Automobile : vous pourrez toujours acheter des thermiques en 2035

La Commission européenne vient de revoir à la baisse son projet de sortie totale des moteurs thermiques, initialement prévue pour 2035. Désormais, l’objectif n’est plus une disparition complète, mais une réduction de 90%, une inflexion majeure qui rebat les cartes pour les voitures et l’ensemble du marché automobile européen, à un moment charnière pour les constructeurs.

Anton Kunin
By Anton Kunin Published on 17 décembre 2025 6h30
Véhicules thermiques : pourquoi l’UE renonce au 100% électrique dès 2035
Automobile : vous pourrez toujours acheter des thermiques en 2035 - © Economie Matin
10%Les constructeurs pourront compenser les 10% des émissions restantes via l’utilisation de carburants durables (e-fuels, biocarburants) ou d’acier à faible teneur en carbone.

Véhicules thermiques : un changement de cap lourd de conséquences pour le marché

Le 16 décembre 2025, la Commission européenne a présenté une révision de sa trajectoire pour les véhicules thermiques. Alors que l’interdiction totale des ventes de voitures à moteur thermique en 2035 semblait actée depuis 2023, l’exécutif européen assume désormais un objectif de réduction de 90% des émissions de CO₂, invoquant un contexte industriel et économique profondément dégradé.

Ce recul sur les véhicules thermiques modifie profondément les équilibres du marché automobile européen. Jusqu’ici, les constructeurs avaient intégré l’idée d’une disparition complète des voitures à moteur thermique dès 2035, ce qui orientait massivement les investissements vers l’électrique. Désormais, la perspective de maintenir une fraction de véhicules thermiques autorisés change les arbitrages industriels, car elle introduit une flexibilité réglementaire inédite à ce stade du calendrier climatique.

Par ailleurs, ce nouvel objectif de 90% implique que certaines voitures thermiques ou hybrides pourront encore être commercialisées, à condition de compenser leurs émissions résiduelles. Cette marge concernerait notamment l’usage de carburants synthétiques et de matériaux à faible empreinte carbone, une option qui redonne de l’oxygène aux chaînes de production existantes tout en limitant les ruptures brutales pour les véhicules déjà en développement.

Dans le même temps, ce signal envoyé au marché automobile pourrait ralentir la bascule vers l’électrique pur. Alors que les ventes de voitures électriques marquent le pas dans plusieurs pays européens, cette décision pourrait conforter certains consommateurs hésitants à prolonger leur recours aux véhicules thermiques. Toutefois, la Commission maintient que l’essentiel de l’offre devra rester bas carbone, puisque la réduction de 90% demeure juridiquement contraignante.

Un soulagement des industriels sur fond de tensions politiques

Pour les constructeurs automobiles, la décision sur les véhicules thermiques constitue un soulagement partiel. Ces derniers mois, l’industrie européenne a multiplié les alertes sur la rentabilité incertaine de l’électrique à court terme, face à la concurrence chinoise et à la baisse de la demande. Plusieurs groupes ont plaidé pour une approche plus pragmatique, afin d’éviter des fermetures d’usines et des suppressions d’emplois. Un porte-parole de Volkswagen a ainsi salué une approche « pragmatique », soulignant qu’elle offre davantage de flexibilité tout en maintenant une dynamique d’électrification. Cette position illustre l’état d’esprit dominant chez de nombreux constructeurs, qui cherchent à préserver leurs capacités industrielles liées aux véhicules thermiques, tout en continuant à investir dans les nouvelles motorisations.

Cependant, cette inflexion ne fait pas l’unanimité. Les associations et ONG environnementales dénoncent un recul dangereux. Martin Kaiser, responsable chez Greenpeace Allemagne, a estimé que cette décision constituait « un cadeau de Noël anticipé » pour les constructeurs étrangers, mettant en péril des millions d’emplois européens. Cette critique souligne la crainte que le maintien partiel des véhicules thermiques retarde l’innovation et affaiblisse la compétitivité européenne à long terme.

Sur le plan politique, plusieurs États membres ont activement pesé dans le débat. L’Allemagne et l’Italie figurent parmi les pays ayant demandé un assouplissement des règles, invoquant la nécessité de protéger leurs industries automobiles nationales.

Pourquoi l’Union européenne assouplit la sortie des véhicules thermiques

La décision de revoir l’objectif concernant les véhicules thermiques s’inscrit dans un contexte économique jugé critique par Bruxelles. La Commission européenne fait valoir que le secteur automobile traverse une crise marquée par une chute des marges, des investissements lourds et une pression concurrentielle accrue. L’UE redoute un décrochage industriel si la transition est jugée trop brutale.

En outre, la Commission rappelle que l’objectif initial de 100% de réduction des émissions pour les voitures neuves, adopté en 2023, visait la neutralité carbone du transport routier à l’horizon 2050. Toutefois, les données économiques récentes ont conduit à réévaluer le rythme. Selon l’exécutif européen, le passage à 90% reste compatible avec les engagements climatiques mondiaux, tout en tenant compte des contraintes industrielles.

Enfin, cette révision permet d’introduire des mécanismes de flexibilité supplémentaires. Parmi eux figurent des ajustements pour les petits véhicules électriques produits dans l’Union avant 2035 et des adaptations des objectifs intermédiaires pour les véhicules utilitaires légers à l’horizon 2030. Ces leviers doivent permettre d’accompagner plus progressivement la sortie des véhicules thermiques, sans provoquer de choc économique majeur.

Anton Kunin

Après son Master de journalisme, Anton Kunin a rejoint l'équipe d'ÉconomieMatin, où il écrit sur des sujets liés à la consommation, la banque, l'immobilier, l'e-commerce et les transports.

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