L’énergie nucléaire est en déclin rapide sur la planète

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Par Stéphane Lhomme Modifié le 13 décembre 2022 à 20h41

On lit parfois ici où là que, malgré la catastrophe de Fukushima, l'industrie nucléaire repart du bon pied et se développe sur la planète. Cette allégations ne résistent pas à la consultation des données les plus officielles, comme par exemple la parution annuelle de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) : Key World Energy Statistics.

Le rapport le plus récent disponible est celui de 2013. Il est à noter que les chiffres sont ceux de 2011 car l'AIE met deux ans pour recueillir toutes les données précises, pays par pays. Or, c'est en mars 2011 qu'a débuté la catastrophe de Fukushima : depuis, les 54 réacteurs du Japon sont arrêtés, puis l'Allemagne a fermé 8 réacteurs, les USA 5 réacteurs (**), etc.

Donc, aujourd'hui, la part du nucléaire est encore plus basse que ce que l'on peut voir dans ce document mais, d'ores et déjà, en page n°24, on constate que le nucléaire ne produisait en 2011 plus que 11,7% de l'électricité mondiale, les renouvelables étant déjà à plus de 20% (15,8% + 4,5%).

Depuis, la part du nucléaire est passée sous les 10% car la production nucléaire mondiale a chuté et, dans le même temps, toutes les autres énergie ont progressé : les renouvelables bien sûr, mais aussi le trio pétrole-gaz-charbon.

On peut certes le déplorer (pour ce trio) mais c'est l'implacable réalité : si toutes les autres énergies progressent sauf le nucléaire, c'est tout simplement parce que ce dernier est TROP CHER, contrairement à ce que les autorités françaises (politiques et industrielles) prétendent. Les multinationales de l'énergie n'ont que faire des risques sanitaires et environnementaux : si elles se détournent du nucléaire, c'est uniquement pour des raisons de business, et leur verdict est sans pitié pour l'atome.

Au fil des parutions des statistique annuelles, on constate de plus que la part du nucléaire dans l'électricité mondiale décline continuellement depuis 2001, bien avant Fukushima, et que cette part est passée de 17% en 2001 à 9% à ce jour. C'est donc un véritable effondrement, qui va implacablement se poursuivre au fil des fermetures de vieux réacteurs (plus de la moitié des 400 réacteurs sur Terre a dépassé 30 ans).

Il y a certes 72 réacteurs en construction dans le monde mais une bonne quinzaine sont en chantier depuis 20, 25, 30 ou même 40 ans comme à Watts Bar (USA). Pour les autres, sachant qu'il faut en moyenne 15 ans pour mettre un réacteur en service, on peut donc tabler sur 4 mises en service par an... ce qui ne compensera même pas les fermetures.

Cette chute est si prononcée que le lobby nucléaire mondial, la World Nuclear Association (WNA) a préféré censurer ses propres documents en faisant disparaître la courbe de la part du nucléaire dans l'électricité mondiale :

Notons enfin que le nucléaire représente moins de 10% l'électricité... qui représente elle-même moins de 18% de la consommation mondiale d'énergie, comme on peut le voir sur Key World Energy Statistics en page n°28. Le reste est majoritairement de la combustion de pétrole, gaz, charbon, biomasse, etc. Ce qui fait que, au final, le nucléaire couvre moins de 2% de la consommation mondiale d'énergie.

En résumé, le nucléaire impose des risques gigantesques, des problèmes dramatiques et insolubles (déchets radioactifs en particulier), des crises géopolitiques de plus en plus inquiétantes, et tout ça en échange d'une contribution dérisoire et déclinante à l'énergie mondiale. En clair : autant s'en passer au plus vite et se concentrer sur les vraies options d'avenir : économies d'énergie et énergies renouvelables.

(**) Quatre réacteurs américains définitivement fermés en 2013 :

- Crystal River 1 de Duke Energy,
- San Onofre 1 et 2 de la Southern California Edison
- Kewaunee 1 de Dominion malgré une autorisation de prolongation à 60 ans (2033).
Le réacteur de Vermont Yankee sera définitivement fermé fin 2014 malgré une prolongation à 60 ans (2032).

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Stéphane Lhomme est Directeur de l'Observatoire du nucléaire, une association loi 1901 dont l'objet est de décrypter la communication de l'industrie nucléaire et de faire connaître la vérité sur les pratiques de cette industrie.

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