Cour des comptes : la taxe sur les transactions financières doit être remaniée

Anton Kunin
Par Anton Kunin Modifié le 6 juillet 2017 à 14h51
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947 millions d'eurosLe rendement de la taxe sur les transactions financières s'est élevé à 947 millions d'euros en 2016.

La taxe sur les transactions financières, instaurée en France en 2012, n’est pas utile en l’état. Pour être efficace, ce dispositif fiscal doit être remanié, affirment les spécialistes de la Cour des comptes.

La taxe sur les transactions financières (TTF) ne sert pas ses objectifs ! Tel est le constat de la Cour des comptes, qui appelle les ministres de l’Économie et de l’Action et des comptes publics à revoir en profondeur le dispositif. Pensée pour limiter les activités spéculatives, notamment le trading haute fréquence et les acquisitions de contrats pariant sur un défaut d'un État de l'Union européenne, en réalité elle taxe à peine ce type d’opérations.

Les opérations intra-journalières échappent à la taxe sur les transactions financières

Premier objectif de la TTF : les transactions intra-journalières, autrement dit la spéculation. En effet, nombre de personnes achètent et vendent des titres boursiers beaucoup de fois dans la même journée en réalisant des marges sur les différences des prix à l’achat et à la vente. Seul bémol : ce type d’opérations sème la confusion sur le marché, les investisseurs ne comprennent plus si l’action est orientée à la hausse ou à la baisse. Et même la TTF n’y aide pas, car cette taxe ne s’applique que s’il y a transfert de propriété. Car en bourse, les titres sont « livrés » deux jours après la transaction, le transfert de propriété n’est pas immédiat. Difficile en effet du point de vue légal de taxer ce qui ne vous appartient pas : sans donner de leçons, la Cour des comptes se limite donc à engager une réflexion sur le sujet.

Le trading haute fréquence, à peine impacté par la taxe sur les transactions financières

Autre ennemi auquel s’attaquent les auteurs de la TTF : le trading haute fréquence. Bien que rémunératrice, à condition d’avoir un capital important, cette activité boursière perturbe également le marché. Comme l’ordinateur réagit instantanément à l’évolution de la situation, 90 % des ordres (d’achat ou de vente) passés sont tout aussi vite annulés. Un risque de « flash krach », comme celui survenu le 6 mai 2010, est donc présent.

La TTF s'attaque certes à ces activités, mais selon la Cour des comptes, elle va pas assez loin, puisqu’elle ne se déclenche que si la proportion d'ordres annulés ou modifiés dépasse 80 % au cours d'une même journée. Autrement dit, sur 10 ordres passés, un spéculateur peut toujours en annuler 8, sans être redevable de la TTF.

Quant à l’achat à découvert de Credit default swaps (titres pariant sur un défaut d'un État de l'Union européenne), ce type d’opérations, assujetties à la TTF française, est de toute façon interdit par le règlement UE 236/2012 du 14 mars 2012 : seul un achat sur fond propres est aujourd’hui possible. Cette clause dans la loi française est donc sans objet.

Paradoxe : la TTF ne vise pas le secteur financier

Dernier grief de la Cour des comptes : la TTF n’a quasiment pas d’impact sur les courtiers, ces intermédiaires entre le particulier et la bourse, qui poussent souvent les clients à réaliser des opérations spéculatives voire à souscrire au trading haute fréquence. Dès la mise en place de la TTF, les courtiers ont tout simplement fait évoluer leurs tarifs pour répercuter la TTF sur leurs clients. Une démarche qui n’a rien d’illégal aujourd’hui… une situation qui doit changer, selon la Cour des comptes !

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Anton Kunin

Après son Master de journalisme, Anton Kunin a rejoint l'équipe d'ÉconomieMatin, où il écrit sur des sujets liés à la consommation, la banque, l'immobilier, l'e-commerce et les transports.

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