La COP30, qui s’ouvre à Belém au Brésil, soulève un paradoxe : alors que le solaire et l’éolien affichent des records de déploiement, le charbon, le gaz et le pétrole dominent toujours le paysage énergétique mondial. La transition vers les renouvelables est-elle réellement amorcée, ou reste-t-elle un objectif plus qu’une réalité ?
COP30 : les énergies renouvelables accélèrent, la sortie des fossiles piétine

Depuis ce 10 novembre 2025, la ville de Belém accueille la COP30, conférence climatique annuelle des Nations unies. Ce rendez-vous capital intervient dix ans après l’Accord de Paris et devrait clarifier si la transition énergétique s’accélère ou stagne. Bien que le solaire et l’éolien se soient considérablement développés depuis 2015, les combustibles fossiles continuent d’alimenter plus de 80 % de l'approvisionnement mondial. Dès lors, la conférence devra répondre à cette interrogation majeure : la sortie des fossiles est-elle véritablement engagée ou simplement reportée d’année en année ?
Le secteur des renouvelables progresse, mais les fossiles gardent la main
L’évolution des énergies renouvelables depuis 2015 est spectaculaire, mais leur progression n’a pas encore suffi à ébranler la domination des combustibles fossiles. Selon un rapport de l’IRENA relayé par Reuters le 22 juillet 2025, « 91 % des projets de production d’énergie renouvelable construits en 2024 étaient déjà moins coûteux que les alternatives fossiles ». Le coût du solaire photovoltaïque a diminué de 41 %, et celui de l’éolien terrestre de 53 % en moyenne. L’Agence internationale de l’énergie (IEA) prévoit, dans son rapport d’octobre 2025, que la capacité mondiale installée en renouvelables pourrait atteindre environ 10 400 GW d’ici à 2030 dans un scénario d’accélération. Cette dynamique s’appuie sur des investissements records, notamment dans les pays émergents, appuyés par des mécanismes multilatéraux de financement climatique.
Néanmoins, cette croissance des renouvelables n’a pas permis un véritable basculement énergétique. Selon Le Monde, le charbon, le pétrole et le gaz continuent à représenter 80 % du mix énergétique mondial, tout comme en 2015. De fait, si les énergies renouvelables gagnent du terrain, elles n’ont pas encore supplanté les fossiles. Le Guardian rapportait le 6 octobre 2025 que, pour la première fois, le solaire et l’éolien ont produit plus d’électricité que le charbon au niveau mondial au premier semestre. Pourtant, cette victoire symbolique masque un retard structurel : les fossiles restent ancrés dans l’industrie, le transport et les usages domestiques.
COP30 : l’ambition d’une rupture entre le discours et l’action
Le sommet de Belém est présenté comme un tournant stratégique. Selon l’UNFCCC, « dix ans après l’Accord de Paris, la COP30 marque une rupture décisive : passer des engagements sur le papier à la mise en œuvre réelle ». Le Brésil, pays hôte, entend faire de cette édition le « COP de la vérité », selon le ministère belge des Affaires étrangères. Mais le flou règne encore sur les résultats attendus. L’agence Reuters a ainsi indiqué : « Il était peu clair ce que les pays allaient exactement négocier lors de la COP30 ». Pourtant, le programme est ambitieux. Des journées thématiques axées sur l’énergie, l’industrie et les transports sont prévues les 14 et 15 novembre, avec pour objectif affiché de tracer la voie vers une économie neutre en carbone.
André Aranha Corrêa do Lago, président de la COP30, a déclaré, dans des propos partagés par Climate Change : « Nous avons tous déjà décidé que nous allions sortir des combustibles fossiles. (…) La mise en œuvre ne se fait pas par consensus. La mise en œuvre, c’est que chaque pays fait ce qu’il pense pouvoir faire. » Cette déclaration illustre les tensions entre un consensus climatique fragile et des réalités nationales divergentes. Parmi les enjeux prioritaires figure la mise en œuvre de l’engagement, pris lors de la COP28, de tripler la capacité en renouvelables d’ici 2030. Selon le WWF, « le monde n’est pas en voie de tenir cet objectif ». Les promesses ne suffisent plus, c’est désormais la cohérence des trajectoires nationales qui sera scrutée.
Puissance économique et inertie politique : les deux visages de la transition
Si les chiffres témoignent d’un basculement économique en cours, la domination politique des énergies fossiles reste intacte dans de nombreux pays. Selon un rapport de l’ONU de 2025, les investissements mondiaux dans l’énergie atteindraient environ 2 200 milliards de dollars cette année, dont la moitié toujours dirigée vers les fossiles. Ce déséquilibre témoigne de la lenteur de l’ajustement structurel, malgré les signaux économiques en faveur des renouvelables. La configuration géopolitique mondiale reste également marquée par les tensions Nord-Sud autour de la justice climatique et du financement. Le projet de mobilisation de 1 300 milliards de dollars annuels pour aider les pays en développement à décarboner leurs économies reste flou.
L’agenda financier de la COP30 prévoit des discussions sur la création d’un mécanisme de financement plus transparent et contraignant, mais rien ne garantit l’adoption d’un cadre commun. Politiquement, les infrastructures fossiles bénéficient encore d’un soutien massif. Des projets gaziers sont encore en cours dans plusieurs États, tandis que des subventions aux carburants fossiles perdurent, y compris dans les pays du G7. Comme le rappelle Le Monde, « le développement des renouvelables n’a pas encore provoqué un remplacement net à grande échelle ». Ce contraste entre logique économique et inertie institutionnelle traduit une transition énergétique qui avance à deux vitesses. L’enjeu, pour la COP30, est de réussir à aligner ces dynamiques : accélérer là où les renouvelables sont déjà compétitives, tout en désamorçant les résistances politiques et sociales aux transformations profondes.
