Pour Jens Weidmann (Bundesbank), si les taux remontent, les dettes ne seront plus supportables !

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Par Charles Sannat Publié le 20 septembre 2016 à 9h55
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97,9%La dette de la France pourrait atteindre 97,9 % du PIB en 2017 selon le FMI.

« Si les taux remontent, les dettes ne seront plus supportables » vient de déclarer Jens Weidmann, le gouverneur de ce qu’il reste de la banque centrale allemande… Et pourtant, ils vont monter !

Pas forcément en Europe dans un premier temps, mais aux États-Unis certainement. On vous servira pour justifier ces montées de taux un discours plein d’âneries sur le retour de la croissance, les risques du retour de l’inflation ou encore le retour du plein emploi et les tensions sur les salaires… Néanmoins, rien de tout cela n’est vrai. On vous enfumera derrière un écran de fumée pour vous cacher l’essentiel, et l’essentiel est assez simple.

Gagner du temps à tout prix !

Voilà le seul objectif possible ou cohérent. Je n’ose imaginer que la FED, la banque centrale US, ne relève ses taux vers des niveaux du genre 7 ou 8 % car si cela était fait, alors la seule et unique explication serait une volonté suicidaire d’effondrement économique.

Bien que le pire ne puisse jamais être exclu et que ceux qui nous dirigent peuvent avoir parfois des comportements à la limite de la psychopathie (pour ne pas dire plus), cette possibilité, vous m’avez compris, n’a pas ma préférence. D’ailleurs, depuis maintenant presque 4 ans, la FED annonce qu’elle va monter les taux sans jamais vraiment oser le faire.

Bref, gagner du temps. Voilà l’objectif. Or avec des taux 0 ou négatifs, on voit bien qu’économiquement on casse le prix maître de tous les autres prix, à savoir le prix de l’argent. Vous devez bien comprendre que tous, absolument tous les prix découlent du prix de l’argent, à commencer par vos choix d’investissement qui sont directement corrélés au prix de l’argent. Si vous pouvez emprunter pas cher et louer un appartement un peu plus cher, alors vous achèterez de l’immobilier. C’est la même chose pour les actions et, de façon générale, pour tous les choix d’investissements et de placements.

La conséquence la plus visible de l’argent gratuit c’est la constitution de bulles spéculatives dans presque toutes les classes d’actifs. C’est aussi l’absence totale de rendement qui finit par menacer la stabilité des banques et des compagnies d’assurance que ces mêmes taux bas étaient censés sauver. Bref, le remède devient dangereux.

Il faut donc monter les taux et accessoirement sauver aussi le système de retraite par capitalisation basé sur les rendements obligataires qui tendent donc vers 0.

Pourtant, le gouverneur allemand déclare que si on monte les taux, alors le système explose !

Et c’est également vrai, si l’on monte trop les taux, c’est tout le système qui explose car le système repose sur une pyramide colossale et instable de dettes et d’instruments dérivés de cette dette.

Il faut donc que les banques centrales tentent de trouver un équilibre précaire entre les non taux 0 , donc des taux a priori positifs, idéalement avec un poil d’inflation ce qui rendrait les taux « réels » proches de zéro, mais surtout pas trop hauts pour qu’ils ne mettent pas en péril le système financier et économique qui repose sur les dettes.

Des taux entre 1 et 2 % pourraient sans doute faire l’affaire, éventullement 3 % mais guère plus. Pour mémoire, à 5 % ce sont presque tous les pays qui sont en faillite, y compris la France assise sur plus de 2 000 milliards d’euros de dettes. 5 % de 2 000 milliards, cela fait 100 milliards rien que pour les intérêts et c’est le double du plus gros budget de l’État, à savoir l’éducation nationale…

Oui les taux vont monter mais pas très haut ! Et voici ce qu’il va vraisemblablement se passer.

Donc oui les taux vont monter, non ils n’iront pas bien haut ! Ils vont remonter assez doucement mais un peu plus vite que ce à quoi nous avons été habitués depuis 2014.

Les cours des actions risquent d’être chahutés, mais ils s’en remettront quand tout le monde finira par comprendre que les taux n’iront pas jusqu’au ciel ! La baisse sera comprise entre 10 et 20 % avec des pics de faiblesse, mais les discours rassurants viendront tempérer les débuts de panique.

L’immobilier ralentira d’un poil ou de deux car c’est le secteur le plus sensible, surtout aux États-Unis. En Europe, le resserrement n’est pas pour tout de suite et il y aura sans doute un délai de 18 mois avant que l’Europe ne monte ses taux comme les USA.

Cela veut dire que le dollar ne va pas s’effondrer. Il va s’apprécier, car les taux seront plus favorables aux États-Unis. Mais cela ne devrait pas non plus entraîner une fuite massive de capitaux car il y a un « coût » au risque de change et aux opérations de change. Il faut donc un différentiel de taux suffisamment important pour absorber ces coûts et rendre pertinent d’aller tous placer nos sous en dollars aux États-Unis.

La baisse de l’euro servira notre croissance et nos exportations, mais les importations seront un peu plus coûteuses, notamment le prix de l’énergie. Faites le plein de votre cuve à fioul pour l’hiver…

Les pays émergents vont souffrir, et les dollars risquent de revenir aux USA et de quitter l’Asie… mais les Américains s’en fichent un peu de la « douleur » économique des Chinois.

Comme nous arrivons vers une nouvelle étape de la crise et que nous nous dirigeons vers un nouveau moment de « récession », les autorités monétaires auront tous les prétextes pour justifier un cycle de hausse de taux d’assez faible ampleur.

Enfin, ces hausses de taux vont peser sur l’or évidemment et les matières premières. Ne paniquez pas ! Ce sera justement le moment de vous renforcer pour ceux qui font des achats réguliers, et de vous positionner pour ceux qui ne sont pas couverts par du métal jaune.

Ce sera sans doute le dernier grand mouvement baissier de l’or, car au bout du compte, tout le monde finira par se rendre compte que les taux négatifs tuent l’économie et que des taux plus élevés que 3 % tueraient l’économie également… Ce sera la fin de la grande fiction de la reprise, de la croissance, et de la croyance dans l’efficacité des banques centrales.

Il est déjà trop tard. Préparez-vous !

Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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