Budget 2015 : vieux pot et bientôt soupe populaire

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Par Simone Wapler Modifié le 29 novembre 2022 à 10h08

« Nous avons fait un choix clair : ni hausse d'impôts ni économies budgétaires supplémentaires. C'est un choix politique » nous dit Manuel Valls.

Non, ce budget de 2015 n'est pas un choix politique. C'est tout le contraire, c'est le budget de la lâcheté consommée surtout lorsque la dette française fête sa quarantième année de gonflement et que rembourser les intérêts coûte 2% de la richesse produite.

Le budget 2015 c'est toujours la même soupe dans un pot de plus en plus vieillot.

La lâcheté est présente du côté des recettes, avec la suppression de la première tranche d'impôt sur le revenu, histoire de multiplier ceux qui ne se sentent (à tort) pas concernés par les taxes. Un petit 3,3 Mds€ de recettes en moins dans l'océan de 75,7 Mds€ de déficit prévu.

La lâcheté redouble du côté des dépenses. Le gouvernement a pré-vendu à Bruxelles 21 Mds€ d'économie. On nous présente des gadgets : la profession des réformes réglementées, le travail dominical, un petit coup de matraque discret sur la politique familiale. Mais surtout rien qui puisse fâcher le bataillon de l'électorat de base. Pas un poil d'épilation de mammouth, aucune réforme de statut de la fonction publique, aucun colmatage pour le trou de la Sécu et surtout pas de mise en concurrence. Quant à l'intérêt de la dette - la charge - le budget 2015 prévoit 46,7 Mds€ contre 45 Mds€ en 2014. Michel Sapin croit au Père Noël et que les taux bas le resteront éternellement. L'Allemagne paiera puisque nous sommes « trop gros pour faire faillite ».

Ne croyez cependant pas que la lâcheté soit le privilège de ce gouvernement, l'opposition n'est pas en reste. François Fillon nous indique « La France est à la veille d'un incident financier grave ». Certes et que propose-t-il ? 110 Mds€ d'économie en cinq ans « Ce sera l'effort le plus important jamais fourni. Pas pour remettre en cause notre modèle, mais pour le sauver ».

Grave erreur. Notre modèle ne doit pas être sauvé, il n'est envié ni copié par personne. La Suède a supprimé le statut de fonctionnaire à vie. Le modèle social français repose sur une vision marxisante et dépassée de l'économie. Redistribuer de la richesse ne la crée pas, faire des ponts et des routes avec des impôts ne donne pas de croissance. Les Japonais le savent depuis plus de vingt ans.

Plusieurs travaux de recherche d'historiens et d'économistes convergent vers l'idée que les gains de productivité « normaux » sont plutôt inférieurs à 1% par an et que les 150 années passées constituent une exception dans l'Histoire de l'humanité. Cette exception est due à un bouleversement comparable à celui de l'agriculture il y a 5 000 ans : l'utilisation de l'énergie – le charbon, puis le pétrole - pour remplacer la force musculaire. Aujourd'hui les gains de productivité ne sont plus que marginaux et internet n'a pas bouleversé la donne (de même que l'imprimerie de Gutenberg ne suscita pas en son temps une croissance exceptionnelle en Europe). La croissance de la richesse n'est que cela : des gains de productivité et / ou plus de monde au travail. Le reste n'est que mirages. Personne n'augmente la richesse en la redistribuant. Sauf le Christ lorsqu'il multiplie les petits pains et les Chrétiens admettent volontiers qu'il s'agit d'un miracle.

Il serait temps de débattre d'un modèle capable de s'adapter à cette nouvelle donne : des gains de productivité désormais marginaux avec une population vieillissante et donc moins de gens au travail. Il ne s'agit pas de réformes, mais justement de vrais choix politiques et d'une vision. Comment demander cela à une classe politique corrompue, sclérosée, minée par les scandales, composée majoritairement de fonctionnaires qui n'ont jamais été soumis à la concurrence, à ceux qui ont prouvé leur incompétence et de déficit en déficit nous conduisent à la soupe populaire ?

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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