Successions : paierons-nous cher notre héritage ?

Anton Kunin
Par Anton Kunin Modifié le 5 janvier 2017 à 22h59
Personnes Agees
300 %Entre 1980 et 2015, le patrimoine des ménages a augmenté de 300 %.

Le think tank France Stratégie, dépendant du cabinet du Premier ministre, recommande de soumettre les héritiers à une fiscalité bien plus pesante et ce, jusqu’à la fin de leurs jours.

La valeur du patrimoine a triplé

Pour motiver leur recommandation, les spécialistes de France Stratégie partent d’un constat : entre 1980 et 2015, le revenu disponible des ménages a augmenté de 77 %, alors que le patrimoine, lui, a augmenté de 300 %. Cette envolée spectaculaire est en grande partie due à la flambée des prix de l’immobilier : entre 1997 et 2008, ces derniers ont doublé. Et quand on sait que 58,7 % des Français sont propriétaires, il n’y a rien d’étonnant au fait que la valeur du patrimoine de la majorité de nos compatriotes ait tant augmenté. Aujourd’hui, la France est même l'un des pays où le patrimoine est le plus élevé par rapport au revenu disponible, note-t-on chez France Stratégie.

Les sexagénaires, les mieux lotis

La catégorie d’âge qui dispose du patrimoine le plus important sont les sexagénaires. Et ce, pour deux raisons : ils ont connu des conditions plus favorables à l’accumulation du patrimoine du fait d’une meilleure insertion sur le marché du travail. D’autre part, ils ont accédé à la propriété avant le milieu des années 1990, c’est-à-dire à une époque où l’immobilier était beaucoup plus abordable, et ce qui leur a également permis de profiter de sa valorisation vertigineuse.

Une vague de successions en vue

Mais voilà que cette génération du baby boom, par ailleurs fort nombreuse, arrive progressivement à la fin de la vie. Si le nombre de décès a oscillé entre 500 000 et 550 000 par an depuis 1980, il est en forte hausse depuis 2010. Et ce mouvement n’en est qu’à ses débuts : selon les prévisions de l’Insee, on comptera environ 650 000 décès en 2035 et 750 000 après 2050. Conclusion : les 30 années à venir verront beaucoup de successions, et le capital transmis sera important.

Vers une redistribution plus équitable des richesses

Face à ces constats, les spécialistes de France Stratégie prônent une refonte du système fiscal, de façon à ce qu’il permette de « lutter contre l’inégalité des chances et éviter l’apparition d’une société à deux vitesses, où le patrimoine serait hérité à un âge avancé par une petite partie de la population ». Le système fiscal doit, selon eux, favoriser une redistribution du patromine entre générations et à l’intérieur des générations. Pour rappel, les 10 % les plus riches possèdent aujourd’hui la moitié du patrimoine des ménages.

Les auteurs du rapport souhaitent que soient supprimées certaines possibilités de défiscalisation, notamment en cas de transmission d’entreprise ou à travers un contrat d’assurance-vie. À elles seules, ces deux suppressions permettraient de générer 20 % de revenus fiscaux en plus, soit entre 2 et 2,5 milliards d’euros. Ces revenus fiscaux supplémentaires permettraient d’alléger la fiscalité du travail, particulièrement élevée en France. L’instauration d’abattements lors d’une donation favoriserait des transmissions de patrimoine du vivant des aînés, permettant ainsi aux jeunes d’y accéder plus tôt. Un taux plus bas en cas de transmission à un jeune contribuerait également à une distribution plus égalitaire des richesses, considèrent les spécialistes de France Stratégie.

Anton Kunin

Après son Master de journalisme, Anton Kunin a rejoint l'équipe d'ÉconomieMatin, où il écrit sur des sujets liés à la consommation, la banque, l'immobilier, l'e-commerce et les transports.

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