60 milliards d’économies… oui, mais tous les ans !

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Par Agnès Verdier-Molinié Modifié le 7 mars 2013 à 6h41

Économie Matin : Pourquoi avoir écrit ce livre « 60 milliards d’économies ! » ?

AVM : Tout d’abord car François Hollande a déclaré vouloir réaliser 60 milliards d’économies sur les dépenses publiques d’ici 2017. Et qu’au même moment, en faisant nos recherches à la Fondation iFRAP nous nous sommes rendus compte que, par rapport aux autres pays de l’Union européenne, le surcoût de production de nos services publics est de 60 milliards d’euros mais… par an. Par coût de production –ce sont des chiffres de l’OCDE- l’OCDE entend coût de fonctionnement de nos services publics. L’idée serait de préserver la qualité de nos services publics tout en baissant les coûts de structure. Cela sera dur sur le plan politique mais simple en terme de réalisation potentielle : il suffira que chaque échelon public retrouve sa place, une place qui n’empiète pas sur les autres échelons. Le grand problème de la France qui engendre le surcoût public et nos fameux 57% de dépenses publiques par rapport au PIB, c’est le fait que chaque échelon veut tout faire. La commune veut tout faire, le département veut tout faire, la région veut tout faire, l’intercommunalité veut tout faire, l’État veut tout faire. Chacun dépense pour la culture, l’école, le social… et la Sécu aussi. Nous sommes en 2013 au pied du mur de la réforme dite des périmètres publics, celle que la Révision générale des politiques publiques (RGPP) n’a pas réalisée.

Économie Matin : Vous commencez votre livre par un premier chapitre sur un rapport secret de l’Inspection générale des Finances. Que dit ce rapport et comment vous l’êtes vous procuré ?

AVM : Ce qui est paradoxal dans la période que nous vivons, c’est que, à l’intérieur même de l’État, il y a des agents très attachés à l’intérêt général qui osent écrire dans leurs rapports comment il faudrait réformer l’État. Malheureusement, ces rapports sont cachés aux Français, jamais publiés et quasi impossibles à consulter. Ce rapport confidentiel de l’Inspection des Finances dont je parle dans le premier chapitre de mon livre a été commandé avant l’alternance. Il dresse la liste des économies possibles pour redresser le pays. Les hauts fonctionnaires qui l’ont écrit ont été d’un grand courage mais ce courage n’a pour l’instant pas été suivit d’effet. Cela dit, les informations qui nous parviennent des projets encore confidentiels de la Modernisation de l’Action publique -qui a remplacé la RGPP- vont dans le sens d’un plan qui serait beaucoup plus ambitieux que ce qui a été réalisé jusqu’à présent en termes d’économies. Le gouvernement s’est engagé à ne plus augmenter les impôts et c’est heureux. On demande à nos entreprises d’être compétitives malgré une charge fiscale devenue quasiment insoutenable, la sphère publique doit l’être aussi. Les exemples abondent d’initiatives efficaces et moins chères qui permettent de produire les services publics de qualité dont nous avons besoin sans les surpayer.

Économie Matin : Que voulez-vous dire par là ?

AVM : En France, on parle beaucoup d’égalité mais, quand on veut savoir combien est dépensé par la collectivité pour tel ou tel service public et que l’on veut comparer ces coûts, notamment en matière d’éducation, on se heurte à un mur. Combien coûte ma place en crèche, combien coûte ma cantine, combien coûte mon école, mon hôpital ou mon assurance-maladie, combien mon maire ou mon président de région a-t-il de voitures de fonction, à qui donne-t-il des subventions ? Voilà des questions auxquelles les Français ont le droit d’avoir des réponses. À l’heure où l’on nous demande de payer plus d’impôts pour renflouer les déficits publics, l’étude des données publiques exposées aux yeux de tous sera passionnante… responsable et citoyenne. Mais cela va demander de changer la démarche globale de nos administrations, de nos élus et de nos syndicats, qu’ils soient patronaux ou de salariés. Aucun de ces trois pouvoirs ne souhaite vraiment la transparence. Nos administrations se considèrent comme propriétaires de nos services publics et des données chiffrées qu’ils génèrent. Les élus sont à la fois représentants de la Nation et élus locaux et ne souhaitent pas particulièrement que l’on puisse prouver que le fait que chaque échelon soit compétent sur tous les sujets génère des surcoûts. Quant aux syndicats, comme je le montre dans mon livre, ils sont trop impliqués dans la gestion paritaire de la protection sociale en général pour souhaiter de vraies réformes qui redonneraient du souffle à notre pays. Le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, a eu des mots très justes en parlant du « poids excessif des intérêts particuliers au détriment de l'intérêt général » pour expliquer le fait que la France a toujours calé devant le sujet de la baisse des dépenses publiques. Dans mon livre, je trace une feuille de route possible pour économiser 60 milliards d’euros par an, soit 5% de l’ensemble de nos budgets publics, à l’horizon 2021. « C’est la réforme de l’État, de la protection sociale et de notre organisation territoriale qu’il faut engager ! » a déclaré François Hollande lors de sa première conférence de presse à l’Élysée, le 13 novembre dernier. Maintenant, il faut avoir le courage de rentrer dans le dur de la réforme.

60 milliards d'économies, oui, mais tous les ans, par Agnès Verdier Molinié, Albin Michel, 1er mars 2013.

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Agnès Verdier-Molinié est la directrice de la Fondation iFrap, think tank indépendant, depuis décembre 2009. Elle est diplômée d’Histoire économique contemporaine. Elle a été élue « personnalité Think Tank de l’année 2010 ». Elle a notamment publié : « La Mondialisation va-t-elle nous tuer ? » aux Editions Jean-Claude Lattès « Fonctionnaires contre l’Etat. Le grand sabotage » aux Editions Albin Michel.

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