle ou équivalente.

Cela fait déjà quelques années, que des études avaient abordé cette relation de cause à effet. Mais la dernière s'est appuyée sur une enquête portant sur 429.083 personnes, donc bien étayée, a dégagée de solides résultats, Ceux-ci sont évocateurs : A chaque année supplémentaire de travail, soit un départ différé en retraite, le risque de contracter de telles pathologies diminue de 3,2 %. C'est-à-dire qu'avec cinq années de travail de plus, ce serait une diminution de 16 % du risque de développer une démence dans le futur.

Il est vrai que le départ en retraite constitue souvent une cause de diminution de reconnaissance sociale, alliée à une perte de repères et de motivation. C'est un argument de plus pour ceux qui militent en faveur de l'augmentation de la durée d'activité dont je fais partie depuis longtemps. Pas spécialement pour enrayer cette maladie, mais pour remettre notre pays sur le droit chemin.

Par contre, cette donnée ou information risque de ne pas plaire à tout le monde. Les résistances sont fortes lorsqu'il faut faire bouger les acquis. Les esprits ne sont pas ou peu préparés à un tel changement. Même si c'est pour sauver des vies ou retarder des échéances difficiles, le message risque de passer difficilement. Nos politiques n'ont jamais eu le courage d'informer nos concitoyens de ce qui était la cause réelle de notre endettement, de nos difficultés. Certains pays l'ont fait, par exemple les pays nordiques. Chez eux les mentalités, le raisonnement social et économique sont à des années lumière de ceux de l'Europe occidentale et particulièrement la France. Exemple, la Suède et de l'Allemagne, avec une durée d'activité supérieure à celle de la France, ont un taux d'Alzheimer de moins de 1 %, alors que la France, avec ces départs en retraite entre 60/62 ans, se situe à plus de 1,2 %.

Si l'on reprend le sujet principal de cet article, voyons quelles conséquences économiques et financières pourraient engendrer un tel changement.

Au préalable, il est bon de connaître les données françaises, européennes et même mondiales.

En France, l'étude « PAQUID » a fait ressortir que 18 % des personnes de plus de 75 ans sont atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de démence. Sachant qu'en plus, 35.000 personnes de moins de 65 ans sont également répertoriées.

La maladie d'Alzheimer touche environ 1 % des personnes âgées de 65 ans à 69 ans, 20 % des personnes ayant de 85 ans à 89 ans et 40 % des personnes ayant de 90 ans à 95 ans. On estime que 1 homme sur 8 et 1 femme sur 4 en souffrira au cours de leur existence. Dans la mesure où les femmes vivent plus longtemps, elles sont plus susceptibles d'en être atteintes un jour.

Le Dr Alois Alzheimer, un neurologue allemand, a donné son nom à la maladie, en 1906. Il est le premier à avoir décrit ces lésions cérébrales, lors de l'autopsie d'une femme morte de démence. Il avait observé dans le cerveau de celle-ci des plaques anormales et des enchevêtrements de cellules nerveuses désormais considérés comme les signes physiologiques principaux de la maladie d'Alzheimer.

En France, la maladie d'Alzheimer et les syndromes apparentés toucheraient plus de 900.0 000 personnes. On estime à plus de 225 000 le nombre de nouveaux cas chaque année et près de 16 000 décès par an. Autre critère plus alarmant ; une augmentation de 14 % ces 3 dernières années. En Europe, on en dénombre 6,4 millions et dans le monde 36 millions. Si l'on se projette en 2050, les chiffres deviennent impressionnants : 3,6 millions en France (certainement sous-estimé), 36 millions en Europe et environ 115 millions dans le monde.

Le coût global constitué par les aides de l'État et des familles atteint environ 11 milliards par an. Si l'on envisage une augmentation de la durée d'activité de un an, on économiserait plus de 400 millions par année. Sans compter le temps passé par les proches, équivalent à près de 7 heures jour par famille concernée. On peut rajouter encore toutes les années perdues pour ceux qui sont atteint avant 60 ans.

Alors que le moment de la cessation d'activité professionnelle fait l'objet de nombreuses discussions et polémiques, les scientifiques estiment que les politiques devraient prendre en compte ces résultats ainsi que les défis sociétaux et économiques de la longévité. Un argument de plus très convainquant, qui devrait faire réfléchir notre Gouvernement, et sur lequel il pourrait s'appuyer pour aborder l'augmentation de la durée d'activité beaucoup plus loin et plus vite qu'il l'a fait en 2013 (Reforme des retraites, mise en application officielle le 21 janvier 2014).

Il est bon de rappeler que chaque année travaillée en plus pourrait ramener plus de 70 milliards supplémentaires dans l'économie. Détail : 30 milliards de salaires, 13,5 milliards de charges, 18 milliards de perte de pouvoir d'achat, 11,5 milliards de retraites payées en plus. A cela pour chaque année passée, il faudrait rajouter un supplément de 40 % d'impôts (différence entre salaire et pension).

Autre loi qui a encore fortement aggravée les comptes de l'État, et par ricochet la possible augmentation du nombre de cas de démence, c'est l'augmentation des départs anticipés. Cette modification devrait porter le nombre total de départs anticipés à près de 145.000 cette année (+64 %). Ces derniers représenteront ainsi 20,2 % du flux de départs. Une proportion quasiment 3 fois plus importante qu'en 2011 (7,3 %).

Décision politique qui a été complètement à l'encontre de la réduction des déficits, de la relance de la consommation, de l'économie. Ce qui a certainement retardé l'atteinte des moins 3 % de déficit, et obligé François Hollande à négocier avec Bruxelles un décalage de 2 années supplémentaires. Un niveau de déficit qui malgré cela, sera encore très difficilement atteint !

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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