Le coût exorbitant de la transition énergétique n’en est pas un

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Par Hector Trudel Publié le 10 décembre 2013 à 5h23

L'idée est désormais admise par tous. Si la transition énergétique coûtera excessivement cher, l'immobilisme serait encore plus onéreux. Difficile de dire dans quelles mesures, même s'il semble certain que la raréfaction des énergies fossiles et la prise en charge d'une pollution de plus en plus délétère entraineront des coûts sans commune mesure.

A défaut d'estimations précises sur le montant à payer dans les prochaines années en cas de non-transition, on peut se faire une idée de la somme qu'il faudra mettre sur la table pour organiser la transition. Une somme qui, décidément, ressemble davantage à un investissement qu'à un coût.

La transition énergétique selon Hollande

La transition énergétique, "c'est une décision stratégique, c'est faire d'un problème une solution" prophétisait François Hollande en septembre dernier. Des quatre scénarii envisagés autour desquels pourrait s'articuler ce changement de braquet énergétique, le chef de l'Etat semble préférer celui organisant une sortie progressive du nucléaire, couplée à une réduction de 50% de la consommation d'énergie de la France à l'horizon 2050. Les autres stratégies visent, pour la plus opposée, à privilégier au contraire le nucléaire tout en diminuant la consommation, pour les deux dernières à favoriser la diversification du mix énergétique. A la limite, sur le plan budgétaire, peu importe. Sur la période 2012-2030, le montant des investissements est estimé dans une fourchette comprise entre 875 et 1 160milliards d'euros, quelle que soit la trajectoire retenue.

Lors de sa campagne présidentielle, Hollande avait assuré que le pays connaîtrait une réduction de sa dépendance au nucléaire de l'ordre de 25% d'ici 2025. Un passage de 75% à 50% de la part du nucléaire chiffré à 382 milliards d'euros par l'Union française de l'électricité. Un an et demi après son élection, le président n'en démord pas, et commence déjà à mettre son plan en pratique. D'ici fin 2016, la centrale alsacienne de Fessenheim fermera ses portes. Montant de l'indemnisation pour EDF, opérateur de l'infrastructure, estimé à plusieurs milliards d'euros.

Pour le reste, consommer moins, c'est d'abord être mieux isolé et, partant, engager d'importants travaux d'isolation thermique. Pour ce faire, le gouvernement a prévu de sortir du carton un large arsenal de mesures. Dès 2014, la TVA sur les travaux d'isolation thermique passera à 5%, au lieu de faire un bon de 7 à 10% comme prévu initialement. Un gouffre, quand on sait qu'à 7%, cela représente déjà un manque à gagner de 5,3 milliards d'euros par an pour l'Etat par rapport au taux normal.

Ce n'est pas tout. Des subventions seront perfusées dans le budget des ménages les plus modestes. 1 350 euros pour une personne seule gagnant moins de 25 000 euros par an, pour les couples à moins de 35K annuels et pour les familles avec deux enfants à moins de 50K/an. 3 000 euros pour les plus modestes.

Enfin, le crédit d'impôt développement durable (CIDD) et l'éco-prêt à taux zéro, s'ils devraient fonctionner à moindre régime, seront toujours d'actualité. Ils seront "recentrés sur les rénovations lourdes".

Des investissements plutôt que des coûts

Pour financer ces mesures et mécanismes tous azimuts, une solution phare : l'introduction d'une taxe carbone, incrémentée chaque année : 7 euros la tonne de CO2 émise en 2014, 14,5 euros en 2015, 22 euros en 2016, pour des recettes attendues de 340 millions en 2014, 2,5 milliards en 2015 et 4 milliards en 2016. Pas de quoi compenser les pertes dues à la baisse de la TVA et aux subventions de travaux, selon Les Echos.

Pour financer le passage progressif aux énergies renouvelables, dont il est prévu qu'elles représentent 25% du mix d'ici 2020 pour un coût de 84 milliards d'euros selon la Cour des Comptes, la contribution au service public de l'électricité (CSPE) devrait elle aussi augmenter, passant de 10 euros actuellement à un peu plus de 20 euros en 2020. Pas encore assez suffisant, selon la Cour des comptes, qui pense qu'il faudra trouver 7,5 milliards d'euros par an supplémentaires pour joindre les deux bouts.

Les ambitions sont fortes. Les moyens de cette politique un peu faibles pour l'instant. Pour l'instant seulement. Dès 2030, tous les scénarii envisagés remboursent leurs investissements. Dès 2050, ils représentent des gains nets cumulés considérables, et entraînent dans leur sillage des effets collatéraux bénéfiques : réduction de la fracture énergétique sur le territoire, créations d'emplois, réduction de la pollution...

D'ici là, on pourra toujours se consoler en considérant que les études de la Cour des comptes oblitèrent un paramètre capital : le consommateur n'aura pas à payer seul la facture. L'installation à venir de 35 millions de compteurs communicants Linky le dit assez. Imaginés par ERDF et censés favoriser l'intégration des énergies renouvelables dans le mix énergétique, ils seront pris en charge par le gestionnaire de réseau, qui compte sur la réduction du nombre d'interventions qu'occasionnera ce boitier intelligent pour amortir l'investissement.

"Investissement", un mot qui apparaît six fois dans cet article. Même à ne pas se sentir concerné par les problématiques écologiques, ont pourra se rassurer à l'idée que les rendements économiques seront au rendez-vous.

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Consultant en immobilier d'entreprise axé développement durable, Hector Trudel réalise des veilles réglementaires et technologiques afin d'optimiser ses conseils en stratégie environnementale et optimisation immobilière auprès de grands groupes internationaux.

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