C’est une annonce qui a pris le secteur par surprise. Le gouvernement prévoit de réserver les aides publiques à l’achat de pompes à chaleur produites uniquement au sein de l’Union européenne. Présentée comme une mesure visant à encourager la réindustrialisation de l’Europe face à l’afflux de produits importés de Chine, cette décision pourrait toutefois avoir des effets immédiats sur les prix.
Vers une hausse des prix des pompes à chaleur

Un marché en forte tension
La pompe à chaleur s’est imposée ces dernières années comme l’alternative la plus crédible aux chaudières au fioul et au gaz. Moins énergivore, alimentée à l’électricité, elle permet de réduire la facture de chauffage tout en diminuant les émissions de CO₂. Porté par les aides publiques, le marché français a connu une croissance spectaculaire : plus de deux million d’appareils installés depuis 2020, et une filière d’installation en plein essor.
Mais ce succès s’appuie aussi sur une chaîne d’approvisionnement internationale où plusieurs grands fabricants jouent un rôle structurant. Ces entreprises ont contribué à développer l’offre disponible, à faire baisser les coûts et à soutenir la montée en compétence des installateurs. Mais si plusieurs d’entre elles ont investi en France (Daikin, Panasonic, Mitsubishi Electric, etc.), d’autres, venues de Chine, déstabilisent le marché. Une tendance qui pousse le gouvernement à agir.
Une hausse de prix quasi inévitable
Toutefois, en appliquant sans nuance un critère strict de fabrication dans l’Union européenne, la France risque de pénaliser indistinctement l’ensemble des acteurs, y compris ceux qui ont investi durablement sur son territoire. Les entreprises concernées, privées d’aides publiques, verraient mécaniquement leur compétitivité chuter, au point de devoir réduire leur présence sur le marché français. Cette contraction aurait des effets immédiats : une offre restreinte, moins de concurrence et donc une hausse des prix.
Les ménages qui comptaient sur les aides pour remplacer leur ancienne chaudière verraient leur reste à charge augmenter, une perspective peu propice dans un contexte économique déjà tendu. Les bailleurs sociaux et les copropriétés seraient confrontés aux mêmes contraintes, avec des projets de rénovation énergétique plus difficiles à financer.
Du côté des installateurs, l’inquiétude porte sur un effet domino : des consommateurs qui reportent leurs travaux, d’autres qui se tournent vers des solutions moins performantes, et un marché qui ralentit alors même qu’il devait gagner en vitesse. À terme, cette dynamique pèserait directement sur les objectifs de décarbonation des bâtiments et de l’industrie, au moment où la France cherche au contraire à accélérer la transition.
Un choix politique à double tranchant
En cherchant à renforcer la production européenne, l’État prend toutefois le risque d’enrayer une dynamique encore fragile. La capacité industrielle du continent ne permettra pas, à court terme, d’absorber la baisse des importations, ce qui pourrait créer des tensions immédiates pour les installateurs, les distributeurs et les ménages.
Les associations de consommateurs comme les professionnels du bâtiment redoutent un scénario déjà observé dans le photovoltaïque : une mesure pensée pour protéger la filière, mais qui se traduit par des coûts plus élevés et un ralentissement du déploiement.
En restreignant trop vite l’offre disponible, la France pourrait rendre la transition énergétique plus coûteuse et donc plus difficile à atteindre.