Déconfinement : la téléconsultation, un réflexe durable ?

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Par Mathilde Le Rouzic Modifié le 24 juin 2020 à 5h11
Ordinateur Medecin Telemedecine
10%10% des Français ont téléconsulté pendant la période de confinement.

Avant le confinement, seuls 2 % des médecins pratiquaient la téléconsultation. L’épidémie du Covid-19 a complètement changé la donne : désormais, un libéral sur deux a rejoint ces « early adopters ». Ce passage brutal d’un usage anecdotique à une démocratisation massive s’explique notamment par une demande pressante d’outils performants, faciles à utiliser, permettant de limiter la propagation du virus en réduisant les contacts humains.

Ainsi, le volume de téléconsultations a été multiplié par 100 durant cette période, passant de 10 000 par semaine début mars, à plus d’un million par semaine fin avril. De quoi ancrer la téléconsultation durablement dans les usages des patients et des médecins ?

Comment le confinement a dopé la transformation digitale

La transformation digitale de la relation médecin-patient s'est faite à marche forcée durant le confinement. Les cabinets désertés par les patients ont permis aux praticiens de prendre le temps de s'équiper et de se former à ces nouvelles pratiques, et leur ont également offert l’occasion de compléter leurs revenus face à un chiffre d’affaire qui avait chuté pour certains de 60 %.

Cette transition contrainte est néanmoins une bonne nouvelle : cette période a été celle de la découverte de la téléconsultation. Ainsi, de nombreux médecins ont profité du confinement pour mettre un pied dans la téléconsultation et, finalement, dépasser leurs freins, notamment organisationnels. En effet, de nombreux médecins n'avaient pas pu dédier le temps indispensable à la mise en place de cette pratique avant le confinement. Les professionnels ont dû apprivoiser l'outil pour se sentir suffisamment à l'aise le jour de leurs premières téléconsultations.

Une nouvelle organisation est alors née : rapidement, la consultation vidéo a été adoptée notamment pour les cas ne nécessitant pas d'examen clinique (renouvellement d'ordonnance, lecture de résultats d'examens, suivi au domicile du patient sans déplacement, etc.).

Côté patients, le déclic est venu de la simplicité d'usage et du service rendu dans une période où ils étaient réticents à sortir de chez eux. Les chiffres d'usage présentés par l'Assurance Maladie montrent bien à quel point ces freins ont été levés : 1 Français sur 10 a eu recours aux consultations en ligne depuis le confinement, et 30 % sont prêts à y recourir plus souvent à l’avenir. De là à changer l’image de la consultation à distance et d’en démocratiser la pratique après le confinement ?

Un avenir serein pour la téléconsultation ?

Le chiffre record d'un million de téléconsultations par semaine a été enregistré en avril, contre 60 000 téléconsultations prises en charge en 2019. Si l'usage de la téléconsultation a légèrement baissé par rapport à son pic fin avril, il est raisonnable de penser que les professionnels continueront à utiliser ces outils, aussi bien en anticipation d’un risque d’une seconde vague épidémique, que grâce à l’implémentation d’un nouveau réflexe acquis lors du confinement.

En revanche, si l’on veut que l'usage de la téléconsultation se maintienne et que son développement soit réellement efficace sur le long terme, la question du modèle de prise en charge par l'Assurance Maladie ou les assurances complémentaires santé devra être adressée.

En effet, les conditions pré-confinement de prise en charge étaient complexes à appréhender, car il fallait respecter un parcours strict : une consultation vidéo avec son médecin traitant, qui doit avoir réalisé un examen clinique au cabinet médical au moins une fois dans les 12 mois précédents. Il existait quelques exceptions, mais le principe général n'encourageait pas à utiliser ce canal de consultation par peur d'une absence de prise en charge.

Si ces conditions ont été assouplies durant le confinement, Il faut néanmoins faciliter les conditions de remboursement des téléconsultations des patients les plus éloignés des soins, tels que les assurés sociaux sans médecin traitant, les assurés sociaux résidant en zone d’intervention prioritaire (ZIP), les bénéficiaires de la CMUc et de l’AME ou encore les assurés sociaux de moins de 16 ans. Dans ce sens, il est peut-être pertinent d'étudier l'impact d'un assouplissement des conditions de prise en charge de la téléconsultation, pendant une durée définie afin d’évaluer les avantages d’une prise en charge élargie.
L’épidémie du Covid-19 a fortement poussé la transformation digitale, et la médecine ne fait pas exception à la règle. Alors qu’elle cherche à s’imposer depuis quelques années, la téléconsultation semble enfin avoir trouvé ses patients et convaincu les Français, plutôt favorables à cette pratique, qui n’hésitent pas à réitérer l’expérience.

Si la prescription de tests de dépistage en téléconsultation est un moyen à court terme pour maintenir la téléconsultation dans les usages, le véritable levier pour l’installer durablement réside dans le modèle économique de la téléconsultation, donc dans le remboursement par l'Assurance Maladie, dans la formation des professionnels et dans la capacité des éditeurs tierces à proposer une expérience utilisateur qui soit la plus fluide possible, pour les médecins, comme pour les patients.

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Mathilde Le Rouzic, co-fondatrice de Hellocare

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