-17,6 % entre février et avril. Nous avons mis le chiffre en gros sur l'illustration de l'article pour que vous ne puissiez pas passer à côté : - 17,6 % de construction de logements neufs sur les trois derniers mois, un chiffre catastrophique qui nous prépare à une crise majeure du logement en France, si l'on peut dire que la situation actuelle est satisfaisante - elle ne l'est pas.
-17, 6%, ou en données chiffrées, 69 925 logements construits ces trois derniers mois, ce qui transposé sur l'année 2014, en opérant une simple règle de 3, signifierait seulement.. 279 700 constructions ! Sur les 12 derniers mois - on parle, en statistiques, de mois "glissants"- cela donne encore 316 000 logements neufs construits, mais la chute, l'effondrement des mises en chantier sur le premier trimestre 2014, est le signal de la situation dramatique dans laquelle se trouve le bâtiment en France. On vous fera grâce de la maxime...
Ces chiffres sont catastrophiques dans l'absolu lorsque l'on sait qu'il faudrait 500 000 logements neufs construits par an pendant au moins dix ans pour renouveler efficacement le parc immobilier français, et desserrer (un peu) l'étau du prix des loyers ou de l'accession à la propriété. Ils le sont aussi comparés aux constructions de 2011, soit 421 000 tout de même, bien pourtant qu'impacté par la crise de 2008. Ils le sont encore par rapport aux très mauvais chiffres de 2013, 330 000... auxquels les chiffres de 2014 sont justement comparés, d'où les -17,6 %. Mais si l'on compare les données du premier trimestre 2014 à ceux du premier trimestre de l'année 2011, soit il y a seulement trois ans, l'effondrement des mises en chantier dépasse... -45 % ! Ces chiffres sont enfin catastrophiques soumis à l'éclairage des statistiques de l'OCDE, ou même du ministère de l'Intérieur, en matière d'immigration. En 2013, selon l'OCDE, la France a accueilli 242 000 nouveaux entrants, 195 000 selon le ministère de l'Intérieur. Certes, un logement permet en théorie d'accueillir plus d'une seule personne, mais l'immigration dont il est question dans les statistiques de l'OCDE n'est que pour une petite partie d'entre elle une immigration familiale, avec plusieurs membres d'une même famille susceptibles de loger sous le même toit.
On comprend ainsi aisément que les mises en chantier de logements neufs sur l'année écoulée et encore plus sur l'année en cours couvrent à peine plus que les besoins naturels de logements induits par l'augmentation du nombre d'habitants sur le sol français. Ajoutons, pour ceux qui adorent polémiquer que les chiffres de l'INSEE sont sans appel : Fin 2012, la France (DOM TOM inclus, hors Mayotte) comptait 65 252 000 habitants, fin 2013, 65 543 000, soit 291 000 habitants de plus. Pour 330 000 logements neufs construits la même année. Même si ces 291 000 nouveaux habitants étaient exclusivement ou même seulement majoritairement des naissances de l'année, les jeunes adultes qui quittent le foyer de leurs parents la même année pour continuer leurs études ou travailler ont bien besoin d'un logement : vive la colloc...
Les raisons de l'effondrement du marché de l'immobilier sont multiples, mais rappelons en quelques unes ici :
- les mesures fiscales incitatives imaginées par Cécile Duflot (simulation en loi duflot), lors de son passage au ministère du Logement qui s'est heureusement achevé après les municipales, ont durablement miné le marché de l'immobilier d'investissement (en savoir plus sur la loi duflot).
-Dans le même temps, la proximité des élections municipales a gelé les délivrances de permis de construire, en chute de 21,5 % sur 12 mois. Problème, des milliers de municipalités ayant changé d'équipe gestionnaire et de couleur politique, des milliers de PLU (plan locaux d'urbanisme) vont être du même coup révisés ou en tout cas, examinés à la loupe par les nouveaux élus, pour les mettre en conformité avec leur nouveau projet d'aménagement du territoire... Autant dire que la relance des permis de construire prendra au mieux quelques mois.
- L'augmentation exponentielle des taxes sur la plus-value des ventes de terrain a enfin découragé nombre de propriétaires de vendre, qui préfèrent garder plus longtemps pour attendre soit des jours meilleurs, soit atteindre les durées minimales pour en être éxonérés (22 ans désormais)....
La nouvelle ministre du Logement Sylvia Pinel est attendue de pied ferme par la profession, qui espère des annonces fortes pour relancer l'activité. Faute de quoi, outre le drame du mal-logement qui frappe aujourd'hui cinq millions de Français, au bas mot, ce sont encore des dizaines de milliers d'emplois qui seront sacrifiés dans le secteur du batîment en 2014, après 25 000 destructions de postes en 2013. Des emplois rapides à détruire, quand l'entrepreneur qui les emploie met la clef sur la porte et liquide véhicules et matériels, beaucoup plus longs à recréer, quand il faut relancer de toute pièce une entreprise de travaux publics sans outils, sans clients, sans réputation...
Article initialement publié le 28 mai 2014.