Sur la Terre et nulle part ailleurs

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Par Philippe Bapt Modifié le 16 novembre 2018 à 14h42
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Philippe Gildas ce grand monsieur

A mon grand âge, que les moins de vingt ans…. Je me remémore parfois ce qu’était la télévision française avant. Dans les années 80, trois chaines. Jusqu’en 1984. Bon, loin de moi l’idée de me transformer en petit historien du PAF, juste me reviennent, alors que Philippe Gildas s’en est allé rejoindre Coluche et les autres, ces émissions dont on parlait dans la cours du collège. Les débuts des guignols, le Top 50, l’extraordinaire mue de De Caunes et l’émergence de talents de José Garcia, aux Nuls,… jusqu’au duo Solo-Le Bolloc’h ; j’en oublie.

Malgré la crise, à l’époque (1986) la barre symbolique des 2,5 millions de chômeurs venait d’être franchie en France, la télévision, principal média de masse se démocratisait. Des programmes de qualité et des programmes populaires apparaissaient, plus en symbiose avec la demande populaire.

Les politiques promettaient encore de meilleurs jours, le RPR de Jacques Chirac sortait son affiche « Vivement demain » et « Demain nous appartient ! » en vue des échéances législatives de 1986.

Alors que la guerre froide, en cours il y a trente ans encore, vivait ses dernières heures, que la Communauté Economique Européenne s’agrandissait avec l’entrée de l’Espagne et du Portugal, qu’une certaine réconciliation post seconde guerre mondiale avait été scellée par le « main dans la main » Mitterrand-Kohl, le souffle de culture de ces années-là ne suffit pas apaiser la société. La libéralisation de la bande FM et des canaux hertziens, les grands travaux entrepris, ne viendront jamais combler un certain déclin économique de notre pays depuis la faste période des « trente glorieuses ». Notre pays changeait peu à peu, et même le ton canal, cher à Philippe Gildas, ce fin mélange d’information et de divertissement, cet irrespectueux respect, ne donnera plus jamais la pêche aux français.

L’un des grands messieurs des médias français s’est donc éclipsé. Presque sur la pointe des pieds, lui à qui le landernau doit tant. Lui, on le sait que trop peu, à qui on doit quasiment la fondation des « Restos du Cœur ». Bref, au revoir l’artiste !

Le dégagisme en France, en Europe et dans le monde

De déconvenues économiques aux affaires troubles, les politiques ont beaucoup déçu. Soit ils nous vendaient du rêve sémantique, avec la « fracture sociale » de Jacques Chirac, soit du rêve de jouvence de Nicolas Sarkozy, soit un mini-rêve de grand soir, avec «  mon ennemi c’est la finance » de François Hollande. Certains diront que le « en même temps » d’Emmanuel Macron est aussi un rêve vendu en 2017.

Sauf que le phénomène de dégagisme n’est pas né par hasard. A la volonté des citoyens de voir sortir du champ politique les mêmes qui squattaient tous les postes depuis l’après-guerre, est venue s’ajouter le sentiment persistant de déconvenue permanente. Outre les errements sur le volet économique, le manque de transparence dans la vie politique alors que les affaires de corruptions et autres fraudes fiscales n’ont pas cessées depuis les années 80, ont peu à peu décrédibilisé le monde politique. A cela, on ajoute l’escroquerie démocratique du référendum sur la constitution européenne de 2005, avec la signature en 2008 du traité de Lisbonne passant outre la décision souveraine des citoyens français… et voilà le parfait cocktail pour voir émerger une hydre à deux têtes extrêmes : Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon.

Ceci pour résumer en peu de mots, je l’admets, 35 ans de vie politique française. Mais cette impression de déconvenue permanente n’est pas seulement ressentie seulement en France. Je ne peux m’exprimer totalement pour d’autres pays, européens ou plus généralement dans le monde, cependant la crise de 2008 a laissé des traces indélébiles dans l’esprit de beaucoup de citoyens. Qu’il s’agisse de l’élection de Donald Trump en 2016 ou, en 2015, de la maire de Barcelone Ada Colau Ballano proche du mouvement Podemos, puis en Italie de la coalition « 5 étoiles-Ligue du Nord », et maintenant l’élection de Jair Bolsonaro au Brésil, ce vent de dégagisme est mondial.

La première question à se poser : lorsque je lis les informations au sujet du Brésil, lorsque j’en lis au sujet des Etats-Unis, pourquoi le faire avec ma grille de lecture de citoyen français ? Bien sûr, personne ne peut, ni ne doit être d’accord avec des candidats au langage outrancier, volontiers homophobe et xénophobe….Et pourtant !

Et pourtant aux Etats-Unis, même à mi-mandat, le résultat des élections intermédiaires, avec un taux record de participation en net progression (50% contre 37% en 2014), confirme pour beaucoup la confiance de citoyens américains envers leur président et sa politique. Barack Obama avait dû composer en 2010 et 2014 lors des midterms de ses deux mandatures.

Plus que de beaux discours, plus que de seuls symboles, chaque citoyen de tout pays attend des actes. La santé de l’économie est primordiale. En ce sens, beaucoup des résultats électoraux de ces derniers mois s’expliquent.

Tiens, nous rendons nous compte que l’on est passé du drame de Marseille avec plusieurs morts quasi assassinés pour manque d’acte à une polémique relayée à la même importance sur les paroles d’Emmanuel Macron à propos de Philippe Pétain ? (type de paroles quasi identiques à celles tenues en 1966 par le président de la République de l’époque à l’occasion du cinquantenaire de la bataille de Verdun) ….Du manque d’acte criant qui mérite bien plus tant le drame est patent à la polémique politicienne stérile…

Le dégagisme ambiant et le populisme connexe à ce phénomène s’expliquent donc par les espoirs déçus, les déconvenues économiques successives doublés par une distance croissante entre personnel politique et peuple, ressentie par les citoyens. Ne nous leurrons pas, cet abysse est aussi lourdement perçu par les élus locaux. Combien de maires ont rendu leur tablier ? Combien ne souhaitent pas se représenter ? Combien souffrent à vouloir bien faire avec toujours moins ?

En attendant le rebond de l’économie

En 2017, le phénomène En Marche a permis d’endiguer cette montée de colère électorale. Le manque de résultat, de nette amélioration socioéconomique et pour finir le mépris de classe tel celui de Benjamin Griveaux pour les «gars qui fument des clopes et roulent au diesel» signeront l’arrivée comme partout de cette vague populiste en France.

Depuis juin 2017, les écuries politiques en charge de fournir les futurs vainqueurs des grand prix électoraux se sont-elles remises en cause ? Non ! Elles ont implosé ou tanguent fortement tant leur logiciel doctrinal n’avait jamais envisagé ce bug politique.

Mais les citoyens le voient. Ils voient et jugent les gesticulations stériles des uns et des autres sur tous les plateaux télés. Ils voient et jugent localement l’ensemble de leurs concitoyens qui s’engagent et donnent de leur temps et énergie pour les autres à l’aune des contorsions sémantico médiatiques des « têtes d’affiche ». Quel gâchis !

Reveillez-vous ! Le dégagisme peut s’endiguer ! Le dégagisme doit être endigué ! Les ras le bol induits soit par le fait que depuis mardi 6 novembre, à 15 h 35, les Françaises travaillent pour rien (inégalité salariale), soit par la hausse des carburants ou soit par une baisse du pouvoir d’achat pour certains ne font qu’accentuer ce « tousdehors-tisme ». 41% des français sont prêts à être dirigés de façon autoritaire désormais….quel recul intellectuel, mais dû à qui ?

La situation n’est certes pas facile et toute décision a son revers. Mais sans retournement de l’économie en France, une baisse sensible du chômage, des corps intermédiaires qui se modernisent, aucun gouvernant fusse-t-il de la Vème ou VIème République ne trouvera grâce aux yeux des citoyens ! Le malheureux exemple Donald Trump le prouve : car le soutien à l’économie et un chômage assez bas effacent finalement les travers horribles de langage du président Trump.

Le populisme ayant pour raison d’être populaire, tant que l’économie des pays cités, plus haut en exemple, se portera mieux, le reflet de leur plus haut représentant sera celui du citoyen moyen du pays : une façon de se libérer du politiquement trop correct…mais surtout improductif d’effet bénéfique !

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Philippe BAPT est un communicant. Diplômé de Novancia Business School en management marketing digital et événementiel, il exerce sa passion comme chargé de communication et consultant chargé de projets. Sa seconde passion la « chose publique » l’amène très tôt dans le champ associatif : social, culturel et sportif. Puis il sera élu local d’une commune de la première couronne de la ville rose de 2008 à 2014. Président de club de rugby, puis d’un groupement d’employeurs et administrateur d’un théâtre-centre culturel, ces différents postes lui confèrent  une expertise dans ces domaines. Retiré du strict jeu politique, il n’en demeure pas moins attentif à l’évolution de l’actualité et devient éditorialiste dans divers médias locaux et régionaux, dès la rentrée 2014. Ses sujets de prédilection : le « jeu » politique, les répercussions économiques et sociales, la recomposition du paysage politique français. 

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