Le bac ne coûte pas trop cher, il est surtout décalé

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Par Jean-Yves Archer Modifié le 17 juin 2013 à 5h09

La France est crispée. Marquée par cette montée fulgurante du chômage, par cette crise qui ne veut pas s'estomper et qui draine un flux croissant de déclassement social.

Dans le contexte – à notre avis erroné – d'une forte ponction fiscale à effet pro-cyclique ( il a été versé de l'essence sur le brasier de la crise d'activité), toute dépense publique est rapidement l'objet de polémiques. C'est désormais le cas d'un examen à valeur d'institution : le baccalauréat. L'affaire démarre lorsqu'un syndicat ( SNPDEN-UNSA ) diffuse un chiffrage situant le coût du bac à 1,525 milliard d'euros au lieu de la fourchette officielle située entre 60 à 100 millions.

60 000 candidats non-bacheliers sur 650 000, le bac ne sélectionne pas

Face à une telle différence, il est clair qu'il faut aborder des questions de méthode. L'Etat raisonne en coûts directement imputables là où le syndicat a tenté de reconstituer le coût complet. Autrement dit, il y a d'un côté la charge de l'organisation des épreuves et de l'autre des charges usuellement négligées comme l'annulation de trois semaines de cours pour les lycéens qui induirait une dépense de plus de 1,4 milliard.

A ce stade, il faut savoir raison garder : de toutes les façons ces sommes auraient été engagées ( sauf à rallonger les vacances d'été ! ) En fait, là où le syndicat est en ordre de pertinence, c'est lorsqu'il rappelle deux faits. Sur les 650.000 candidats, seuls 60.000 d'entre eux ne seront pas bacheliers. Cette quasi-non-sélection mérite-t-elle le coût dépensé ?

En second lieu, depuis l'instauration du portail d'affectation ( APB : admission post-bac ) l'enseignement supérieur effectue son recrutement largement sur les fondements du contrôle continu. Vu sous cet angle, le bac compte des procureurs de choix. Ceci nous semble une erreur pédagogique, une approximation technique et une faute identitaire.
L'erreur pédagogique est dénoncée par les spécialistes de docimologie ( science qui étudie les différents moyens de contrôle de connaissances ) qui militent pour un panachage entre le contrôle continu et le caractère plus formel de l'examen.

Le bac actuel a trop d'épreuves et trop d'options, mais une valeur identitaire

Au plan opérationnel, il est réaliste d'avancer que le bac est décalé ( trop d'épreuves, trop d'options ) et qu'il pourrait se focaliser sur un socle de contrôle objectif mais à prétention non exhaustive. Symétriquement, le contrôle continu devrait être mieux encadré ne serait-ce qu'en surveillant l'usage des téléphones portables durant certaines épreuves ou les modalités de discrétion entourant les sujets.

L'approximation technique vient du chiffrage. Il faut être vigilant car on voit mal où serait l'économie – pour le contribuable – si le bac éteint, les lycéens avaient trois semaines de cours additionnels. Soit les programmes resteraient les mêmes ( perte de productivité ), soit ils seraient étoffés ( risques de saturation cognitive ). En toutes hypothèses, l'impôt payé resterait identique.

Enfin, effacer le bac, nous semblerait être la matérialisation d'une faute identitaire. On a supprimé la conscription chère à Jean-Pierre Chevènement et d'autres. Résultat : trois points noirs. Une armée de terre moins étoffée. Un sentiment national édulcoré voire dilué. Une cartographie sanitaire d'une classe d'âge désormais impossible ( addiction, retards moteurs, etc ).

De la même manière, le bac demeure un rempart pour certains employeurs, un objectif pour un ou une jeune qui se focalise sur un but ce qui le rode à la vie professionnelle. Il demeure une fierté pour les familles modestes. Face à ces motifs, le chiffrage du syndicat est probablement exact mais inadéquat.

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Jean-Yves Archer est énarque ( promotion Léonard de Vinci ), économiste et fondateur de Archer 58 Research : société de recherches économiques et sociales. Depuis octobre 2011, il est membre de l’Institut Français des Administrateurs (IFA).  

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