Une idée à creuser : l’uniforme à l’école

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Par Jacques Bichot Publié le 12 mai 2015 à 5h00
Uniforme Ecole Reforme College France
25èmeLa France occupe le 25 ème range au classement éducatif PISA.

La ridicule affaire de la tenue vestimentaire d’une collégienne à Charleville-Mézières montre à quel point le ver est dans le fruit de notre Éducation nationale. Il a suffi d’une toute jeune fille habillée à la façon d’une religieuse pour que le chef d’établissement, le rectorat et la ministre montent sur leurs grands chevaux !

En revanche, le véritable problème de notre enseignement primaire et secondaire, à savoir le manque de discipline, qui fait perdre à peu près le cinquième du temps qui devrait réglementairement être consacré au travail, et qui mine le moral et parfois la santé des enseignants, n’est presque jamais abordé. Pourtant, il se pourrait que ces deux problèmes, le minuscule et l’énorme, aient en commun une solution, ou du moins un élément de solution.

Créer un esprit de corps

L’armée, comme l’école, requiert discipline et interdiction des différentiations ostentatoires sans rapport avec le service. Un gradé a des galons et quelques autres signes distinctifs, mais il s’agit d’une nécessité pour savoir quelle est sa fonction. En gros, les militaires d’une arme donnée ont tous à peu près la même tenue : c’est excellent pour créer un esprit de corps, pour aider à faire passer les différences entre personnes après la communauté de mission. L’uniforme est un signe d’appartenance à une communauté qui a ses propres règles, en particulier l’obéissance aux règlements et aux ordres – ce que l’on appelle la discipline. Dans une section, un bataillon, une division, il y a certes des chrétiens, des musulmans et des athées, comme il y a des amateurs de foot et des passionnés de musique ou de romans historiques, mais ces caractéristiques personnelles sont laissées au vestiaire lorsque le militaire revêt son uniforme, c’est-à-dire entre en service. La fonction l’emporte alors, pour un temps, sur les préférences de chacun.

Eliminer les différences de statut social

La solution qui donne de bons résultats dans les forces armées ne pourrait-elle également rendre service dans les établissements scolaires ? Dans bien des pays, les écoliers, collégiens et lycéens portent un uniforme lorsqu’ils accomplissent leur devoir (qui est d’apprendre). Et ces pays ne se retrouvent pas en queue du classement Pisa. Le port de l’uniforme ne suffit évidemment pas pour que les cerveaux et les caractères se développent correctement, mais il élimine quelques obstacles. Y compris celui des différences vestimentaires signifiant des différences de statut social, de richesse des parents, ou de religion. Et, à vrai dire, gommer la différence – le temps de la classe – entre celui qui peut aller passer les vacances de printemps à l’autre bout du monde et celui qui reste dans son HLM n’est pas moins important que de laisser au vestiaire ce qui montrerait un fort attachement à Mahomet ou à Ali, au Pape ou aux seules écritures saintes.

Là pour travailler

Surtout, l’uniforme est un auxiliaire précieux pour ceux des enseignants qui ont compris que la discipline est un facteur névralgique pour l’efficacité des manœuvres neuronales comme pour celle des opérations militaires. Se mettre en uniforme crée en effet une rupture. Il y a le monde où l’on rigole, et celui où l’on bosse. Quand on quitte les basquets et le blouson pour les chaussures cirées et la veste d’une couleur bien précise, l’enfant ou l’adolescent passe d’un monde à l’autre, d’un ensemble de conventions et de préoccupations à un autre. La salle de classe n’est ni la rue, ni le domicile, ni le lieu de villégiature : quand le jeune revêt son uniforme, il quitte plus facilement, symboliquement et psychiquement, l’univers disons "civil" pour l’univers scolaire.

Améliorer la discpline dans les établissements scolaires

La confusion entre ces deux mondes est une des principales origines de la chienlit qui sévit hélas dans trop d’établissements scolaires, avec les désastreuses conséquences que l’on sait. Je ne dis pas que l’uniforme résoudra comme par magie le problème d’indiscipline, de manque d’application et de concentration, qui vaut à la France d’avoir un illettré sur quatre jeunes sortant du système scolaire. Je dis seulement qu’il existe de fortes présomptions quant à la cause principale de notre déroute scolaire et quant au rôle que pourrait jouer l’adoption de l’uniforme pour amoindrir cette cause. Et quand il existe des présomptions sérieuses, un juge d’instruction est nommé pour étudier le dossier à fond. Prenons donc les moyens d’étudier sérieusement quelles améliorations pourraient résulter de l’adoption d’uniformes scolaires.

Article publié initialement sur Magistro

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Jacques Bichot est économiste, mathématicien de formation, professeur émérite à l'université Lyon 3. Il a surtout travaillé à renouveler la théorie monétaire et l'économie de la sécurité sociale, conçue comme un producteur de services. Il est l'auteur de "La mort de l'Etat providence ; vive les assurances sociales" avec Arnaud Robinet, de "Le Labyrinthe ; compliquer pour régner" aux Belles Lettres, de "La retraite en liberté" au Cherche Midi et de "Cure de jouvence pour la Sécu" aux éditions L'Harmattan.

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