Les répartitions économiques de première instance

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Par Dominique Michaut Publié le 8 juin 2017 à 5h00
Repartitions Economiques Premiere Instance Cours
4On compte quatre types de répartitions économiques de première instance.

L’existence de répartitions économiques de première instance ne fait aucun doute. Mais lesquelles au juste ? Leurs sortes sont peu nombreuses : quatre.

Mais beaucoup de méprises à leur sujet est notamment indispensable pour s’en tenir à des fondamentaux sélectionnés au moyen d’une pétition de principe (Economie Matin du 16 février). L’échouage de l’économie de marché et du libre-échange sur le marchandage n’est évitable que par de la politique économique qui repose sur une conceptualisation exacte de chacune de ces quatre répartitions et de leurs relations.

La répartition des bénéfices des entreprises

En science économique de base (Economie Matin du 29 décembre), c’est juste après avoir filtré ce qui est successivement propre aux entreprises, au capital et au profit (chapitres 3, 5 et 6) que se dégage une solution de principe au problème de la répartition des bénéfices des sociétés commerciales. Bien que cette répartition s’effectue au cas par cas au niveau mésonomique, ses modalités les plus usitées ont des retombées macronomiques.

Au fil du temps, l’emploi globalement considéré (chapitre 7) est favorisé par la répartition des bénéfices nets en deux parts (Economie Matin du 4 mai). L’égalité de ces deux parts est arbitraire, mais aussi elle est du ressort de la subjectivité collective à laquelle échoit le réglage de la répartition du revenu total du travail (chapitre 9).

Les deux répartitions nationales de revenus

Les doctrines qui retentissent le plus sur la réputation publique de la libre pratique des échanges économiques sont celles qui se prononcent, d’une façon ou d’une autre, sur la répartition nation par nation des revenus proprement dits (les gains que procurent les ventes de marchandise élémentaire, Economie Matin du 26 janvier). Par rapport au revenu global, est-il dans le cours normal de cette répartition : 1) ou bien que le poids du total des revenus de placement augmente et le poids du total des revenus du travail baisse ; 2) ou bien que ces poids tendent à rester stables, au-delà des fluctuations conjoncturelles ; 3) ou bien que le poids du total des revenus du travail augmente et le poids du total des revenus de placement baisse ?

Les considérations que mes deux prochains articles résumeront montrent que dans le cours normal des répartitions nationales de revenu global se trouve la maximisation du revenu total du travail et la baisse de la part relative des revenus de placement.

À cette répartition macronomique s’en ajoute une autre, plus partielle logiquement mais tout aussi cruciale politiquement. C’est celle qui règle le partage du revenu total du travail en salaires individuels (salaire au sens de ce mot en science économique : toute rémunération du travail quelle que soit sa dénomination). L’existence de cette répartition ne fait aucun doute : dans ces rémunérations, il y en a qui sont égales ou à peu près égales et d’autres qui sont des multiples des plus basses. Dans une masse salariale, la réduction des écarts de rémunération individuelle ne change rien à la masse et ne dégrade ni la qualité ni la quantité de la production lorsqu’elle est longuement administrée par des taux d’augmentation des hauts salaires plus faibles que celles des salaires qui leur sont inférieurs. En tout état de cause, l’élévation des hautes et très hautes rémunérations du travail durablement plus rapide que celle des rémunérations plus basses n’étant pas tenable, il est absurde de penser et d’agir comme si cet écart croissant était normal sur longue et très longue période.

La répartition des coûts communs

Soit une entreprise spécialisée dans la production d’électricité à grande échelle. Ses usines sont des centrales, les unes hydrauliques, d’autres nucléaires, les troisièmes géothermiques. Ce cas d’école suffit à situer ce qu’est un coût commun. La direction générale et d’autres services généraux tels que celui d’administration comptable et financière, celui d’administration du personnel et des relations humaines ou encore celui de protection des sites contre leurs violations sont des coûts communs à répartir entre les ventes d’électricité selon que leur origine est hydraulique, nucléaire ou géothermique.

La théorisation néoclassique conduit à estimer qu’il n’y a pas de solution objective au problème de la répartition des coûts communs. Ce faisant, elle inflige à l’intérêt général un dommage considérable. En matière de prix auxquels les entreprises vendent, elle pousse à des fixations éloignées de la vérité des coûts. Brassages et négoces de bases de données informatisées aidant, les prix à la tête des clients fleurissent, avec en vedettes les manipulations à grande échelle de la mentalité des chalands qui rendent de plus en plus fictive la liberté de choisir.

L’échouage sur le marchandage

Dans ce qu’il est très important qu’on se mette à enseigner aux jeunes gens se trouve ceci : par contraste, l’économie objective montre à quel point ils héritent d’un fatras d’idées et d’actions qui escamotent la problématique des quatre répartitions économiques de première instance. Cet escamotage conduit tout droit à l’échouage sur le marchandage, tout en passant sous silence que c’est au moyen de représentations de l’économie qui restent beaucoup plus primitives et imaginaires que le réel élémentaire et le réalisable demain l’autorisent.

L’amoncellement et le ressassement de critiques sur l’état de l’économie ne suffiront pas à sortir du piège. Le cours normal des deux répartitions nationales de revenus s’explique bien, pour autant qu’on accepte de le chercher hors du cadre dans lequel le subjectivisme économique a cru scientifique de le placer. Les répartitions nationales du revenu global sont régies de fait par des définitions, recevables en logique des ensembles finis, des concepts de rentabilité, de productivité et de profitabilité. Certes, en l’état actuel de la théorisation économique, ces définitions sont vertigineuses : pourquoi sont-elles confinées dans la réserve de ce qui ne se dit ni en salles de cours d’économie et de gestion ni en salles de rédaction bien-pensante ?

Épisodes à suivre

Dans le feuilleton hebdomadaire d’économie objective que je déroule sur le site de l’Economie Matin, le prochain épisode montrera pourquoi le revenu total du travail (RT) est ce qui reste du revenu global (RG) après constitution du revenu total des placements (RP) : RT = RG – RP. Cela fait, l’épisode suivant montrera qu’une autre équation règle inéluctablement la répartition du revenu global (RG). C’est de cette autre équation que résulte le constat empiriquement vérifié sur longue période dont j’ai fait état ci-dessus : le cours normal de l’économie de marché comporte la maximisation du RT et la baisse de la part relative du RP.

Une douzaine d’épisodes plus tard, je commencerai à montrer qu’une myriade de déclinaisons de la même équation tend à régler la répartition objective des coûts communs. Le bon sens ne parvient pas à se départir de l’intuition que les prix auxquels les entreprises vendent sont plus ou moins justes. Sur ce point, le bon sens a raison et il ne reste plus qu’à lui faire apparaître ce qu’il lui faut demander pour être mieux satisfait : la levée des entraves à l’égalisation des rentabilités directes de même appartenance, j’expliquerai bien sûr de quoi il retourne.

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Dominique Michaut a été directeur des études du Centre consulaire de formation de Metz puis conseiller de gestion, principalement auprès d’entreprises. Depuis 2014, il administre le site L’économie demain, dédié à la publication d’un précis d’économie objective (préface de Jacques Bichot).

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