Brexit : l’Europe d’après

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Par François de Coincy Publié le 22 janvier 2021 à 4h10
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17%La France finance l'Union européenne à hauteur de 17%.

L’Europe d’après Brexit doit être moins intrusive dans la politique intérieure et plus déterminée sur le plan international notamment en construisant une Force Militaire Européenne.

L’Europe sans Shakespeare, Newton, Smith et les autres…

La signature d’un accord de séparation ne peut masquer l’échec que représente un divorce au bout de 48 ans de vie commune.

L’Europe avec le Royaume-Uni c’était le rassemblement des pays fondateurs des démocraties modernes. L’Europe historique pouvait devenir la grande Europe une fois qu’elle aurait réussi à coordonner les qualités des nations qui la composent. Elle en avait la capacité économique, humaine, culturelle et militaire. L’Europe sans Shakespeare, Newton, Smith et les autres c’est un peu la musique sans Beethoven.

Les politiques et les hauts fonctionnaires européens ont regardé avec dédain le non français de 2005 en expliquant qu’aux référendums, les électeurs ne répondaient pas à la question qui leur était posée. Ils ont imputé le Brexit à la sottise des élites politiques coupables d’avoir demandé son avis à une population incapable de juger où était son intérêt. On ne peut indéfiniment dire que les autres ont tort, lorsque autant de citoyens ne veulent plus de l’Europe, il devient nécessaire de se remettre en cause.

Le château kafkaïen

Le système politique européen est vécu comme le château kafkaïen où ses habitants ne savent où ni comment ni pourquoi se prennent des décisions dont le sens même est flou. Cette impression vient de la multiplicité des organismes européens qui se superposent ou s’entremêlent avec les organes de décision nationaux. En théorie les responsabilités sont définies mais en pratique les élus européens donnent un avis sur à peu près tout, soit dans un objectif absurde d’uniformisation de l’Europe, soit à partir de motivations idéologiques. Cette situation engendre des pressions qui poussent la Commission à mener de plus en plus d’actions en dehors de son domaine exclusif.

La confusion qui ressort des règlements, directives, décisions, recommandations ou autres avis a donné à beaucoup d’Européens le sentiment d’une bureaucratie invasive dans les fondements de leur mode de vie. Si l’Europe décide de tout, à quoi servent les nations ? Si l’idéologie majoritaire européenne est plus importante que le consensus national historique, pourquoi être Français ?

Ce malaise a été général mais le désaveu européen est majoritairement venu des classes populaires des pays les plus riches, celles qui ont eu le sentiment d’être perdues par la mondialisation et l’immigration.

La mondialisation a pu être mal vécue car elle a entrainé des pertes d’emplois dans les pays comme la France qui ont choisi le «traitement social du chômage » et une précarité chez les Britanniques qui ont joué sur la flexibilité. Mais elle n’a pas eu d’effet négatif global sur le niveau de vie et n’a pas été une cause de rejet de l’Europe.

Les solidarités nationales sont mises à mal par le traitement de l’immigration

Les immigrations intra-européenne et extra-européenne ont été la cause principale du sentiment anti-européen des populations nationales les plus modestes des pays riches. Non seulement les travailleurs étrangers viennent prendre leurs emplois mais en plus ils perçoivent des aides payées par leurs impôts. Si ces étrangers peu qualifiés viennent travailler dans ces pays européens, c’est parce que la rémunération qui leur est versée inclue, en plus du prix de marché, des transferts de revenus parfois plus importants que la valeur de leur travail même.

Il faut expliquer ce phénomène : Une entreprise paie aux salariés des salaires et charges sociales d’une valeur égale au produit de leur travail. Mais les charges sociales des salaires inférieurs à la médiane donnent des avantages dont la valorisation est plus importante que la cotisation.

Prenons par exemple les cotisations d’assurance maladie d’un salarié modeste. Elles sont proportionnelles à son salaire mais elles ne suffisent pas à couvrir le coût de sa santé. La différence est payée par la cotisation des salariés les mieux payés. Il y a là un transfert de revenu comme il en est de même pour les cotisations chômage, retraites etc.. Au total le salarié perçoit plus en avantages sociaux que la valeur des cotisations prélevées sur son travail. Lorsqu’on ajoute les différentes aides directes au titre du logement , de la politique familiale, etc… on peut comprendre que les salariés les plus modestes acceptent mal que la solidarité nationale s’applique aux étrangers alors qu’ils ont eux-mêmes des conditions de vie difficile.

L’Europe est constituée de pays dont l’essence est la solidarité nationale. Si cette solidarité « nationale » s’applique aux étrangers, alors les mots n’ont plus de sens et les pays perdent l’unité qui est leur raison d’être. Sans les Nations l’Europe disparaitra.

La libre circulation en Europe des hommes, des idées, des biens et des capitaux n’est pas contradictoire avec la solidarité nationale. Il suffit de faire une clarification dans ce qu’on appelle les charges sociales entre la part qui relève de l’assurance et celle qui relève du transfert de revenus, la première accessible à tous et la deuxième relevant de la solidarité nationale réservée aux nationaux. La même clarification devrait être faite sur les allocations diverses.

De telles dispositions limiteront les mouvements de travailleurs à ceux réellement utiles sur le plan économique en restreignant ceux qui veulent profiter seulement de l’effet d’aubaine des transferts de revenus. Rien n’empêche par ailleurs que les étrangers cotisent soit à des caisses complémentaires spécifiques soit aux organismes de leur pays d’origine.

L’Europe ne doit pas se substituer aux pays qui la composent

D’une manière générale, l’Europe est riche de la diversité qui la compose et c’est une erreur que de vouloir tendre vers son uniformisation en matière de mœurs, de goût, ou de mode de fonctionnement. Autant la libre circulation des hommes, des biens et des services relève bien de l’Europe, autant les fondements des solidarités nationales doivent relever de chaque pays. Certains voudront des transferts sociaux plus élevés, d’autres jugeront préférable une taxation moins forte. Que chaque pays développe son consensus original national et puisse éventuellement servir de modèle aux autres.

Plutôt que d’accroitre son influence au détriment de chaque pays, l’Europe devrait porter ses efforts sur le domaine qui devient essentiel au sein d’un monde en développement où la Chine prend de plus en plus de place et où la « Pax Américana » disparait. La défense européenne sera dans l’avenir, si elle se constitue, le vrai ciment de l’Europe. Sans elle nos démonstrations en faveur de la liberté apparaissent déjà pathétiques. Avec elle, devenant une puissance mondiale réelle, et en étant moins invasive à l’égard des Nations qui la composent, l’Europe redeviendra attractive pour le Royaume-Uni.

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Ancien chef d’entreprise aujourd’hui à la retraite, François de Coincy bouleverse l’analyse macro-économique traditionnelle dans son livre « Mozart s’est-il contenté de naître ? ». Il en tire des propositions radicalement nouvelles pour supprimer le chômage, libérer et assainir le système financier, établir le résultat des entreprises sur une base de long terme. Il développe également ses idées sur  www.decoincy.com.

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