Mode : « Vers la fin de la fast fashion ? »

Cropped Favicon Economi Matin.jpg
Par Christophe de Villeblanche Publié le 12 novembre 2021 à 10h51
Mode Retail Agile Marketing Secteur
64%Depuis la Covid-19, 64% des consommateurs auraient augmenté leurs achats de produits made in France.

Christophe de Villeblanche, vous êtes le fondateur de la marque Le Chic Français. La crise covid-19 a chamboulé le monde depuis maintenant un an et demi. Est-ce que cette pandémie a changé votre manière de penser et d'agir?

En vérité, ce qui s'est passé conforterait amplement l'idée que les modes de consommation changent, et ce, plutôt dans l'esprit "consommer moins, mais consommer mieux"...

Les français (entre autres) se sont très rapidement rendu compte des dépendances face à la Chine notamment au travers de l'absence des masques, les ruptures de matières premières, l'impossibilité d'acheminement etc...

Ainsi, les circuits courts; la production sur notre sol, avec son circuit vertueux tant au niveau environnemental (impact carbone beaucoup plus faible, normes respectées ..) que social (des emplois, donc moins de chômage, et des entreprises payant des impôts en France) pourrait avoir raison d'un système qui s'essouffle : celui de la surconsommation effrénée et de la production toujours plus grande pour toujours moins chère.

De notre coté, avec nos quelques dizaines de points de vente tous fermés durant les confinements, il a fallut adapter notre stratégie digitale afin de favoriser bien davantage la visibilité et la vente en ligne. D'autant plus que c'est la quatrième fin d'année perturbée pour les commerces (après les grèves et gilets jaunes) !

Nous sommes présents sur l'ensemble des réseaux sociaux et vendons également au travers de plateformes spécialisées dans les produits de fabrication française. Nous espérons ainsi mieux compenser le manque à gagner considérable en fin d'année.

Certains estiment qu’aujourd’hui l’overdose de produits saisonniers ne rime plus à rien. Prédiriez vous une fin de la "fast-fashion" ?

Quand on voit des vêtements vendus en masse dans les grandes chaînes parfois à 4 ou 5€, il faut se demander combien sont payés les travailleurs pour fabriquer ces articles "à usage unique" qui ne seront portés guère plus de 3 fois et qui seront déjà passés de mode au bout de quelques mois. La mode évolue en effet vite, parfois trop vite.

S’il y a quelques années nous ne jurions que par la fast-fashion, aujourd’hui, les choses sont en train de changer, un mouvement de fond s’est amorcé. Les questions environnementales sont nécessairement devenues une priorité pour les consommateurs au niveau mondial, et l’univers de la mode est en première ligne. Aujourd'hui, les consommateurs veulent plus de mode éco-responsable, de fabriqué localement, d'upcycling, voire vintage et seconde main.

Il y a néanmoins, un écart entre l’intention et l’action des consommateurs : une partie d'entre eux tient, bien sûr, à conserver l'accès à des collections de vêtements abordables renouvelées continuellement. Donc, la fin de la "fast-fashion", probablement pas tout à fait, mais une évolution vertueuse des mentalités vers le "Acheter moins, mais mieux "; certainement !

Après, il y a le jeu des masses critiques ... quand un nombre suffisant de personnes modifie son comportement, la majorité silencieuse suit le mouvement. Espérons que ce moment soit proche.

Compte tenu des prix parfois élevés, ne craignez-vous pas qu'une crise économique soit un frein pour le développement du Made in France?

Forcément, le "fabriqué en France", c’est généralement plus cher, mais au final les habits bon marché qui se déforment au bout de trois lavages, mal coupés sont finalement plus coûteux à long terme que ceux de meilleure qualité. Ainsi, nous devons inciter le consommateur à acheter de la meilleure qualité afin qu’il consomme moins...

Made in France rime forcément avec qualité, selon vous ?

Fabriquer en France coûte 3 à 8 fois plus cher qu'en dehors de nos frontières, c'est un fait. Alors quitte à avoir un produit plus onéreux, autant qu'il soit de bien meilleure qualité et que la différence à la caisse se justifie. Ainsi, l'idée est bien d'offrir un produit qui se démarque: durable et de haute qualité. A mon sens, cela fait longtemps qu'il n'y a plus aucun sens à fabriquer en France un produit de qualité moyenne. De plus, je pense qu'il est indispensable de communiquer sur la fabrication, et la provenance des matières afin d'offrir au consommateur une parfaite transparence.

Comment le traduisez vous dans vos collections?

En ce sens, nous avons fait le choix de faire certifier, au fur et à mesure, nos gammes "Origine France Garantie" par l'AFNOR. Par ailleurs, nous avons le plaisir de travailler avec des usines et ateliers pratiquement tous labellisés "Entreprise du Patrimoine Vivant" qui perpétuent un savoir faire familial, qui était encore récemment bien menacé, mais qui peut encore être sauvé, si la tendance actuelle se poursuit.

Et coté "Upcycling", êtes vous également positionné ?

De façon plutôt originale, oui : avec notre marque partenaire dédiée aux boutons de manchettes (1500 références disponibles sur https://autrepairedemanches.fr) nous montons en boutons des mécanismes issus de véritables montres Rolex, Audemars Piguet, Breitling, Jaeger LeCoultre etc. Ces pièces d'exception sont particulièrement appréciées des amateurs d'horlogerie. Mais au delà de la question du recyclage, nous nous intéressons à la durée de vie des produits. Pour accroître leur longévité, nous avons aussi quelques astuces...

Vous ne pouvez pas ne pas nous dévoiler ces secrets...

Nous fabriquons des chaussettes solides en coton fil d’Ecosse; un fil réputé pour sa souplesse et sa résistance. Mais nous souhaitons surtout révolutionner l’univers de la chaussette avec une invention toute bête (mais encore fallait-il y penser): nos chaussettes sont équipées d’un bouton-pression permettant de clipper chaque chaussette avec sa moitié, et d’éviter ainsi dépareillage et chaussette célibataire !

Coté ceintures, pareil, nous sommes sur des créations inusables : sans trous sur lequel toute la tension se concentre, nos ceintures sont tressées et élastiques, pour un meilleur confort et durabilité.

D'ailleurs, Le Chic Français semble avoir pris le parti d'axer ses collections sur l'intemporel, c'est juste?

Nous faisons le choix de vêtements durables et indémodables, plutôt conçus avec des matières naturelles, et agrémentés de subtiles finitions et détails originaux.

Nous travaillons sur les indispensables du vestiaire chic pour l'homme mais aussi la femme : la chemise blanche à poignets mousquetaires en double popeline de coton et aux finitions impeccable; la marinière (dont la tricolore, notre produit symbole) et le polo ; tout cela en pur coton, les boutons de manchettes (en bois, galuchat..), le pull marin pur laine (aux boutons d'ivoire végétal). Et pourquoi pas aussi les canotiers et capelines en paille (française) naturelle. ... Ces produits sont à la fois très français et intemporels.

Pour moi, "chic" et "indémodable" ont un lien. Une belle pièce : on ne s’en lasse pas, on la garde, même dans 5 ou 10 ans, on doit pouvoir la reporter. Pour cela elle se doit d’être d’une grande qualité tant esthétique que dans sa conception

Qu'y a t'il de plus écologique que l'indémodable ?

Suivez-nous sur Google News Economie Matin - Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités.

Aucun commentaire à «Mode : « Vers la fin de la fast fashion ? »»

Laisser un commentaire

* Champs requis