Salaire : votre entreprise va tout dévoiler à vos collègues

Une directive européenne du mois de juin 2023, oblige les entreprises de plus de 100 salariés à publier le salaire de leurs employés d’ici à 2026, un vrai levier contre les inégalités entre les sexes ?

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 4 avril 2024 à 11h00
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48%des femmes hésitent à demander une augmentation

Une directive pour imposer la transparence des salaires en entreprise

En France, malgré une loi en vigueur depuis 1983 qui exige une équité salariale entre hommes et femmes pour un travail équivalent, les écarts de rémunération persistent. Selon une étude de l'INSEE datant de 2023, les femmes dans le secteur privé gagnent en moyenne 15 % de moins que leurs homologues masculins. À l'échelle européenne, cet écart était de 12,7 % en 2021. Face à ce constat, l'Union européenne a voté une directive en juin 2023 qui vise à « renforcer l'application du principe d'égalité salariale » en imposant aux entreprises de plus de 100 employés de publier les salaires de leurs collaborateurs.

L'objectif ? Sensibiliser les employés aux potentiels écarts salariaux au sein de leur entreprise et permettre une contestation en cas de preuve avérée. La France n'a néanmoins pas attendu cette directive européenne pour réduire les inégalités entre les sexes. Elle avait pris les devants en 2019 en créant l'index Pénicaud qui oblige les entreprises de plus de 50 employés à mesurer les inégalités de rémunération et de carrière au sein de leur structure. Malgré ses ambitions, cet index s'est révélé partiellement inefficace. D'abord parce qu'il n'est finalement applicable que pour 26 % des salariés du secteur privé, ensuite en raison de sa méthodologie.

Une réforme accueillie avec réserve par le secteur privé

L'accueil de cette directive européenne est plutôt mitigé, et ce, aussi bien du côté des salariés que des employeurs. D'un côté, les employés y voient une opportunité de gain en transparence et en justice salariale, de l'autre, ils craignent que cette directive amène à une uniformisation des rémunérations par le bas. Une crainte qui n'est pas infondée. Selon l'étude de Zoë B. Cullen et Bobak Pakzad-Hurson, deux économistes britanniques, qui est basée sur l'application de mesures similaires dans certains États américains, celles-ci ont entraîné une baisse moyenne de 2 % des salaires des employés, comme le rapportent nos confrères de Cnews.

La raison derrière ne tient pas du fait que les entreprises se montrent particulièrement réticentes à augmenter leurs employés. En effet, d'après un sondage réalisé par OpinionWay pour la Chaire Impact Positif, près de la moitié des femmes (48 %) hésitent à demander une augmentation, alors que cela ne concernerait que 28 % des hommes. À noter par ailleurs, paradoxe de cette directive européenne, qu'elle ne retire pas le « secret salarial » qui est largement utilisé par les employeurs lors des négociations. L'Union européenne stipule en effet que les employeurs peuvent différencier les rémunérations des employés effectuant le même travail, mais uniquement « sur la base de critères objectifs, non discriminatoires et impartiaux, tels que la performance et les compétences ». Une précision qui s'annonce comme un véritable casse-tête pour les entreprises, ces dernières risquant des sanctions en cas de non-respect de leur obligation de transparence salariale...

Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin depuis septembre 2023.

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