Mais jusqu’où la bulle de dette ira-t-elle ?

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Par Bill Bonner Modifié le 26 mars 2014 à 0h23

La fin arrivera — tôt ou tard — pour le grand marché haussier des actions américaines… et pour la bulle de la dette. Mais... est-ce que ce sera pour aujourd’hui ou pour demain ?

Aujourd’hui, nous explorons le temps que le pays a oublié. Cette phrase n’a pas vraiment de sens, mais nous voulions lui donner une chance malgré tout. Nous parlons de l’espace sur le calendrier rempli par des termes comme "à un moment ou à un autre" et "tôt ou tard" — cette partie de l’avenir où les choses qui ne peuvent durer éternellement finissent par s’arrêter.

La planète Dette a alourdi son fardeau de 30 000 milliards de dollars ces six dernières années — une augmentation de 40 %. Cela ne peut continuer éternellement. Mais comment est-ce que ça s’arrête ?

L’inflation… la déflation… l’hyperinflation… l’hyperdéflation ? En deux mots, une bulle ne peut pas exploser sans une grande quantité de "flation" d’une sorte ou d’une autre. Avec une bulle de cette taille, ça ne peut qu’être sans précédent. Très probablement, nous verrons la "flation" dans toutes ses formes connues — et peut-être dans des formes encore inédites.

Avidité ou idiotie ?

Les gens qui pouvaient emprunter aux taux bas de la Fed l’ont fait. Les gouvernements ont emprunté plus lourdement que jamais — simplement pour couvrir leurs frais de fonctionnement. Les entreprises ont emprunté pour se développer, pour acheter de nouvelles usines et pour racheter leurs actions (faisant grimper le cours et — par pure coïncidence bien entendu — fournissant aux dirigeants des bonus encore plus énormes).

Les chiffres les plus récents que nous ayons proviennent du troisième trimestre 2013. Sur ces trois mois, on a constaté 123 milliards de dollars de rachats d’actions — une hausse de 32 % par rapport à la même période un an auparavant. Si les choses continuaient à ce rythme en 2014, près d’un demi-millier de milliards de dollars provenant des entreprises seraient consacré à faire grimper les prix des actions des mêmes entreprises.

Les dirigeants sont-ils idiots… ou simplement avides ? Le sage conseil "vendez au plus bas, achetez au plus haut" ne semble pas les avoir atteints. Au plus bas du krach de 2008-2009, rapporte le Grant’s Interest Rate Observer, c’est à peine si les entreprises américaines ont profité d’une telle occasion de racheter leurs propres actions à un prix cassé. A présent que les prix sont à nouveau élevés, elles semblent quasiment toutes vouloir acheter.

Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour prévoir ce qui arrivera lorsque ce ne sera plus possible : les prix des actions s’effondreront.

L’effet pauvreté

Pour commencer, le crédit se développe et les prix des actifs grimpent. Ensuite, le crédit se contracte et les prix des actifs chutent. Les prix des actifs anticipent généralement les prix à la consommation.

Après une telle inflation du crédit… nous nous attendrions à voir une sacrée déflation lorsque la bulle éclate. Tout à coup, "l’effet richesse" deviendrait "l’effet pauvreté", les gens réduisant leurs dépenses, leurs investissements, leurs luxes de tous les jours.

Ce serait normal, naturel et sain. Une déflation de la dette ne crée pas de mauvaises dettes ou de mauvais investissements… elle force simplement les gens à reconnaître leurs erreurs. Les entreprises font faillite ; elles ne peuvent plus emprunter des fonds quasi-illimités à des rendements quasi-invisibles. Les 5 000 milliards de dollars qui sont apparus — de manière quasi-magique — à mesure que les marchés grimpaient… disparaissent soudain.

Il n’y a pas de mystère au sujet du cycle du crédit. La richesse créée "à crédit" s’en va lorsque le crédit est supprimé. Ensuite, on voit qui a fait les erreurs les plus graves.

Les secteurs privé et public sont encore prêts à emprunter. Les entreprises rachètent encore leurs actions. Et les prix des actifs, pour autant que nous puissions en juger, grimpent encore. Cela pourrait perdurer. Personne ne sait combien de temps.

Reste maintenant une deuxième question...


Lorsque la fin viendra, quelle forme prendra cette nouvelle "flation" ?

Tant que les politiques de taux zéro continuent, les autorités drainent de plus en plus de ressources futures. Elles encouragent les gens à emprunter — en leur faisant miroiter des taux d’intérêt proches de zéro.

Le monde entier participe. Avec une dette mondiale totale de 100 000 milliards de dollars, même si la planète pouvait mettre de côté 5 000 milliards de dollars par an, il faudrait environ 30 ans pour rembourser (en tenant compte d’intérêts à des taux "normaux").

Sauf que le monde ne peut pas mettre 5 000 milliards de côté chaque année. Il n’arrive même pas à rentrer dans ses frais. Au lieu de ça, il lui faut 5 000 milliards de dollars d’argent emprunté, net, tous les ans, rien que pour rester aux niveaux actuels de chômage, de prix des actifs, de consommation et de taux d’intérêt ! En d’autres termes, aujourd’hui, au lieu de rembourser la dette passée, nous empruntons plus encore sur l’avenir… rien que pour faire du surplace.

Alors combien d’avenir reste-t-il ? Nous n’avons pas de réponse. Nous nous attaquons à une question plus simple : à quoi ressemblera l’avenir lorsqu’il viendra ? Nous faisons bien entendu allusion à cette partie du futur où le monde se retrouvera jusqu’au cou dans une substance brune et malodorante.

Le résultat de l’inflation des actifs, c’est généralement la déflation des actifs. Les actions américaines ont été les principales bénéficiaires de la bulle de crédit. Elles seront très probablement les principales victimes lorsque la bulle du crédit éclatera. Ensuite, les sommets record atteints ces dernières années seront égalés par des planchers record.

La nature adore la symétrie

C’est comme ça. Ce qui grimpe doit baisser. Les booms de la dette, des rachats d’actions, d’émissions de junk bonds et des marchés boursiers et obligataires seront tous suivis de terribles krachs.

Comme il se doit. C’est naturel. C’est sain. On élimine les saletés… on nettoie les mauvaises décisions et les erreurs… la vie économique peut continuer. Un nouveau boom peut commencer.

Evidemment, une vraie reprise modérerait le krach. Des ventes en hausse, des revenus en hausse, des profits en hausse — tout ça contribue à la sorte de croissance qui rend la dette moins lourde à porter.

Avons-nous une vraie reprise ? Les statistiques officielles nous disent que nous avons la reprise la plus faible depuis que la Fed a commencé à faire son oeuvre. Si on regarde les chiffres de plus près, cependant, on constate qu’il n’y a pas de reprise du tout. Les ventes de voitures, les ventes de maisons, les revenus des ménages — tous stagnent ou chutent.

Vous avez entendu dire, bien entendu, que le niveau de chômage est en baisse — à 6,7 % dans le cas des Etats-Unis. Une bonne partie de cette chute est attribuée au fait qu’un grand nombre de seniors ont simplement pris leur retraite. Ce n’est pas vrai. Au lieu de prendre leur retraite, les seniors se sont accrochés à leur emploi comme des naufragés à leur bouée.

Les chiffres en disent long. La tranche démographique qui a le plus contribué à la chute du taux de participation, ce sont les 25-54 ans. En revanche, les travailleurs âgés de plus de 55 ans, ont en fait augmenté leur participation dans le bassin d’emploi. Ils ont augmenté la main-d’oeuvre de 3 %, tandis que le groupe plus jeune la réduisait de 4,7 %.

Pourquoi les seniors voudraient-ils continuer à travailler ? La réponse semble évidente : ils n’ont pas assez d’argent pour prendre leur retraite.

Les jeunes gens, en attendant, ont besoin de travailler. Il n’est pas question de retraite. Sauf qu’ils ne peuvent pas trouver d’emploi. Cet échec à déclencher une vraie reprise est la seule chose qui permet à la bulle de continuer à se développer.

[NDLR : Dette, crise, inflation... Pour mieux comprendre la situation actuelle et y adapter vos investissements, retrouvez toutes nos analyses ici même. ]

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Fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information financières pour les investisseurs particuliers.

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