Augmentation du budget des armées : une manoeuvre incontournable

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Par Jean-Paul Betbèze Modifié le 15 septembre 2016 à 18h04
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46,8 milliards d'€C'est le budget de la défense française en 2015.

La France est une cible privilégiée pour les terroristes. Ce n'est plus une nouveauté, la menace plane depuis des dizaines de mois sur l'hexagone. Des textes ont été mis en place pour renforcer la protection. Parmi les mesures, il y a l'augmentation du budget des armées à hauteur de 2 % du PIB. Cela est-il vraiment nécessaire ?

« Les dividendes de la paix » sont derrière nous. C’était l’heureux temps de la croissance mondiale où les conflits étaient localisés et séparés. Maintenant, on voit qu’ils s’étendent et se multiplient. Pas de surprise donc si, dans le monde, les dépenses militaires remontent en 2015, officiellement, à 1 700 milliards de dollars, pour la première fois depuis 2011. Et ce n’est pas fini. Les Etats-Unis, premiers dépensiers avec 590 milliards de dollars en 2015 vont considérablement augmenter leurs dépenses l’année prochaine, et le Congrès sera d’accord (610 milliards au moins en 2017).
La première nouveauté en matière de dépenses vient en réalité de la Chine dont les dépenses militaires ont plus que doublé, réduisant son infanterie pour dépenser en tanks, avions et surtout puissance navale. La deuxième nouveauté, en ce domaine, vient du Moyen Orient où l’Arabie Saoudite, plus l’Egypte et sans aucun doute l’Iran, s’arment.

Sécurité : besoin de sécurité au niveau européen

Dans ce contexte, on comprend que l’Europe, notamment la France, doit suivre. L’Europe doit prendre en considération les menaces « classiques », venant de Russie, auxquelles s’ajoute la crise du Moyen Orient, qui implique la crise des migrants. Les pays de la Méditerranée, Grèce et Italie en premier chef, doivent se protéger et dissuader les passeurs. Ceci implique beaucoup plus de dépenses en matière de surveillance et de navires, pour des pays en difficulté. Par rapport à l’Est, il faut également que se renforcent les capacités de pays qui ont rejoint l’Union Européenne. Pour cela, un effort considérable est partout nécessaire, ce qui implique cette norme de 2% en dépenses d’armement par rapport au PIB qu’a souhaitée l’OTAN.
Face à ce besoin de protection, de la France et de l’Union Européenne dans un monde plus dangereux où la menace s’étend et prend de plus en plus de formes, dépenser davantage est légitime. Cependant, la France n’est pas si loin du compte. En 2015, il s’agit officiellement de 2,1% du PIB (46,8 milliards de dépenses en 2015). Toute la question est de savoir si ceci suffit et, plus encore, si ceci est adapté.

Une panoplie d'outils à développer

Les responsables de l’armée répètent que nous perdons pied en matière d’armement et de défense. Cette opinion est en train de gagner les politiques. Il s’agit en effet, pour la France, de moderniser ses équipements en les adaptant à la guerre nouvelle où l’intelligence (le renseignement) couplée à des armes plus légères (drones) va prendre une part croissante. Ceci ne veut pas dire que les anciennes armes sont aujourd’hui obsolètes, ceci veut dire qu’il faut étendre la panoplie, pour la France et pour l’Union Européenne. Pour la France ceci implique des dépenses nouvelles, comme pour l’Union Européenne, plus d’échanges en matière de renseignement et plus de coopération dans la conception et dans la fabrication en matière d’armements. L’idée du Fonds de Sécurité et de Défense, proposé par Thierry Breton est à creuser.
Enfin, compte-tenu des problèmes de déficit budgétaire que rencontrent nombre de pays, notamment au Sud, il faut que la Commission Européenne prenne en compte cette nouvelle menace dans ses demandes d’équilibrage des comptes publics.
Au total, la France doit dépenser plus pour se protéger, avec des armes nouvelles, qui sont chères, avec plus d’intelligence dans une Union Européenne qui doit elle-même dépenser plus et de manière plus coopérative. N’oublions pas que l’Autriche dépense 0,7% de son PIB pour son armement et qu’elle est neutre et que l’Allemagne dépense 1,2% du sien (en 2015). 2% nous n’y sommes pas tous.

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Jean-Paul Betbèze est PDG de Betbèze Conseil, membre de la Commission Economique de la Nation et du Bureau du Conseil national de l'information statistique (France), du Cercle des économistes et Président du Comité scientifique de la Fondation Robert Schumann. Professeur d'Université (Agrégé des Facultés, Professeur à Paris Panthéon-Assas), il a été auparavant chef économiste de banque (Chef économiste du Crédit Lyonnais puis Chef économiste & Directeur des Etudes Economiques, Membre du Comité Exécutif de Crédit Agricole SA) et membre pendant six ans du Conseil d'Analyse économique auprès du Premier ministre. Il est l'auteur des ouvrages suivants:· "Si ça nous arrivait demain..." aux éditions Plon, Collection Tribune Libre· "2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France" aux Editions PUF, 2012.. "Quelles réformes pour sauver l'Etat ?" avec Benoît Coeuré aux Editions PUF, 2011.. "Les 100 mots de l'Europe" avec Jean-Dominique Giuliani aux Editions PUF, 2O11. "Les 100 mots de la Chine" avec André Chieng aux Editions PUF, 2010. Son site : www.betbezeconseil.com

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